Loi travail : malgré les manifestations, le gouvernement drague les PME

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  482  mots
Alors que des milliers de salariés manifestent, la ministre du Travail, Myriam El Khomri, annonce que le projet de loi Travail pourrait faciliter les licenciements économiques dans les PME.
En pleine journée d'action des syndicats de salariés et d'étudiants, Myriam El Khomri indique que le projet de loi Travail pourrait raccourcir la période de baisse de chiffres d'affaires pouvant justifier un licenciement économique dans les PME.

Décidément, le gouvernement a une bien étrange gestion du temps sur le projet de loi travail. Ce jeudi 31 mars, alors que des milliers de personnes descendent dans la rue à l'appel de syndicats de salariés et d'étudiants pour protester contre le contenu du projet de loi, Myriam El Khomri, la ministre du Travail, annonce sur RMC et BFM TV qu'elle serait "favorable" à une "différenciation" des critères de licenciements économiques selon la taille des entreprises.

Certes, il s'agit là de répondre à l'une des revendications des organisations patronales de TPE et des PME, notamment la CGPME, qui se considèrent comme "les grandes oubliées" de la loi travail. Mais un jour où des centaines de milliers de salariés et étudiants battent le pavé, on aurait pu penser que c'est plutôt à leur destination que la ministre adresserait un geste... Et bien non, c'est l'inverse... Il y a mieux pour faire baisser la tension.

Le nombre de trimestres de baisse du  chiffre d'affaires en question

Sur le fond, quelle est l'idée de Myriam El Khomri? Son projet de loi introduit dans le code du travail des critères de licenciement économique déjà reconnus par la jurisprudence. Par exemple, à défaut d'accord collectif, quatre trimestres consécutifs de baisse du chiffre d'affaires pourraient justifier un licenciement économique. Pour la CGPME, ce délai est trop long pour les PME qui n'ont pas toujours la trésorerie suffisante pour tenir.

La ministre semble sensible à l'argument en déclarant:

"Si, dans le débat parlementaire, il y a cette proposition de différencier le nombre de trimestres selon la taille de l'entreprise, moi, j'y suis favorable (...). Je ne vous dis pas le nombre de trimestres qu'il faudrait mettre dans la loi, ce que je vais vous dire, c'est qu'en effet, différencier les choses entre les TPE-PME et les grands groupes, oui, je pense que nous pouvons y être favorables",

Il s'agit notamment d'une proposition du rapporteur PS du projet de loi, Christophe Sirugue,  -  à la recherche depuis plusieurs jours de mesures favorables aux PME/TPE -, qui a indiqué jeudi dans Les Echos qu'il préparait des amendements rabaissant la durée nécessaire de chute du chiffres d'affaires pour les entreprises de moins de 300 salariés. Une idée également défendue, mais dans le sens inverse, par la CFDT qui propose d'augmenter le délai prévu de quatre mois pour les entreprises de plus de 300 salariés...

Vers un nouveau seuil social?

Certes, mais on notera qu'à une époque où l'on cherche à combattre les seuils sociaux, une telle mesure va conduire à en créé un supplémentaire. De même, il reste aussi une interrogation constitutionnelle. Est-il possible de moduler dans la loi les critères à retenir pour la validité d'un licenciement économique en fonction de la taille des entreprises? Ce n'est pas totalement certain.