Lutte contre la fraude fiscale : des résultats en repli

Par Grégoire Normand  |   |  607  mots
Selon le rapport annuel de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), rendu public le 17 juillet, 17,9 milliards d'euros de droits et pénalités ont été notifiés l'an dernier par l'administration fiscale aux contribuables et aux entreprises. (Crédits : Charles Platiau)
La Direction générale des finances publiques (DGFIP) a annoncé dans son rapport annuel que l'administration avait encaissé 9,4 milliards d'euros en 2017 contre 11,1 milliards un an auparavant dans le cadre de lutte contre la fraude fiscale. Soit une perte nette de 2,8 milliards d'euros en deux ans pour le budget de l'État.

Dans son rapport d'activité annuel publié mardi 17 juillet, la direction générale des finances publiques (DGFIP) a indiqué que la lutte contre la fraude fiscale avait moins rapporté en 2017, en raison notamment d'une diminution de l'activité des guichets de régulation des évadés fiscaux. Alors que le gouvernement prévoit de réformer l'administration fiscale en profondeur en proposant notamment une réorganisation des services, de nombreuses questions restent en suspens sur les arbitrages à venir de l'exécutif. Par ailleurs, la récente mise en garde à vue du député des Hauts-de-Seine Thierry Solère, à la suite d'une enquête ouverte pour soupçons de fraude fiscale, rappelle que la lutte contre la fraude nécessite des moyens conséquents si elle veut être efficace.

Baisse des redressements

Sur l'ensemble de l'année 2017, les redressements fiscaux notifiés ont atteint 17,9 milliards d'euros, soit un repli de 1,6 milliard par rapport à 2016 (19,5 milliards), et de 3,3 milliards par rapport à 2015, année marquée par un niveau de redressements record (21,2 milliards). Sur ces montants, les sommes encaissées réellement sont en net recul depuis trois ans avec 12,2 milliards d'euros en 2015, 11,1 milliards en 2016 et 9,4 milliards en 2017.

La diminution concerne également les créances fiscales recouvrées, c'est-à-dire les sommes effectivement encaissées par le fisc après une éventuelle contestation des contribuables passées de 11,1 milliards en 2016 à 9,4 milliards d'euros l'an dernier. "Il n'y pas eu de changement de politique", a expliqué le directeur général de la DGFIP Bruno Parent lors d'une présentation à la presse.

Baisse de régime de "la cellule de dégrisement"

L'état-major de l'administration fiscale a avancé deux principaux facteurs pour expliquer le recul de la lutte contre la fraude fiscale. Le premier concerne la baisse du régime du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), mis en place en 2013 pour favoriser la régularisation des évadés fiscaux, et qui a officiellement fermé ses portes au 31 décembre 2017. Selon Bercy, cette "cellule de dégrisement", qui permettait aux personnes détenant un compte caché à l'étranger de régulariser leur situation moyennant des pénalités allégées, a rapporté 1,3 milliard l'an dernier, contre 2,5 milliards en 2016.

L'autre explication tient à la baisse des dossiers dits "exceptionnels". En 2015, plusieurs gros redressements liés à des multinationales avaient été notifiés par Bercy. Les cinq plus gros dossiers avaient alors atteint 3,3 milliards d'euros. Or ces opérations "ne se reproduisent pas mécaniquement d'une année sur l'autre", a rappelé Bruno Parent. "Comme on est sur une base très étroite qui fluctue, ça a une influence sur le total", a-t-il ajouté.

Concernant l'action pénale, le nombre de dossiers transmis à l'autorité judiciaire a reculé en trois ans passant de 1.195 en 2015 à 1.095 en 2017. Sur l'ensemble des dossiers transmis, ceux remis à à la police fiscale ont sensiblement diminué passant de 79 en 2015 à 44 en 2017.

Le plan du gouvernement

La publication de ces chiffres intervient alors que le gouvernement a annoncé au printemps vouloir renforcer sa politique de lutte contre la fraude. Dans un projet de loi présenté en avril dernier, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a présenté les grandes lignes du dispositif. Il comporte la création d'un service d'enquête spécialisé au sein de Bercy qui pourra être saisi par le parquet national financier pour les affaires nécessitant une expertise fiscale pointue.

Outre cette mesure, le gouvernement envisage de mettre en place une procédure de "name and shame" en permettant la publication du nom du fraudeur en cas de condamnation pénale.

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(Avec agences)