Pour les économistes, la reprise de la croissance se pérennise

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  957  mots
Selon l'OFCE et COE Rexecode, le taux de chômage devrait passer de 9,2% à la mi 2017 à 8,9% fin 2018. Les deux organismes tablent sur une croissance assez solide mais COE Rexecode estime que pour "booster" la croissance il faut absolument améliorer la compétitivité-coût des entreprises françaises, via une baisse des "impôts de production".
COE Rexecode et l'OFCE ont publié leurs prévisions de croissance pour 2018, le PIB progresserait de 1,6% pour le premier et de 1,7% pour le second. COE Rexecode estime que la réforme du droit du travail et de la fiscalité va "booster" les créations d'emplois et la croissance potentielle mais que des freins demeurent, notamment le déficit de compétitivité-coût des entreprises françaises.

La dynamique de l'économie française est positive et cela devrait perdurer... sauf accident conjoncturel. Ce pronostic émane, il faut le souligner, tant de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), d'obédience néo-keynésienne, que de l'institut COE-Rexecode, proche du patronat. Le ciel se dégagerait donc... mais certains facteurs continueraient de peser défavorablement.

Les deux organismes tablent sur une croissance du PIB plus soutenue en 2017 que ce qui était prévu : pour l'OFCE, elle atteindra 1,8%, contre 1,5% dans ses précédentes prévisions publiées en juillet. Cette prévision rejoint celles de l'Insee et de Bercy. En 2018, la croissance devrait atteindre 1,7% (contre 1,5% anticipé jusqu'alors) et 1,9% en 2019 (contre 1,7%).

Pour l'OFCE la politique de l'offre de Hollande a eu des effets positifs...

En effet, pour l'OFCE, "certains facteurs négatifs qui ont marqué 2016 (chute de la production agricole, impact des attentats sur le tourisme, conflits autour de la loi travail) ont disparu en 2017". En outre, "l'économie devrait désormais profiter pleinement des effets positifs des politiques d'offre instituées sous la présidence Hollande" en faveur des entreprises (avec, en particulier, le Crédit d'impôt compétitivité emploi). Façon de signifier à Emmanuel Macron que l'héritage dont il bénéficie n'est pas si négatif que cela...

Mais l'OFCE reconnait également des mérites à l'actuelle majorité en notant que pour 2018 et 2019, l'objectif du gouvernement n'est pas une "réduction à marche forcée du déficit public", via des politiques d'austérité, même si 60 milliards d'euros d'économies sont prévus sur cinq ans. De fait, selon les calculs de l'organisme, sur ces deux prochaines années, l'impact des mesures prévues par l'exécutif sur le PIB devrait être « seulement » de -0,2 point.

Résultat, la réduction du déficit public sera lente, l'OFCE table sur un déficit de 2,9% en 2017, de 2,6% en 2018 - soit la prévision gouvernementale - et de 2,9% en 2019, année où le CICE sera transformé en baisses pérennes des cotisations sociales patronales, ce qui va augmenter durant une année les dépenses de l'Etat.

... et COE Rexecode salue la réforme du marché du travail de Macron

COE-Rexecode, lui, table sur une croissance de 1,7% cette année puis de 1,6% en 2018 mais reste en revanche plus sceptique la trajectoire pluriannuelle arrêtée par le projet de loi de finances (PLF) 2018 qui prévoit une croissance annuelle de 1,7% jusqu'en 2021. En effet, pour l'institut, « des freins structurels à la croissance française demeurent, compétitivité-coût insuffisante ; niveau et structure des prélèvements obligatoires ».

Pour autant, l'institut souligne que deux ensembles de mesures vont être de nature à renforcer la croissance potentielle. Il s'agit tout d'abord des mesures sur le travail, notamment les ordonnances, qui vont permettre de :

« Faire évoluer les salaires davantage en phase avec les gains de productivité. Par ailleurs, la plus forte mobilité de la main-d'œuvre devrait permettre aux entreprises de se réorganiser plus facilement et aux salariés de s'orienter vers les secteurs les plus porteurs, ce qui augmenterait durablement les gains de productivité et donc la croissance potentielle. »

COE Rexecode risque un chiffrage. Pour lui, l'impact économique que l'on peut attendre des ordonnances pourrait être de l'ordre de 160.000 emplois supplémentaires à moyen terme (2022) ainsi « qu'un relèvement du PIB potentiel de 0,6 point".

Ensuite, l'autre facteur positif proviendrait de la réforme de la fiscalité du capital qui « stimulera la croissance ». COE Rexecode se félicite ainsi de la suppression de l'ISF « cette anomalie française » et de l'instauration d'un prélèvement forfaitaire unique de 30%, qui correspond grosso modo à la moyenne européenne.

In fine, selon l'Institut, si l'on ajoute les réformes du marché du travail et celles de fiscalité, le PIB potentiel de 2022 sera supérieur de 1 à 1,5 point au niveau qu'il aurait atteint en l'absence de ces réformes...

Un effort à faire sur la compétitivité-coût

COE Rexecode estime aussi que les autres réformes prévues dans le PLF et le PLFSS  (financement sécurité sociale) de 2018  - suppression des cotisations salariales chômage et maladie et augmentation de la CSG ; suppression progressive de la taxe d'habitation, début de la baisse de l'impôt sur les sociétés, etc. - devraient entraîner une très légère baisse des prélèvements obligatoires en 2018 : - 0,6 milliard d'euros pour les ménages et -1,9 milliard pour les entreprises.

Reste que pour COE Rexecde, deux problèmes restent impérativement à régler pour « booster » l'économie française. Il s'agit d'abord de poursuivre l'amélioration de la compétitivité-coût de la France. Selon l'Institut, depuis 20 ans la perte de compétitivité extérieure est le principal frein à la croissance. Le CICE et le pacte de responsabilité n'auraient permis de corriger qu'un quart de la dérive des coûts entre la France et l'Allemagne. Trop d'impôts de « production » pèseraient encore sur les comptes d'exploitation (CVAE, CFE, etc.). Aussi, l'Institut recommande un allègement de ces prélèvements.

COE Rexecode se montre également sceptique sur la réduction de la dépense publique, estimant que l'on n'arrive pas à « identifier les mesures concrètes d'économies qui doivent être distinguées des moindres hausses ». Il estime ainsi que l'intention du gouvernement de baisser le poids des dépenses publiques dans le PIB de 3 points doit se traduire par de « vraies » baisses de ces dépenses publiques...

Enfin, note positive, selon l'OFCE et COE Rexecode, les créations d'emplois devraient se poursuivre, quoiqu'à un rythme plus modéré, et le taux de chômage devrait baisser en France métropolitaine de 9,2% à la fin du deuxième trimestre 2017 à 8,9% fin 2018. L'OCDE pronostique même un taux de 8,5% fin 2019.