Pourquoi Emmanuel Macron remonte dans les sondages

Par latribune.fr  |   |  1031  mots
Le président de la République Emmanuel Macron. (Crédits : Benoit Tessier)
En mauvaise posture en décembre dernier et décrié par une frange de l'opinion publique, la cote de popularité d'Emmanuel Macron progresse de six points, à 34% d'opinions positives en février, selon le tableau de bord politique Ifop-Fiducial pour Paris Match et Sud Radio diffusé mardi 5 février. Un retournement de situation qui s'explique par différents facteurs.

ll remonte la pente. Vilipendé de toute part par le mouvement des "Gilets jaunes", qui continue d'appeler régulièrement à sa démission, Emmanuel Macron reprend des couleurs après avoir vu sa cote de popularité fondre comme neige au soleil en fin d'année dernière. Le président de la République, qui avait déjà gagné 5 points en janvier, poursuit sa "remontada" dans les sondages avec un gain de 6 points de popularité supplémentaire en février, rapporte le dernier baromètre Ifop-Fiducial pour Paris Match et Sud Radio, publié mardi 5 février.

Au point de recoller avec un niveau comparable à celui qui était le sien en octobre dernier (33 %), avant la crise des Gilets jaunes. Même si 66 % des Français désapprouvent toujours son action, cette remontée s'apparente à une gageure pour le chef de l'État pourtant desservi par les récentes révélations sur l'affaire Benalla. Comment expliquer cette amorce de retour en grâce ?

  • La reprise en main du calendrier

Dépassé par le mouvement des Gilets jaunes, l'autoproclamé "Maître des horloges", en fâcheuse posture en novembre, a su reprendre la main sur le calendrier en deux temps : d'abord via les annonces du 10 décembre sur le pouvoir d'achat : la combinaison des mesures annoncées, pour un coût compris entre dix et quinze milliards d'euros, a permis de modifier la perception qu'avait l'opinion publique à son endroit, celle d'un président opiniâtre et inflexible, et de calmer une partie des gilets jaunes modérés.

Secundo, le Grand débat lancé par ses soins et dans lequel le président de la République s'implique directement. Emmanuel Macron semble avoir entendu les reproches formulés à son encontre notamment sa propension à exercer le pouvoir en solitaire et la distance qu'il mettait entre lui, les corps intermédiaires et les Français. Désormais, le chef de l'État s'investit, va à la rencontre des Français et donne de sa personne en participant à des débats publics avec élus et citoyens, ici à Bourg-de-Péage (Drôme), là à Evry-Courcouronnes. Un travail de fond effectué sur lui-même et sur son image, avec pour objectif de reconquérir les Français, qui commence à porter ses fruits.

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Car si le Grand débat est dénoncé par toutes les oppositions comme une opération de communication ou de promotion du président de la République, il semble que cette invitation à prendre la parole, à remplir des cahiers de doléances et à déposer des contributions sur le site dédié à cette concertation nationale, réponde à une attente. Pour cause, des centaines de débats locaux sont programmés et les Français semblent s'être emparés du débat bien que son issue et les débouchés qu'il offre demeurent incertains.

  • Son recentrage sur l'électorat de droite

Alors qu'il est contesté dans la rue par une large franche de la population, en majorité apolitique ou situé à l'extrême-droite et à l'extrême gauche de l'échiquier politique, l'électorat de droite traditionnel continue d'apporter son soutien à Emmanuel Macron. Ainsi, c'est auprès des sympathisants des Républicains (29%, +7%) et du MoDem (52%, +14%) que la proportion de sondés "satisfaits" d'Emmanuel Macron augmente le plus dans ce sondage du 5 février. Pour cause, le président a multiplié les signaux à leur destination. Des phrases polémiques comme celle sur "les gens en situation de difficulté que l'on va davantage responsabiliser, parce qu'il y en a qui font bien et il y en a qui déconnent", prononcée lors d'une visite "surprise" à un conseil municipal à Gagny, dans l'Eure, mardi 15 janvier ou encore sa volonté d'inclure l'immigration parmi les thèmes du Grand débat sont autant de marqueurs de droite auquel cet électorat est sensible.

Cette attitude du chef de l'Etat répond à une stratégie : s'il veut regagner des soutiens, il doit en effet se tourner vers la droite. A gauche, le seul gros "réservoir de voix" est chez Jean-Luc Mélenchon. Or, celui-ci est trop éloigné politiquement de lui pour qu'il puisse espérer récupérer des voix de ce côté. A travers ces positions, Macron a ainsi recollé à une grande partie de son électorat original du premier tour de la présidentielle mais aussi renoué des fils avec une frange de l'électorat du centre et de la droite, plus âgée, souvent retraité et traditionnellement plutôt partisane de l'ordre. C'est d'ailleurs cette population qui s'est appropriée le Grand débat en participant massivement à cette concertation là ou les jeunes en sont plutôt absents. En revanche, l'absence de réponses adéquates à l'issue de cette concertation pourrait remettre le feu aux poudres.

  • Le mouvement des Gilets jaunes à la croisée des chemins

Après plus de deux mois de mobilisation, le mouvement des Gilets jaunes est à la croisée des chemins. Des voix dissonantes se font entendre quant aux moyens à utiliser pour faire entendre leurs doléances. La question d'une structuration du mouvement devient criante en témoigne le dépôt d'une liste issue du mouvement présentée pour les élections européennes. "Soit une dynamique s'organise autour d'un leader, soit le mouvement se délite", explique Olivier Costa directeur de recherches au CNRS, dans les colonnes du Monde.

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Surtout, le mouvement commence à lasser l'opinion publique qui, si elle est en accord avec les revendications affichées par le mouvement, s'inquiète du climat délétère et anxiogène qui règne autours des manifestations. Selon un sondage Opinion Way pour LCI publié le 19 janvier dernier, juste après l'intervention d'Emmanuel Macron devant les maires de Normandie, 56% des Français soutenaient toujours le mouvement des Gilets jaunes. C'est une majorité large mais qui s'érodait un peu (- 1 point) par rapport au dernier sondage. Surtout, ce chiffre était le moins élevé depuis le début du mouvement : il avait atteint 68% de soutien au début du mois de décembre.

(Avec AFP)