Que propose François Fillon pour améliorer la santé des Français ?

Par Fabien Piliu  |   |  1030  mots
Son programme intègre une nouvelle répartition du financement entre l'assurance maladie obligatoire (AMO) et l'assurance maladie complémentaire (AMC), selon la nature des actes.
Le vainqueur du premier tour de la primaire de droite et du centre souhaite confier une partie du remboursement des actes médicaux au secteur privé, via les complémentaires santé. Il souhaite également replacer la médecine de ville au centre du système d'accès au soins et renforcer la prévention, entre autres mesures.

Du tangage est à prévoir. Ce n'est pas parce que l'OCDE juge que le système de santé français est l'un des plus performants et des plus justes au monde qu'il ne peut pas être revu. C'est du moins le point de vue de François Fillon pour améliorer le système de santé tricolore, qui souffre de quelques dysfonctionnements persistants que les gouvernements qui se succèdent ne parviennent pas à corriger. Citons les difficultés croissantes d'une partie de la population, en particulier les jeunes et les plus modestes, à accéder aux soins.

Quelles réformes envisage François Fillon ? Une mesure, jusqu'ici portée discrètement, commence à faire grand bruit : la modification du financement des actes médicaux.

Concrètement, son programme intègre une nouvelle répartition du financement entre l'assurance maladie obligatoire (AMO) et l'assurance maladie complémentaire (AMC), selon la nature des actes. "En effet, j'ai retenu dans mes propositions santé de réserver la prise en charge des affections graves ou de longue durée à l'AMO (panier de soins solidaire) et le reste à l'AMC (panier de soins individuel)", explique-t-il, interrogé sur ses intentions par la Confédération des syndicats des médecins de France (CSMF).

En clair, il s'agit de confier aux privé, via les complémentaires santé, le financement des actes les plus simples réalisés par la médecine de ville. Certains experts redoutent une flambée des cotisations des complémentaires santé.

La médecine de ville, la priorité

Sur le plan de la gouvernance du système de santé, d'importantes réformes sont également en vue.

Après le "tout-hôpital" qui fut l'alpha et l'omega de la politique du gouvernement au cours du quinquennat, l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy qui fut également ministre des Affaires sociales de Jacques Chirac, souhaite replacer la médecine de ville au centre du système de santé.

Précisément, François Fillon a indiqué qu'il ne fallait pas revenir sur la liberté d'installation des médecins, un temps menacée par le gouvernement actuel. Dans les déserts ruraux, il plaide pour la création de maisons de santé pluriprofessionnelles dans lesquelles les médecins participeraient à la permanence des soins. Pour que les médecins souhaitent continuer à exercer en cumul emploi-retraite après 65 ans, il plaide pour une adaptation des cotisations retraite, jugées "très élevées et non incitatives".

L'hôpital n'est pas complètement absent de son programme. Tout en proposant la création d'un label "Hôpital France" afin de faire la promotion des hôpitaux français à travers les monde, il souhaite le retour aux 39 heures, payées 35, ainsi que la fermeture des petits hôpitaux. Il plaide aussi pour un développement accéléré du virage ambulatoire, via la création d'hôtels hospitaliers.

La prévention pour mieux et moins guérir

Il veut également développer la prévention, qui ne représente actuellement que 2% des dépenses de santé. "Une réelle politique de prévention est à mettre en œuvre ; son coût sera largement compensé par les dépenses de santé évitées", précise-t-il à la CSMF. Là encore, le rôle de la médecine de ville est jugé essentiel. "Je crois en l'efficacité de l'éducation à la santé et de l'éducation thérapeutique par le médecin traitant, du fait d'une relation privilégiée avec le patient. Je suis favorable à ce que les médecins soient aidés grâce à différents documents d'information et aux programmes d'éducation thérapeutique agréés par l'ARS et déjà présents à l'hôpital. Les consultations ayant une part spécifique d'information devront être cotées en actes complexes et par là même mieux rémunérées", explique François Fillon qui précise par ailleurs que les médecins seraient, s'il était élu à la présidence de la République, concernées par toutes les mesures qu'il compte mettre en place pour libérer les énergies, notamment dans le domaine fiscal ou dans le numérique.

Relancer le Dossier médical personnalisé

Sur ce point, il entend soutenir le développer du Dossier médical personnel (DMP) que les patients pourraient commencer à ouvrir et que la CSMF considère par ailleurs comme "une catastrophe industrielle à la française, de celles qu'adore le Cour des compte qui en a fait ses choux gras".

Reste à savoir si François Fillon réussira là où les exécutifs précédents, et notamment son gouvernement, ont échoué. Pour mémoire, l'installation du DMP a été lancée par la loi du 13 août 2004... Comme le rappelle la CSMF, cette mesure phare de cette loi dite loi Douste-Blazy devait rapporter près de 3,5 milliards d'économies annuelles à l'assurance maladie en organisant la coordination de soins entre la ville et l'hôpital, et en éliminant les actes redondants. Douze ans plus tard, son bilan est pour le moins médiocre. Il a coûté un demi-milliard d'euros pour 418.000 dossiers créés, vides ou presque pour la plupart.

Réécriture de la loi Santé

Une autre mesure du programme Fillon ne devrait pas cette fois entraîner de scepticisme de la part des professionnels : la réécriture de la loi Santé qui a rendu obligatoire le tiers-payant auquel ils se sont farouchement opposés. "L'abrogation du tiers payant généralisé, disposition déresponsabilisante et inflationniste devra conduire à une loi rectificative de santé", avance François Fillon.

Enfin, c'est une fin de non-recevoir polie que l'un des deux candidats de la droite et du centre adresse à la CSMF qui réclame un espace de liberté tarifaire. "On peut concevoir un espace de liberté tarifaire. Mais il doit s'inscrire dans un cadre conventionnel. Il ne faut pas opposer l'intérêt des médecins et celui des patients qui demandent naturellement la couverture la plus complète de leurs dépenses de santé. Seule la régulation conventionnelle permet d'aboutir à cet équilibre. La rémunération des médecins libéraux, avec une économie française redémarrant nettement, plus performante sera rehaussée à une juste valeur ", explique-t-il.