Réforme droit du travail : les Français hésitants

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  589  mots
Le Premier ministre Edouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Penicaud poursuivent ce 29 mai les consultations avec les organisations syndicales et patronales sur une prochaine réforme du droit du travail qui divise les Français.
Les Français sont hésitants sur la réforme du droit du travail souhaitée par Emmanuel Macron, selon un sondage Elabe. S'ils approuvent la simplification des instances représentatives du personnel, ils sont en revanche contre un plafonnement des dommages et intérêts accordés par les prud'hommes.

Les Français hésitent. Ils veulent bien une réforme du droit du travail mais pas forcément d'une grande ampleur. Et s'il y a quelque chose qu'ils refusent totalement c'est un plafonnement des dommages-intérêts accordés par les prud'hommes en cas de licenciement abusif. Une idée pourtant chère à Emmanuel Macron et au patronat mais qui est unanimement combattue par les syndicats.

Une majorité contre le plafonnement des indemnités prud'homales

Selon un sondage Elabe* réalisé pour Les Echos, Radio Classique et l'Institut Montaigne, une forte minorité de 44% des Français sont favorables à une réforme "en profondeur" du code du travail, alors que 50% veulent "l'aménager sur quelques aspects seulement". En revanche, Ils ne sont que 6% à désirer le statu quo.

[Crédits : Statista.]

Mais quand on rentre dans le détail des mesures, on s'aperçoit donc que 56% rejettent un plafonnement des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif. Actuellement, il existe déjà un barème d'indemnisation en fonction de l'ancienneté du salarié licencié abusivement mais il n'est qu'indicatif. Les conseillers prud'homaux ne sont donc pas obligés de s'y référer.

D'autres mesures que le gouvernement veut mettre aussi sur la table semblent rencontrer l'assentiment d'une majorité de Français. Ainsi, Il sont 72% à être favorable   à une fusion des instances représentatives du personnel ou à l'organisation par l'employeur de référendum en cas d'accord minoritaire (71%).

Les Français sont en revanche moins nombreux (57%) à approuver qu'un accord d'entreprise déroge à un accord de branche pour fixer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

Le contenu exact de la réforme encore inconnu

Reste que l'on ne connaît pas encore dans le détail le contenu exact de la future réforme. Le Premier ministre et la ministre du Travail doivent d'ailleurs continuer ce lundi 29 mai à consulter les organisations patronales et syndicales. L'opinion des Français peut donc encore passablement évoluer.

D'autant plus que la matière est technique et ardue. Que penseront les Français si la réforme autorise une entreprise par accord, voire par un référendum de l'employeur, à remonter le seuil de déclenchement des heures supplémentaires à 37 ou 38 heures, au lieu des 35 heures actuelles?

De même sur le référendum à l'initiative de l'employeur. On ne sait pas encore si l'entreprise aura toute latitude pour contourner le "fait syndical"et proposer directement aux salariés de valider un "accord" via un referendum et sans donc passer par la technique du "mandatement". Ou bien si ce référendum ne pourra intervenir qu'a l'issue d'un échec des négociations avec les syndicats, c'est-à-dire que seuls des syndicats minoritaires ont approuvé le projet d'accord. Si c'est cette dernière piste qui est retenue, la CFDT est prête à en discuter sous certaines conditions.

Enfin, sur le sujet de la "confiance", Emmanuel Macron et son gouvernement marchent sur des oeufs. En effet, 50% des Français font confiance à l'exécutif pour proposer une réforme qui "profite autant aux salariés qu'aux employeurs", alors que 49% n'ont pas confiance. Deux blocs quasi égaux donc. Il va donc falloir beaucoup de tact et de sens politique au gouvernement s'il veut éviter de se retrouver face à des manifestations similaires à celles que la France a connues il y a un an avec la loi El Khomri.

*Ce sondage a été réalisé auprès d'un échantillon représentatif de la population française de 1.051 personnes (méthode des quotas), interrogées par internet les 23 et 24 mai.