Taxe d'habitation, compétences, dépenses de fonctionnement : Macron face aux revendications des collectivités

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  1058  mots
Taxe d'habitation, dépenses de fonctionnement réduites de 10 milliards d'euros, compétences... Les représentants des collectivités locales vont aborder ces épineux sujets avec Emmanuel Macron lundi 17 juillet dans le cadre de la première conférence nationale des territoires.
La première conférence nationale des territoires promise par Emmanuel Macron se tiendra lundi 17 juillet. L'Etat veut parvenir à un "pacte" avec les collectivités. Mais celles-ci attendent une clarification sur leur financement. La suppression de la taxe d'habitation va ainsi animer les débats.

La première conférence nationale des territoires va se tenir lundi 17 juillet au Sénat. Un rendez-vous important pour Emmanuel Macron qui avait fait de l'organisation de cette conférence une promesse électorale afin de tenter de pacifier et de normaliser les relations entre l'Etat et les territoires, via la conclusion « d'un pacte de responsabilité » destiné à pérenniser le financement des collectivité locales, stabiliser l'organisation territoriale, et préciser les domaines de compétences.

10 milliards d'euros d'économies demandés aux collectivités

Toutes les associations d'élus locaux (bloc communal, départements, régions) attendent de pied ferme cette conférence car elles ont beaucoup à dire et espèrent une clarification dans plusieurs domaines. Il faut dire que les premières décisions d'Emmanuel Macron en matière d'organisation territoriale les inquiètent.

Le président de la République a été très clair, il attend sur la durée du quinquennat des collectivités locales une baisse de 10 milliards d'euros de leurs dépenses de fonctionnement, via notamment la suppression de plusieurs dizaines de milliers de postes de fonctionnaires territoriaux. Il compte aussi sur trois ans supprimer la taxe d'habitation pour 80% des Français, une taxe qu'il jugeait « injuste » durant la campagne électorale. Or, cette suppression représenterait une perte de 10 milliards d'euros pour les communes et les intercommunalités, soit 36% de leurs ressources propres. Certes, le Président de la République s'est engagé à intégralement compenser aux collectivités le manque à gagner mais à l'heure où, au contraire, ces collectivités demandent davantage d'autonomie fiscale, le projet ne passe pas. Enfin, Emmanuel Macron s'est dit prêt à affecté 10 milliards d'euros aux collectivités pour leurs investissements numériques et écologiques. Une enveloppe qui serait prélevé sur le futur plan national d'investissement de 50 milliards d'euros.

Les sujets ne manquent donc pas, surtout si l'on ajoute à cela, la volonté de l'Exécutif de revoir très rapidement - dès la rentrée 2017 même - les rythmes scolaires.... Sans parler de la volonté présidentielle de revoir, une fois encore, l'organisation territoriale, avec son idée du « droit à l'expérimentation », via notamment la fusion entre entités.

Cinq chantiers pour réussir le pacte

Selon un document de travail cité par le quotidien « Le Monde », le gouvernement se donne pour objectif de parvenir à un « pacte de responsabilité » entre l'Etat et les collectivités. Et « cinq champs de travail » seraient ouverts pour « nourrir ce pacte ».

Le premier chantier concernerait « les structures locales », avec la liberté laissée aux créations de communes nouvelles et au regroupement de départements, ce qui correspond au souhait du « droit à l'expérimentation » prôné par Emmanuel Macron.

Le deuxième chantier viserait  l'exercice des compétences avec, là aussi, un droit à expérimentation qui pourrait remettre éventuellement en cause la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités définie par la loi NOTRe.

Un autre chantier serait bien sûr consacré aux finances, qui inclurait les 10 milliards d'euros d'économies demandées mai qui, en échange, garantirait aux collectivités une « discipline sur les normes » et une « révision des politiques publiques nationales et européennes pesant sur les collectivités ». Un quatrième chantier chercherait à trouver « l'alliance des territoires » pour lutter contre les fractures territoriales, notamment entre les métropoles et les territoires ruraux. Enfin, l'Etat serait prêt, on l'a dit, à aider les collectivités dans leur transformation numérique et écologique.

L'épineux problème de la taxe d'habitation...

Du côté des élus locaux, l'heure est à la mobilisation. Les associations d'élus du bloc communal (Association des maires de Frances, France Urbaine, Associations des maires ruraux etc.) ont signé un communiqué commun où " ils saluent la méthode, la démarche initiée par le chef de l'Etat, qui répond aux vœux anciens des associations nationales d'élus locaux". Mais elles estiment que "suite aux premières annonces du gouvernement, plusieurs dossiers majeurs doivent être rapidement traités au fond", telles "les ressources financières et fiscales des collectivités"... Allusion directe à la décision confirmée de suppression de la taxe d'habitation. A cet égard, Gerald Darmanin, ministre des comptes public a annoncé que, dès 2018, « tous les ménages auront un tiers de moins à payer pour la taxe d'habitation 2018 », la réforme tant redoutée par les maires sera réalisée progressivement par tiers jusqu'en 2020.

Les associations d'élus du bloc communal réclament notamment à l'Etat qu'il garantisse « la place de communes fortes et vivantes » et qu'il assure « par un pacte financier pour la durée de la mandature, la stabilité et la prévisibilité des ressources et des charges des communes et intercommunalités ».

... et du RSA

Du côté de l'Assemblée des départements de France (ADF), c'est bien entendu la question du financement des allocations individuelles de solidarité, et notamment du RSA, que son président Dominique Bussereau souhaite aborder en priorité.

Avec la crise, les dépenses de RSA sont en forte hausse, comme celles de l'APA avec le vieillissement de la population, alors que les politiques d'accompagnement des personnes handicapées sont aussi régulièrement renforcées. Le coût du seul RSA a même augmenté de 35 % depuis 2008. Or, sur la même période, les concours financiers de l'Etat sont loin d'avoir compensé la hausse des aides sociales, du fait principalement de la réforme de la taxe professionnelle de 2009 et de la baisse de la dotation globale de fonctionnement. Concrètement, l'Etat ne compense plus que 9 milliards d'euros sur les 17 milliards de dépenses sociales des départements, soit un reste à charge d'environ 8 milliards d'euros, autrement dit plus de 10 % du budget des départements. Et malgré différents fonds d'urgence débloqués par l'Etat, le problème structurel demeure. En 2016, il a même été question avec le gouvernement Valls de « recentraliser » les dépenses du RSA mais les négociations ont échoué. L'ADF compte bien repartir à la charge en 2017....

Une première conférence qui s'annonce animée donc. Une deuxième pourrait suivre à la fin de l'année. De fait, Emmanuel Macron avait évoqué durant la campagne un rendez-vous semestriel avec les collectivités pour notamment suivre l'état d'avancement de la réduction de leurs dépenses de fonctionnement. .