Un budget 2018 majoritairement considéré comme favorable aux "riches"

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  968  mots
Malgré sa tentative d'explication dimanche 17 octobre sur TF1, Emmanuel Macron peine à se démarquer de l'image de "président des riches". L'enquête exclusive BVA-La Tribune montre que la mesure de transformation de l'impôt sur la fortune en impôt sur le patrimoine ne"passe" pas. Et une majorité de Français pensent que le budget 2018 n'aura pas d'impact positif sur leur pouvoir d'achat.
L’enquête exclusive mensuelle BVA La Tribune montre que la suppression de l'ISF, remplacé par un impôt sur la fortune immobilière, n'est soutenue que par 36% des Français. Et ils sont seulement 32% à penser que le budget 2018 aura un impact positif sur leur pouvoir d'achat, même si la suppression de la taxe d'habitation est quasi plébiscitée. Mais les différences de jugement sur la politique menée sont considérables selon les catégories socioprofessionnelles.

Rien n'y fait ! Emmanuel Macron est en passe de se voir durablement coller l'image de « président des riches ». Et son intervention dimanche 15 décembre sur TF1 ne semble pas avoir modifié la donne. C'est, en tout cas, ce que montre l'enquête exclusive mensuelle BVA La Tribune sur les questions économiques consacrée ce mois d'octobre aux « Français et le budget de la France pour l'année 2018 »*. Un sondage qui indique que certaines mesures du projet de loi de finances 2018, actuellement en discussion devant le Parlement, « passent » très mal. La première d'entre elles, bien entendu, est la suppression de L'ISF remplacé par un impôt sur la fortune immobilière (IFI). Une mesure qui a d'ailleurs conduit le quotidien Libération et 120 parlementaires à publier un « appel » au gouvernement à dévoiler l'étude d'impact précise des mesures fiscales et budgétaires sur les contribuables les plus aisés et sur les 100 Français les plus riches... D'ailleurs, l'Observatoire des inégalités vient fort opportunément de dévoiler une étude sur les conséquences des nouvelles mesures fiscales sur les foyers les plus aisés.

Si la réforme de l'ISF ne passe pas, celle de la taxe d'habitation est approuvée

Pour sa part, l'enquête BVA La Tribune montre que la mesure de remplacement de l'ISF par l'IFI n'est soutenue que par une minorité de Français (36%). Si les sympathisants de gauche ne sont que 12% à estimer que la mesure n'est pas si mauvaise (22% des proches du PS et 9% des sympathisants de la France Insoumise), en revanche, sans réelle surprise, cette mesure est davantage soutenue par les proches de la droite (55%) et de La République en marche (LREM) qui sont 61% à l'approuver.

Emmanuel Macron pourra se consoler avec le soutien apporté par les Français à d'autres réformes. Ainsi, la suppression progressive de la taxe d'habitation (TH) pour 80% des ménages va « dans le bon sens » pour 62% des Français. Une mesure qui séduit encore plus à gauche (58%) ainsi que les employés (64%) et les ouvriers (80%). Quoi de plus normal, puisque cette suppression de la TH est destinée à soulager le portefeuille des moins aisés. Simplement, sur trois ans, cette mesure va coûter 10 milliards d'euros à l'Etat... Il faudra bien les trouver, d'une façon ou d'une autre.

La baisse progressive de l'impôt sur les sociétés de 33,3% à 26% est également bien accueillie, 72% des Français estimant que c'est plutôt une bonne chose.

En revanche, là aussi sans réelle surprise, la hausse prévue des taxes sur le carburant ne va dans le bon sens que pour 27% des Français. Et, bien entendu, elle est même considérée comme une mauvaise nouvelle par 78% des personnes vivant au sein de foyers dont les revenus mensuels sont inférieurs à 1.500 euros.

50% des Français estiment que les mesures vont améliorer l'économie

Mais les Français semblent résignés et même faire preuve d'une certaine abnégation. En effet, pour 50% des Français, les différentes mesures prévues dans le budget permettront d'améliorer la situation économique de la France, contre 47% qui ne le pensent pas. Ainsi, les Français reconnaissent une certaine pertinence aux mesures prises par le gouvernement pour relancer l'économie nationale. Mais seuls 28% jugent que ces mêmes mesures vont permettre d'améliorer les conditions de vie des Français.

D'ailleurs, ils ne sont que 32% à croire que, in fine, le nouveau budget aura un impact positif sur leur pouvoir d'achat. Si 65% des sympathisants LREM le pensent, cette idée est nettement minoritaire dans les autres familles politiques. Ainsi, ils ne sont que 18% à le croire à gauche, 32% à droite et 17% au Front National.

Des mesures très clivantes selon la catégorie socioprofessionnelle

Il est également clair que selon la classe sociale à laquelle les Français ont l'impression d'appartenir, l'impact pressenti des mesures sur le pouvoir d'achat sera différent. Ainsi, si seulement 18% des Français se rattachant aux classes populaires estiment que le nouveau budget sera positif pour leur pouvoir d'achat, cette proportion monte à 30% chez les Français des classes moyennes modestes, 39% auprès des Français des classes moyennes supérieures et... 59% chez ceux considérant qu'ils appartiennent aux classes privilégiées.

La politique menée par le gouvernement apparaît donc comme extrêmement clivante, non seulement par « famille politique » mais aussi selon la catégorie socioprofessionnelle.

Ainsi, globalement, au-delà des seules mesures budgétaires, si 46% des Français estiment que la politique menée actuellement est bonne, 49% pensent l'inverse. Mais, dans le détail, les opinions sont nettement plus tranchées. Sans surprise, 86% des sympathisants LREM considèrent que la France est sur le bon chemin. Mais il n'y a plus que 22% des personnes penchant à gauche qui jugent la politique menée « bonne ». Ils ne sont que 10% du côté de la France Insoumise, alors que les proches du PS sont presque une moitié (49%) à avoir ce sentiment.

A droite, 60% estiment que cela va plutôt dans le bon sens, soit 66% des proches du parti Les Républicains et... 21% des proches du FN.

Et, bien entendu, la part des « bonnes opinions » est plus élevée chez les cadres (60%), les retraités (55%) et les personnes vivant au sein de foyers dont les revenus mensuels sont supérieurs à 3.500 euros (53%) que chez les employés (38%), les ouvriers (18%). Et 71% des Français ayant le sentiment d'appartenir aux classes privilégiées jugent la politique menée « bonne », contre 60% de ceux se rattachant aux classes moyennes supérieures, 41% chez ceux des classes moyennes modestes et, enfin, 27% chez ceux des catégories populaires.

* Enquête réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 1.215 personnes du 16 au 17 octobre 2017.