Victoire de Trump : quelles conséquences pour l'économie française ?

Par Fabien Piliu  |   |  988  mots
La France doit-elle redouter l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche ?
La victoire de Donald Trump aura-t-elle un impact négatif sur l'économie française ? Les Etats-Unis sont le deuxième partenaire commercial de la France.

Donald Trump a été clair lors de sa campagne électorale. Pour sauver le made in USA, pour que le "Make America Great Again" devienne une réalité, le nouveau président des Etats-Unis a pris l'engagement de protéger l'économie américaine  par une série de mesures protectionnistes. Dénonçant les dérives du libre-échange, il prévoit par exemple de revoir l'accord commercial qui lie son pays avec le Mexique et le Canada, le NAFTA, considérant que cet accord avait entraîné des destructions d'emplois aux Etats-Unis.

Avec les Etats-Unis, la France et l'Union européenne étaient en pleine négociation sur le traité transatlantique (TAFTA ou TTIP), et les discussions étaient à l'arrêt, ou presque. En toute logique, l'arrivée de Donald Trump devrait briser les rêves de ceux qui souhaitaient la mise en place de ce traité. Ceci étant dit, vu les difficultés des pays de l'Union européenne et du Canada à signer le CETA, un accord commercial entre les deux zones économiques pourtant bien moins libéral que le TAFTA, on peut imaginer que la signature de ce dernier aurait pris beaucoup de temps. Et ce, même si Hillary Clinton était arrivée en tête des élections américaines.

Calmer le jeu

Dans ce contexte, il y a fort à parier que les Etats-Unis ne devraient pas durcir leurs relations commerciales avec les pays qui sont aujourd'hui leurs principaux partenaires commerciaux.

" Si Trump met en œuvre son programme de barrières douanières destinées à contrarier les importations chinoises, les autorités monétaires de ce pays vont immanquablement y répondre en dévaluant leur monnaie qui se déprécie déjà depuis deux ans par rapport à la monnaie américaine. Les autorités chinoises vont donc déprécier leur monnaie dans la proportion des droits de douane qui leur seraient imposés ", avance Bruno Colmant, chef économiste de la Banque Degroof Petercam. " Cette situation n'est bien sûr pas désirable puisque la devise chinoise a besoin d'une stabilité de parité depuis sa reconnaissance au titre de monnaie de réserve par le FMI, au même titre que le dollar américain, la livre sterling, l'euro et le yen. Mais les Chinois n'accepteront jamais de voir leur expansion commerciale freinée par les Etats-Unis dont ils sont d'ailleurs les principaux créanciers ", poursuit l'économiste.

Concrètement, les consommateurs américains sont-ils en mesure de se passer de leur smartphones made in China « dessinés aux Etats-Unis » ? Peuvent-ils à coup de relèvements de tarifs douaniers et de quotas rebâtir une industrie des biens d'équipements et faire l'impasse sur les machines-outils allemandes ? Préféreront-ils les voitures américaines aux voitures étrangères sachant que ces dernières, japonaises en tête, représentent 40% des ventes de la voiture neuve ?

Auront-ils le courage de délester leurs tables de vins rouge français et de son incontournable camembert ?

Trêve de plaisanterie. Il est improbable que les relations commerciales entre les Etats-Unis et la France se dégradent subitement après la victoire de Donald Trump même si celui-ci a déclaré à plusieurs reprises pendant la campagne que " la France n'est plus la France " en raison de sa politique en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme jugée "catastrophique" après les attentats de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray.

L'homme est pragmatique. Son équipe, dont on attend les noms, devrait l'être également et tempérer ses éventuels accès de colère même si des mesures-chocs, symboliques, peuvent être décidées pour "coller" au programme présenté lors de la campagne.

Des liens étroits avec la France

En 2015, les Etats-Unis étaient le deuxième partenaire commercial de la France, derrière l'Allemagne selon les Douanes. Les exportations tricolores vers le pays de l'Oncle Sam se sont élevées à 32,7 milliards d'euros quand celles vers l'Allemagne dépassaient les 71 milliards. Les importations de produits américains atteignant 35 milliards d'euros, la France affiche un déficit bilatéral proche de 2,5 milliards d'euros.

Par ailleurs, il faut rappeler qu'environ 2.500 entreprises françaises sont implantées aux Etats-Unis. Elles y créent des emplois, font de la R&D et participent à la création de richesses outre-Atlantique. Donald Trump prendrait-il le risque absurde de se passer des investisseurs français, et plus globalement des investisseurs étrangers ? En 2015, selon le rapport annuel de Business France, les Etats-Unis étaient les principaux pays d'accueil des investissements étrangers, avec un montant estimé à 384 milliards de dollars. Si tel devait être le cas, quel sort réserverait le gouvernement français aux 1.500 entreprises américaines installées dans l'Hexagone ? Les parcs Disney fermeraient leurs portes ?Toujours selon Business France, les entreprises américaines étaient les principaux investisseurs étrangers en France en 2015, avec 176 projets d'investissements, représentant 10.783 emplois.

Une menace sur le commerce mondial

Si des mesures directes contre les entreprises françaises sont peu à craindre, l'économie tricolore pourrait souffrir des conséquences d'un repli éventuel du dollar qui rognerait la compétitivité-prix du made in France. Pour l'instant, rien n'indique que la Reserve Federale décide de modifier sa politique monétaire et renonce à relever ses taux. La France pourrait aussi d'un isolationnisme commercial américain qui ferait plonger le commerce mondial. Rappelons que les Etats-Unis sont le deuxième exportateur et le premier importateur mondial  selon l'Organisation mondiale du Travail (WTO). Compte tenu de l'expositin de la France au commerce mondial, il y a fort à parier que les dégâts seraient limités.

On le répète, Donald Trump est tout sauf un idéologue. Pragmatique, il devrait tôt ou tard prendre la mesure des conséquences potentielles de ses déclarations enflammées de campagne. Du moins, on l'espère.

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