Argentine : Milei lance un plan de dérégulation massive pour relancer l’économie, 300 normes abrogées

Par latribune.fr  |   |  882  mots
JavierMilei a été élu sur un programme de « tronçonnage » de l'Etat, de dégagisme de la « caste politique » et de thérapie de choc pour redresser l'Argentine où l'inflation dépasse les 160% sur un an et qui compte plus de 40% de pauvres. (Crédits : Reuters)
Le président ultralibéral argentin Javier Milei a annoncé mercredi une dérégulation massive de la troisième économie d'Amérique latine et signé un décret destiné à modifier ou abroger plus de 300 normes dont celles sur les loyers, les privatisations et le droit du travail.

Le « Trump de la Pampa » passe à l'action. Le président ultralibéral argentin Javier Milei a signé un décret d'urgence destiné à modifier ou abroger plus de 300 normes dont celles sur les loyers, les privatisations et le droit du travail. Cet économiste de 53 ans a été élu sur un programme de « tronçonnage » de l'Etat, de dégagisme de la « caste politique » et de thérapie de choc pour redresser le pays où l'inflation dépasse les 160% sur un an et qui compte plus de 40% de pauvres.

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« L'objectif est d'entamer le chemin vers la reconstruction du pays, rendre la liberté et l'autonomie aux individus et commencer à désarmer l'énorme quantité de régulations qui ont retenu, entravé et empêché la croissance économique dans notre pays », a déclaré le nouvel homme fort de la troisième économie d'Amérique latine dans une allocution diffusée à la radio et à la télévision.

Abrogation des loi encadrant les loyers ou bloquant des privatisations

Parmi les mesures annoncées figurent l'abrogation de la loi encadrant les loyers « pour que le marché immobilier recommence à fonctionner sans problème », a expliqué le président, élu en novembre et qui a pris ses fonctions le 10 décembre. Doivent également être abrogées les lois empêchant la privatisation d'entreprises publiques comme la compagnie aérienne Aerolineas Argentinas ou le groupe pétrolier YPF. Les sociétés publiques seront toutes transformées en sociétés anonymes en vue de leur privatisation.

Le chef de l'Etat a aussi annoncé une « modernisation du droit du travail » pour créer plus d'emplois, la modification de la loi sur les sociétés pour que les clubs de football puissent se transformer en sociétés anonymes, et une longue série d'autres mesures de dérégulation dans les secteurs du tourisme, de la santé, d'internet, du transport aérien, de la pharmacie, de la viticulture ou encore du commerce.

« Ce message n'est pas surprenant car il n'y a rien que Milei n'ait pas dit qu'il allait faire pendant la campagne. Mais il est surprenant que la mesure ait été prise de cette manière, avec un décret d'urgence » a commenté auprès de l'AFP la politologue Lara Goyburu. Javier Milei avait annoncé le 12 décembre une première série de mesures, notamment une dévaluation choc de plus de 50% du peso et la réduction des subventions aux transports et à l'énergie. Une dévaluation qui a été saluée par les cambistes, mais la persistance d'un décalage avec le cours informel et l'encadrement de la devise leur laissent un goût d'inachevé. Dans un premier temps, ce réalignement de la devise devrait engendrer davantage d'inflation, la baisse de valeur du peso faisant mécaniquement monter les prix des biens et services dans le pays. Dans un second temps, elle doit stabiliser la monnaie, qui n'avait cessé de déraper ces six dernières années, et contribuer à calmer les prix. Depuis la dévaluation, la devise argentine a ainsi très peu évolué. Elle valait, mardi, 802,62 pesos pour un dollar.

Le président souhaite ramener les dépenses publiques à 5% du Produit intérieur brut (PIB). L'Argentine a été impliquée dans « une série de crises au cours des cent dernières années qui ont toutes la même origine: le déficit budgétaire », a-t-il justifié dans son discours.

Le décret doit être validé par une commission mixte composée de députés et de sénateurs

Le décret a été publié à minuit au journal officiel. Il devra être examiné dans les dix jours par une commission mixte composée de députés et de sénateurs, mais ne sera invalidé que s'il est rejeté par les deux chambres du Parlement, a expliqué à l'AFP l'avocat constitutionnaliste Emiliano Vitaliani.

Une allocution présidentielle accueillie par un concert de casseroles de protestation

Le parti d'extrême droite de Javier Milei, La Libertad Avanza, ne compte que 40 sièges sur 257 à la Chambre basse et seulement sept sièges au Sénat sur 72. Il devra donc chercher des soutiens auprès de la coalition de centre-droit Juntos por el Cambio, partiellement alliée et qui compte 81 députés et 24 sénateurs, et auprès des 26 députés et huit sénateurs indépendants. L'opposition péroniste, elle, compte 105 députés et 33 sénateurs, et la gauche cinq députés.

L'allocution présidentielle a été accueillie par un concert de casseroles de protestation dans plusieurs quartiers de Buenos Aires, et des milliers de personnes sont spontanément descendues dans la rue près du Parlement pour exprimer leur rejet. Des milliers de manifestants avaient auparavant défilé dans la capitale à l'appel des organisations de gauche Polo Obrero et Movimiento Socialista. Il s'agissait de la première manifestation contre le chef de l'Etat depuis son arrivée au pouvoir. Mi-décembre, le gouvernement avait annoncé un « protocole » de lutte contre le « désordre absolu » des manifestations sociales avec blocage de routes, en augmentant le rayon d'action des forces de l'ordre et s'engageant à faire « payer les organisateurs ».

(Avec AFP)