Armes à feu : pourquoi la fusillade d'Orlando ne va rien changer

Par Sarah Belhadi  |   |  659  mots
Les violences par armes à feu sont quasi quotidiennes aux Etats-Unis.
Avec un bilan encore provisoire de 49 morts et 53 blessés, la fusillade de dimanche dans un club gay, à Orlando, est la pire de l'histoire des Etats-Unis. Si l'événement tragique relance encore une fois le débat sur les armes à feu dans le pays, le pouvoir de la NRA, principal lobby pro-armes, avorte toute possibilité de changement. Explications.

"Thanks NRA". Au lendemain du massacre d'Orlando (Floride), le Daily News, l'un des principaux quotidiens américains accuse la National Rifle Association, le plus puissant des lobbies pro-armes à feu des Etats-Unis. Mais cette "Une" choc a un air de déjà vu.

Le 14 décembre 2012, l'Amérique découvre horrifiée Sandy Hook. Dans le Connecticut, à Newtown, un homme âgé de 20 ans ouvre le feu dans une école primaire. En à peine dix minutes, Adam Lanza tue 20 enfants et six adultes avec une arme semi-automatique, le Bushmaster 233. A l'époque, le débat sur l'interdiction des armes semi-automatiques est relancé. Barack Obama, le président, parle de la nécessité de prendre des "mesures significatives". Pourtant, l'émotion laisse place à l'inaction.

Au 14 juin 2016, on recense 138 fusillades de masse depuis le début de l'année

Le site Gun Violence Archive (GVA), créé fin 2012 après le drame de Sandy Hook, recense le nombre d'incidents impliquant des armes à feu aux Etats-Unis. Depuis le début de l'année 2016, on en dénombre 23.506, dont 138 fusillades de masse. Au 14 juin, après le massacre d'Orlando, le site recense 6.030 morts, et 12.347 blessés. Sur la seule journée du 13 juin, le nombre d'incidents (60) a de quoi donner le vertige : un mort à Dallas, au Texas, un autre dans le Tennessee, en Californie, dans l'Illinois. Le décompte n'est qu'une inlassable répétition. En 2014, le site GVA avait comptabilisé 51.739 incidents liés aux armes à feu, qui ont fait 12.562 morts et 23.015 blessés. En octobre 2015, le Wonkblog du Washington Post affirmait que les Etats-Unis comptent désormais plus d'armes à feu civiles que d'habitants, soit 357 millions contre 317.

La fusillade de samedi soir en Floride, dans un club gay relance le débat sur le contrôle des armes à feu aux Etats-Unis. Pendant dix ans -entre 1994 et 2004- un moratoire a pourtant interdit la vente d'armes semi-automatiques. Mais en 2004, le lobby américain (dont la NRA) gagne la partie, et obtient l'aval de l'administration du président Bush pour que ces armes soient de nouveau autorisées. Bref, l'AR-15, l'arme utilisée à Orlando samedi soir par le tireur présumé - et par les assaillants de San Bernardino en décembre - est de nouveau en vente libre. Au même titre que le AK-47, le UZI, etc...

 La NRA, "généreux" donateur

En réalité, il est peu probable que ce nouveau drame change quoique ce soit. Lundi, Josh Earnest, le porte-parole de la Maison-Blanche a déclaré que le président Obama était "frustré, parfois même en colère" à cause de l'inertie du Congrès.

Au cours de ses deux mandats, le président a tenté de réglementer le commerce des armes. Sans succès. Car, la NRA tire les ficelles de la politique américaine, en se montrant particulièrement généreuse.  Depuis 1998, le lobby a distribué, de manière directe, 3.782.803 dollars aux membres du Congrès en fonction, ce montant ne prenant pas en compte les sommes versées aux partis et autres comités de soutien.

Sur les 100 membres du Sénat, 42 ont reçu de l'argent de la NRA. Quant à la Chambre des représentants, ils sont 252 sur 435 membres à recevoir des donations du lobby, rappelle le Washington Post.

Les membres du Congrès de l'état de Floride -où la fusillade a eu lieu samedi soir- ont reçu, par exemple, 170.788 dollars (Source Washington Post et Federal Election Commission and the Center for Responsive Politics).

Dimanche, la candidate démocrate Hillary Clinton à la présidentielle a promis un projet de loi visant à bannir les armes d'assaut. De son côté, Donald Trump, candidat quasi assuré du Parti républicain préfère s'abstenir de condamner l'utilisation des armes. Et pour cause, il sait que le puissant lobby peut lui faire gagner les élections.