Climat : l'objectif de 2°C de réchauffement est atteignable selon l'ONU

Par Giulietta Gamberini  |   |  841  mots
Le rapport de l'Onu "confirme l'importance d'aboutir à Paris lors de la COP21 à un accord qui fixe les règles permettant de revoir périodiquement à la hausse les contributions nationales", a rappelé Laurent Fabius.
L'Onu a publié vendredi son analyse des engagements pris par 146 pays en vue de la COP 21. Tout en se réjouissant du nombre de contributions présentées, elle souligne que des efforts sont encore nécessaires.

Rien n'est encore perdu. Limiter le réchauffement de la planète à 2°C, comme préconisé par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) afin d'éviter le risque d'effets incontrôlables, serait encore possible. C'est l'Organisation des Nations unies (ONU) elle-même qui l'affirme, dans son analyse publiée vendredi 30 octobre des engagements pris par 146 pays à l'approche de la conférence internationale de Paris (COP 21).

"Un effort mondial sans précédent est en cours", se réjouit notamment l'ONU dans son rapport.

 2,7°C vaut mieux que 4°C

Faisant référence à une estimation réalisée par le groupe Carbon action tracker (CAT) le 1er octobre, les Nations unies estiment que les engagements nationaux "ont la capacité de limiter à 2,7°C l'élévation de la température en 2100". Un résultat "beaucoup plus bas que les 4 ou 5 degrés, ou plus, de réchauffement projetés par beaucoup avant les engagements", a commenté Christina Figueres, la secrétaire générale de la Convention-cadre sur le changement climatique de l'ONU dans un communiqué.

"L'un des résultats clés est que les contributions feront baisser la moyenne mondiale des émissions par personne jusqu'à 8% d'ici à 2025 et jusqu'à 9% en 2030", par rapport au niveaux de 1990 et de 2010 respectivement, lit-on également dans le communiqué.

La communauté internationale engagée comme jamais

En plus, les engagements climat annoncés représentent 86% des émissions mondiales, ce qui constitue en soi une avancée par rapport à ce que prévoyait le protocole de Kyoto de 1997, qui n'imposait des réductions qu'aux pays industrialisés.

Le chemin parcouru est aussi significatif par rapport au flop de la conférence de Copenhague de 2009, lorsque la communauté internationale avait échoué à sceller un accord mondial pour lutter contre le réchauffement. Une dynamique que le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius n'a pas manqué de souligner dans un communiqué:

"Au-delà des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les contributions incluent des éléments sur des politiques sectorielles ambitieuses (développement des énergies renouvelables, efficacité énergétique...). Ce processus a permis de véritablement décloisonner la question du climat dans de nombreux pays, notamment en faisant participer la société civile au débat de préparation".

Les contributions non encore présentées pourraient d'ailleurs permettre un ultérieur rapprochement de l'objectif. Sont notamment encore attendues celles de pays producteurs d'hydrocarbures, en particulier de l'Arabie Saoudite, seul pays du G20 qui n'a pas encore rendu sa copie.

D'importants efforts encore nécessaires

Malgré ces notes d'espoir, pas question toutefois de relâcher la pression sur les Etats. "Ce n'est en aucun cas suffisant", car encore synonyme de dérèglements climatiques majeurs", a en effet souligné Christina Figueres. "Des réductions d'émissions de gaz à effet de serre beaucoup plus importantes" seront donc nécessaires dans les prochaines années pour rester sous la limite des 2°C, avertit l'ONU.

Selon les projections de l'ONU, les émissions cumulées atteindraient en effet des niveaux dépassant le scénario à 2°C de 5-13 gigatonnes de CO2 en 2025 et de 11-22 gigatonnes en 2030. Elles devraient notamment atteindre en 2030 75% du "budget carbone" à disposition de l'Humanité depuis 2011 selon le Giec afin d'avoir de bonnes chances de respecter l'objectif des 2°C.

La balle est donc désormais dans le champ des négociateurs de l'accord attendu en décembre: le rapport de l'ONU "confirme l'importance d'aboutir à Paris lors de la COP21 à un accord qui fixe les règles permettant de revoir périodiquement à la hausse les contributions nationales", a rappelé Laurent Fabius.

De premier progrès sont espérés lors de la "Pré-COP", qui réunira du 8 au 10 novembre à Paris près de 80 ministres pour discuter des grands éléments de l'accord.

Les pays du G20 appelés à se mobiliser davantage

Tout en se montrant moins optimistes que l'ONU, nombre d'acteurs institutionnels et d'ONG portent également un regard constructif sur cet ensemble de contributions nationales. Témoin, le communiqué du Projet Miles (Modelling and Informing Low Emission Strategies) coordonné par l'Iddri (l'Institut du développement durable et des relations internationales français, qui, le 22 octobre 2015, se montrait positif:

"Bien que les engagements nationaux à l'approche de l'accord climat Paris semblent insuffisants pour atteindre l'objectif de limitation du réchauffement climatique à 2 degrés, ceux-ci témoignent néanmoins d'une accélération et d'un renforcement  sans précédent  de la volonté des grandes économies mondiales d'agir contre le changement climatique. Soutenus par des mécanismes renforçant et élargissant les engagements politiques, ils peuvent en outre servir de point d'entrée majeur vers une profonde transition bas carbone."

Un petit 1% qui pèsera lourd

La Fondation Nicolas Hulot souligne pour sa part que, pour revenir sur une trajectoire compatible avec les +2°C, l'effort annuel de réduction supplémentaire demandé aux pays du G20 -qui comptent pour 74,6% des émissions mondiales- serait de 1%.

Elle les exhorte à se conduire en modèles, en se portant volontaires pour une révision à la hausse de leurs engagements dès 2017.