L'optimisation fiscale laisse un trou béant dans les comptes des Etats-Unis

Par Nabil Bourassi  |   |  507  mots
Les grandes entreprises américaines ne rapatrient pas leurs bénéfices afin d'éviter de les soumettre à l'impôt. (Crédits : Reuters)
Le manque-à-gagner du fisc américain s'élève à 90 milliards de dollars par an, en raison des pratiques d'optimisation fiscale, D'après Citizens for Tax Justice. Près de 2.000 milliards de dollars de liquidités sont volontairement séquestrés à l'étranger par les grandes entreprises, pour ne pas soumettre ces capitaux à l'impôt. Apple, qui doit publier ce soir ses résultats, économise ainsi 60 milliards de dollars d'impôts..

Faut-il parler du fléau de l'optimisation fiscale ? De plus en plus de gouvernements s'inquiètent d'un phénomène de plus en plus répandu, et les Etats-Unis n'en sont pas exempts. Un rapport de l'organisation Citizens for Tax Justice (CTJ) donne la mesure du phénomène outre-Atlantique. D'après ce rapport, les sociétés américaines hébergeraient près de 2.000 milliards de dollars dans des paradis fiscaux, de l'argent souvent issus de leurs activités à l'étranger mais qu'ils ne rapatrient pas sur le territoire pour éviter de soumettre ces capitaux au fisc américain.

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Emprunter coûte moins cher...

En 2013, Apple avait été jusqu'à lancer un emprunt obligataire de 17 milliards de dollars plutôt que de puiser dans sa trésorerie. Le géant de l'informatique avait calculé que les intérêts sur l'emprunt seraient bien moins onéreux que ce qu'il devrait payer en impôts sur les capitaux rapatriés.

Et du cash, la firme dirigée par Tim Cook en a. Selon CTJ, Apple détient 181,1 milliards de dollars à l'étranger, en hausse de 70 milliards en un an. C'est beaucoup plus que General Electric (119 milliards) et Microsoft. Ainsi, la marque à la pomme n'aurait acquitté en impôts que l'équivalent de 2% de ses bénéfices, soit une économie de 60 milliards de dollars en impôts.

D'après CTJ, les 500 premiers groupes américains ont doublé leurs actifs à l'étranger depuis le début de la crise financière en 2008. Le bilan culmine à 2.100 milliards de dollars. Le manque-à-gagner pour le gouvernement américain s'élève à 90 milliards de dollars par an.

L'Europe déclare la guerre au tax ruling

Aux Etats-Unis comme en Europe, les gouvernements ont décidé de réagir. La Commission européenne a ainsi durci le ton contre les pratiques de tax ruling qui consistent à passer un accord secret avec un Etat afin d'obtenir une ristourne fiscale en échange de l'installation d'un siège ou d'un site sur le territoire (scandale dit du LuxLeaks).

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Aux Etats-Unis, l'administration Obama tente d'imposer une nouvelle taxe de 14% sur les avoirs à l'étranger, repoussée par les Républicains. Le président américain a également fustigé les entreprises américaines qui profitent d'une fusion avec une société étrangère pour délocaliser leur siège vers des cieux fiscaux plus cléments.

Inégalités entre petites et grosses sociétés

Au final, cette pratique créé un véritable fossé entre les grandes entreprises qui ont les moyens de mener ces opérations d'optimisation, et les petites PME dont le taux d'imposition est très supérieur. Les PME ont reversé 32% de leurs bénéfices à l'Etat, contre 26% pour les entreprises du Cac 40. Ainsi, d'après une étude PwC, en France, les entreprises du CAC 40 ont vu leurs impôts augmenter de 1% en 2014 alors que leurs bénéfices ont augmenté de 23%. Les dividendes, eux, étaient 18% plus élevés...