Inquiétude à Taïwan : onze navires chinois rodent autour de l'île depuis 24 heures

Par latribune.fr  |   |  776  mots
Un navire de guerre chinois navigue près d'un destroyer américain dans le détroit de Taïwan (Photo d'illustration). (Crédits : U.S. NAVY)
Cette recrudescence d'activité s'inscrit dans un contexte de tensions entre les deux pays, récemment exacerbées par un incident mortel en mer dont les circonstances sont toujours floues.

D'ordinaire toujours tendues, les relations entre Pékin et Taipei le sont particulièrement ces deux dernières semaines. En témoignent ces onze navires de guerre chinois présents autour de Taïwan en l'espace de vingt-quatre heures (de 06h00 du matin mardi à la même heure ce mercredi heure locale), selon le ministère taïwanais de la Défense. Dans ce laps de temps, quinze avions militaires et un ballon ont également survolé l'île. Et au moins quinze autres avions de guerre chinois supplémentaires ont été détectés depuis, selon la même source.

Ces onze navires en vingt-quatre heures sont en tout cas un record depuis le début de l'année. Habituellement, entre quatre et six navires chinois sont détectés sur une telle fenêtre, selon les données officielles de Taïwan. Mais ce n'est toutefois pas inédit : en décembre, onze navires chinois avaient ainsi été repérés autour de l'île à l'approche des élections présidentielles taïwanaises.

Par ailleurs, lundi, un navire de surveillance maritime chinois et quatre bateaux des garde-côtes chinois ont brièvement pénétré dans des eaux autour de Kinmen, selon Kuan Bi-ling, la ministre en charge des Affaires océaniques de Taïwan.

Enquête après un accident mortel en mer

Cette recrudescence d'activité s'inscrit dans un contexte de tensions exacerbées entre les deux pays depuis un incident mortel en mer survenu le 14 février dernier. Une vedette chinoise avait chaviré près des îles taïwanaises de Kinmen alors qu'elle était poursuivie par les garde-côtes taïwanais, car elle avait, selon eux, pénétré dans des eaux du territoire insulaire qui leur étaient interdites. Les quatre pêcheurs à son bord sont ensuite tombés à l'eau et deux d'entre eux ont péri. Les survivants ont été secourus et interpellés puis amenés à Kinmen avant de revenir en début de semaine dernière en Chine continentale.

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Un des deux rescapés avait assuré à un média d'État chinois que le bateau avait été percuté par le navire des garde-côtes taïwanais. Ce qu'ont confirmé ces derniers en expliquant que c'était toutefois la faute au hors-bord chinois.

« Pendant la poursuite, qui a duré environ une minute ou plus (...), le bateau chinois a zigzagué pour s'éloigner de notre patrouilleur. [Il] a tourné brusquement vers la droite, ce qui a amené sa poupe à heurter l'avant droit de notre patrouilleur... [Il] a perdu l'équilibre et a chaviré », a déclaré aux journalistes Chen Chien-wen, responsable des garde-côtes de Taïwan, jeudi dernier.

Pékin avait la veille accusé les autorités taïwanaises de « chercher à échapper à leurs responsabilités et à cacher la vérité » sur cet incident. Taipei lui a répondu en l'exhortant à lui donner le temps d'enquêter. « Tout le monde devrait attendre patiemment les résultats de l'enquête menée par notre système judiciaire », a déclaré Jan Jyh-horng, porte-parole du Conseil des affaires continentales de Taïwan. « Nous espérons qu'ils (la Chine) respecteront notre système judiciaire », a-t-il ajouté devant des journalistes.

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70 ans de relations moroses

Reste que, ces dernières années, la Chine a accru sa pression militaire et déployé quasi-quotidiennement des avions de combat ainsi que des navires de guerre autour de Taïwan. 103 avions de combat de Pékin avaient ainsi été repérés dans le ciel des alentours en septembre en l'espace de vingt-quatre heures. L'île est également de plus en plus survolée par des ballons chinois.

Les relations Pékin-Taipei sont tendues depuis des dizaines d'années. La Chine estime que Taïwan est l'une de ses provinces, qu'elle n'a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Elle dit espérer une « réunification pacifique » avec les 23 millions d'habitants de l'île, mais n'a jamais refusé d'exclure l'emploi de la force pour y parvenir.

Depuis 2016, une étape de plus a été franchie dans la brouille suite à l'élection de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen, du Parti démocrate progressiste (DPP), favorable à l'indépendance et notamment à des liens culturels plus distendus avec la Chine continentale. Et l'élection en janvier 2024 de son successeur Lai Ching-te, du même parti, a depuis encore davantage tendu les relations bilatérales.

(Avec AFP)