Semi-conducteurs : le géant TSMC va construire une troisième usine aux Etats-Unis... pour un montant colossal

Par latribune.fr  |   |  988  mots
Le géant taïwanais va porter son investissement de 40 à 65 milliards de dollars aux Etats-Unis avec cette troisième usine. (Crédits : Ann Wang)
Des responsables américains ont annoncé ce lundi que le géant taïwanais TSMC allait construire une troisième usine de semi-conducteurs en Arizona (ouest). Au total, l'entreprise va porter à 65 milliards de dollars ses investissements aux Etats-Unis.

La course aux semi-conducteurs bat son plein et les Etats-Unis rattrapent leur retard. TSMC, qui avait déjà prévu deux usines en Arizona, va à la fois produire des composants plus avancés que prévu dans l'un d'elle, et ajouter un troisième site, ont annoncé plusieurs responsables américains ce lundi. L'un d'eux a notamment indiqué que le groupe portait ainsi son investissement de 40 à 65 milliards de dollars.

La première usine de TSMC, qui doit commencer à produire en grandes quantités au premier semestre 2025, livrera des puces gravées en 4 nanomètres (un nanomètre est égal à un milliardième de mètre, ndlr), selon un communiqué du gouvernement américain. La seconde usine fabriquera des composants encore plus avancés, en 3 et 2 nm, tandis que la troisième en produira gravés en 2 nm, voire moins. A titre de comparaison, l'épaisseur d'une feuille de papier est d'environ 100.000 nm.

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Gina Raimondo, ministre du commerce a assuré que TSMC allait créer « au moins 6.000 emplois directs » dans ces usines, « plus de 20.000 emplois » pour la construction et « des dizaines de milliers d'emplois indirects ». Lael Brainard, principale conseillère économique de Joe Biden a précisé, pendant un échange avec la presse, que l'investissement envisagé par TSMC s'appuyait sur un accord préliminaire avec le ministère du Commerce, lié à une grande loi d'investissement dans les technologies, le « Chips and Science Act ». Selon cet accord, l'entreprise taïwanaise recevra jusqu'à 6,6 milliards de dollars de financements directs et pourra bénéficier de 5 milliards supplémentaires sous forme de prêts.

Relocaliser la fabrication de puces

Lael Brainard, a salué ce lundi un « nouveau chapitre dans l'histoire de l'industrie des semi-conducteurs aux Etats-Unis ». « Pour la première fois, nous allons construire en masse les semi-conducteurs les plus sophistiqués du monde aux Etats-Unis », a applaudi Gina Raimondo, ministre du commerce, lors d'une conférence de presse.

Plus concrètement, les Etats-Unis veulent se protéger de futures pénuries de ces puces incontournables dans les téléphones portables, les voitures électriques, ou les équipements militaires de pointe. Et pour cause, ils sont très dépendants de l'Asie pour ces composants. Les Etats-Unis donc vulnérables en cas de crise géopolitique, en particulier dans une région aussi fébrile que celle de Taïwan, île dont la Chine revendique la souveraineté.

Les Etats-Unis « ne produisent aucune des puces les plus sophistiquées, ce qui nous fait courir des risques importants, sur le plan de l'économie et de notre sécurité nationale », a commenté Joe Biden, cité dans un communiqué. « J'étais décidé à changer ça », a-t-il ajouté, en assurant que grâce à ses décisions, « la production et les emplois dans le secteur des semi-conducteurs (faisaient) leur grand retour ».

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Dans cette optique, fin mars, « Le ministère du Commerce est parvenu à un accord préliminaire avec Intel pour lui fournir jusqu'à 8,5 milliards de dollars de financements directs et 11 milliards de dollars de prêts dans le cadre du "Chips and Science Act" », a détaillé la Maison Blanche dans un communiqué. L'enveloppe annoncée ce mercredi participera « à la construction et à l'agrandissement des infrastructures d'Intel en Arizona, dans l'Ohio, au Nouveau-Mexique et dans l'Oregon », a ajouté la Maison Blanche.

De son côté, le géant américain prévoit aussi d'investir. Il devrait ainsi sortir l'équivalent de plus de 100 milliards de dollars, comme l'a expliqué à des journalistes la secrétaire au Commerce, Gina Raimondo, en amont de l'annonce officielle. Selon elle, cela représente l'un des investissements les plus élevés jamais réalisés dans l'industrie des semi-conducteurs aux États-Unis.

Soutenir l'intelligence artificielle

Si le gouvernement américain se montre aussi généreux avec les entreprises de puces, c'est aussi car ces composants miniaturisés à l'extrême « sous-tendent toutes les technologies d'intelligence artificielle », a souligné Gina Raimondo. Les besoins devraient en effet être très importants ces prochaines années. « Nous prévoyons que la demande de semi-conducteurs pour l'IA sera de l'ordre de 150 milliards de dollars d'ici 2030, soit 15% du marché. Mais certains acteurs (notamment AMD) anticipent une demande de l'ordre de 400 milliards de dollars à cet horizon » rappelait à La Tribune Aleksander Peterc, responsable de la recherche actions pour le secteur des matériels technologiques chez Société Générale CIB en février.

Pour TSMC donc, ces investissements en Arizona « nous permettent de mieux soutenir nos clients américains, parmi lesquels plusieurs champions du domaine technologique », Apple par exemple, a commenté Mark Liu, président de TSMC, cité dans un communiqué publié ce lundi.

TSMC s'internationalise

Sous la pression de ses clients, mais aussi de gouvernements préoccupés par une éventuelle invasion future de Taïwan par la Chine, TSMC qui concentre à lui seul plus de la moitié de la production mondiale de semi-conducteurs a commencé à diversifier sa production.

Sous la pression de ses clients - mais aussi des gouvernements -, le taïwanais a inauguré, fin février une méga-usine au Japon - pour un coût équivalent à 8 milliards d'euros -  subventionnée à plus de 40% par le Japon, qui souhaite revitaliser son industrie des semi-conducteurs. En août, le fabricant taïwanais de semi-conducteurs a aussi donné son feu vert pour construire une usine en Allemagne. Un projet d'un montant total de 10 milliards d'euros au sein duquel TSMC détiendra 70%.

De leur côté, les grandes puissances mondiales, dont les Etats-Unis mettent des montants colossaux sur la table pour séduire les producteurs. En septembre, l'Union européenne a par exemple mis 43 milliards d'euros sur la table dans le cadre du « Chips Act » qui vise à doubler la production de puces sur le Vieux continent et atteindre 20% des parts de marché de l'industrie en 2030.

(Avec AFP)