Semi-conducteurs : le gouvernement hollandais signe un très gros chèque pour garder son champion aux Pays-Bas

D'une valeur de 2,5 milliards de dollars, cet investissement d'Etat vise à garder des entreprises néerlandaises stratégiques sur le territoire hollandais. Récemment, le champion des semi-conducteurs ASML, a menacé de se délocaliser face à la politique d'immigration du nouveau gouvernement d'extrême droite des Pays-Bas.
ASML est considérée comme la plus grande entreprise technologique d'Europe.
ASML est considérée comme la plus grande entreprise technologique d'Europe. (Crédits : Reuters)

Pour conserver ses champions technologiques, le gouvernement néerlandais sort le carnet de chèques. Ce jeudi, il a dévoilé un plan d'une valeur de 2,5 milliards d'euros pour maintenir aux Pays-Bas des entreprises de référence, comme l'équipementier ASML. Micky Adriaansens, la ministre des Affaires économiques, a confirmé ce chiffre à la presse.

Le plan, baptisé « Opération Beethoven », vise principalement à empêcher ASML, qui construit des machines pour fabriquer des semi-conducteurs, de s'installer à l'étranger afin d'attirer des talents.

Garder ses champions à Eindhoven, la Silicon Valley hollandaise

Pour ce faire, l'exécutif hollandais va développer la ville et le pôle technologique d'Eindhoven, afin de s'assurer qu'ASML ne délocalise pas ses activités à l'étranger. Les fonds annoncés serviront à investir dans le développement de nouveaux talents, ce qui rendra plus attractif la vie et le travail dans la région, mais répondra également aux préoccupations concernant les insuffisances en matière d'alimentation électrique, a précisé le gouvernement.

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Dans un communiqué, le cabinet du Premier ministre a indiqué avoir également l'intention de prendre des mesures pour alléger la charge fiscale des entreprises, après que nombre d'entre elles ont manifesté leur détresse face à une potentielle délocalisation d'ASML.

« En prenant ces mesures, le cabinet présume qu'ASML continuera à investir et à maintenir son siège statutaire, fiscal et réel aux Pays-Bas », a déclaré le ministère.

La nouvelle politique d'immigration au cœur du problème

Le gouvernement néerlandais actuel est chargé des affaires courantes en attendant la conclusion d'un accord de coalition après les législatives de novembre dernier. Celles-ci ont vu arriver en tête le Parti pour la liberté PVV, du leader d'extrême droite Geert Wilders, qui a promis de réduire drastiquement l'immigration, comme d'autres partis à la table des négociations.

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Une politique aussitôt contestée par la firme ASML, qui avait fait part de ses craintes de ne pouvoir, avec de telles mesures, recourir à la main-d'œuvre étrangère. « Si nous ne pouvons pas amener les gens ici, nous les attirerons ailleurs. C'est très simple », avait rétorqué en janvier dernier le directeur général du groupe, Peter Wennink, lors de la publication de son rapport annuel.

« Nous sommes une entreprise mondiale. Nous irons là où nous devons aller pour nous assurer que l'entreprise peut se développer et servir nos clients », avait-il ajouté.

« Si les Pays-Bas ferment leurs portes et que nous ne pouvons pas accueillir d'immigrés ou d'étudiants étrangers, très bien, mais il faut en accepter les conséquences », avait-il menacé.

D'autres grandes entreprises néerlandaises mécontentes

Une enquête de l'agence de presse Reuters, menée ce mois-ci auprès de grandes entreprises néerlandaises, a révélé que plus d'une douzaine d'entre elles envisageaient de délocaliser leurs activités en dehors des Pays-Bas. Beaucoup se sont plaintes qu'après les élections en novembre dernier, au cours desquelles les partis populistes ont enregistré des gains importants, le parlement a fait passer des politiques sans tenir compte de l'impact à long terme.

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L'énergéticien Shell et le géant de la grande distribution Unilever avaient d'ailleurs transféré leur siège social à Londres, après que le gouvernement néerlandais a été contraint en 2018 de revenir sur sa promesse de supprimer la retenue à la source sur les dividendes.

ASML, champion mondial des puces électroniques

Basée dans la banlieue d'Eindhoven (sud des Pays-Bas), ASML est considérée comme la plus grande entreprise technologique d'Europe. Elle est également la seule entreprise au monde à être capable de produire les machines gravant les circuits intégrés de 3 nanomètres (nm). Sous la pression de Washington et du fait de réglementations néerlandaises dès 2019, la société n'a jamais livré à la Chine ses machines, mais en fournit aux fonderies du géant taïwanais TSMC et du sud-coréen Samsung.

ASML a, en revanche, vendu ses machines de moyenne gamme et issue de la génération précédente, à des clients chinois. Notamment SMIC, fournisseur du géant chinois des télécoms et des smartphones Huawei. Principal fabricant chinois de semi-conducteurs, SMIC, a annoncé ce jeudi un recul de son bénéfice net annuel 2023 de 50% à 902 millions de dollars, sur un chiffre d'affaires en recul de 13% à 6,3 milliards. Pour le champion chinois des semi-conducteurs, il s'agit du premier recul depuis l'imposition en 2020 de sanctions américaines à son encontre, sur fond de rivalité technologique Pékin-Washington.

(Avec agences)

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Commentaires 6
à écrit le 29/03/2024 à 12:50
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C'est bizarre pk la France n'a pas une compagnie comme ASLM.

à écrit le 29/03/2024 à 9:05
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La ficelle est un peu grosse, et tout le monde mord pourtant à l'hameçon. ASML est une société néerlandaise, mais ses 8 plus gros actionnaires sont TOUS américains. Par ailleurs c'est la seule société européenne qui soit leader mondial, en situation ...

à écrit le 29/03/2024 à 7:51
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Ca sent la fin du champion du coup. L'argent publciqui arrose les entreprises européennes aux gros réseaux aura atomisé la compétitivité de celles ci car celles-ci ne cherchent plus que des gens à embaucher aux gros réseaux et non plus les meilleurs....

à écrit le 28/03/2024 à 19:14
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Une subvention déloyale qui sera sous peu dénoncée par les USA prétendus alliés des européons malgré les milliards de subvention déversés dans la silicon valley. En réalité, ASML n'a pas de problème pour attirer des talents au regard des multip...

le 28/03/2024 à 21:03
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"pas de problème pour attirer des talents" si ces talents viennent de l'étranger et que le Gvt en veut aucun (zéro 'migrant', même des Prix Nobel), comment faire ? Déménager. Il n'y a peut-être plus assez de talents néerlandais, stock épuisé.

le 28/03/2024 à 23:29
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@photo73 "Il n'y a peut-être plus assez de talents néerlandais, stock épuisé." Pas assez de "talents" comme dans la silicon valley où les entreprises de la tech exploitent massivement des asiatiques à faible prétention salariale en laissant s...

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