Trump nomme Carl Icahn, partisan de la dérégulation... pour réguler l'économie

Par Grégoire Normand  |   |  783  mots
A 80 ans, la fortune de Carl Icahn est estimée à 16,5 milliards de dollars.
[Portrait] Le financier américain aura la charge de conseiller Trump sur les moyens de "se débarrasser des régulations destructrices d'emplois qui freinent la croissance économique". Après avoir décliné le poste de secrétaire au Trésor, le milliardaire pourrait réserver encore quelques surprises.

La dérégulation revient à la Maison Blanche par la grande porte. Donald Trump a annoncé mercredi 21 décembre qu'il nommait Carl Icahn en tant que conseiller spécial pour l'aider dans une réforme des régulations de l'économie américaine. Le nouveau président ajoute donc un nouveau financier dans son équipe.

>> Lire aussi : Trump nomme un ancien dirigeant de Goldman Sachs au Trésor

Dans un communiqué diffusé par l'équipe présidentielle de transition, il est précisé que M.Icahn aura pour mission de conseiller Trump sur les moyens de "se débarrasser des régulations destructrices d'emplois qui freinent la croissance économique."

Un redoutable investisseur

Carl Icahn est un investisseur connu et redouté des milieux de Wall Street. Il a fabriqué sa notoriété en faisant pression sur les entreprises dans lesquelles il possède des participations (Netflix, Apple ou Herbalife). Ce lobbying intensif a notamment eu pour but d'augmenter les rémunérations des actionnaires. Le Wall-Street Journal le décrit comme une personne qui "a consacré les quatre dernières décennies [...] en tant qu'investisseur activiste, qui a déjà eu une très large influence dans l'équipe de transition de Donald Trump". Il a également joué un rôle central dans la sélection du prochain directeur de la Securities and Exchange Commission (SEC), qui est l'organisme fédéral américain chargé de la réglementation et du contrôle des marchés financiers.

D'après le journal américain, l'octogénaire a également exercé une influence auprès de M.Trump au moment du choix de ses proches conseillers et secrétaires d'Etat pour constituer son équipe gouvernementale. Dernièrement, M.Icahn propriétaire d'une raffinerie de pétrole "a passé des mois à réprimander l'Agence de protection de l'environnement sur une règle qui gênait l'industrie selon ses dires et a conseillé par la suite M.Trump a choisir un candidat pour diriger cette agence." Il a également pesé auprès de Donald Trump au moment de la nomination de Steven Mnuchin au Trésor américain et Wilbur Ross au commerce.

>> Lire aussi : Trump nomme un climatosceptique à l'environnement

Un coup à un milliard

Le financier américain a soutenu  la candidature de Donald Trump dès le lancement de sa campagne lors des primaires républicaines. S'il n'a pas eu de rôle majeur dans la course à la Maison Blanche, l'investisseur a fait parler de lui au moment de l'annonce du scrutin final. En effet, au moment des festivités post-résultats organisées par l'équipe de Trump, M.Icahn qui a fêté ses 80 ans cette année a préféré rentrer chez lui pour acheter des actions américaines d'environ un milliard de dollars comme le relate Le Temps. "J'aurais aimé pouvoir investir davantage mais je n'ai pas réussi à placer davantage qu'environ 1 milliard de dollars lorsque le marché a ouvert. Je suis néanmoins satisfait," a-t-il déclaré dans une interview accordée à Bloomberg. Depuis l'élection de Trump son portefeuille d'actions aurait gagné près de 500 millions de dollars.

Une volte-face inattendue

Même s'il s'est montré comme un soutien indéfectible du magnat de l'immobilier, M.Icahn a pendant longtemps exprimé sa volonté de ne pas jouer de rôle dans l'administration de la Maison Blanche. Pourtant beaucoup d'observateurs le voyaient comme le futur secrétaire au Trésor, mais lui a toujours revendiqué son indépendance. Avec ce poste de conseiller, le Wall-Street Journal rappelle que son poste "n'est pas une fonction officielle de gouvernement et qu'il ne devrait pas être payé pour ça". Par ailleurs, il ne devrait pas abandonner ses activités au sein de sa holding très lucrative qui regroupe des participations dans plusieurs secteurs (énergie, finance, automobile, mines, métaux, immobilier, emballages, alimentaires).

Un investisseur controversé

Avec un portefeuille d'actions américaines estimé à plus de 20 milliards de dollars, la réussite de Carl Icahn est indéniable dans le monde de la finance. Malgré de nombreuses opérations réussies, le New-Yorkais est une figure controversée chez les financiers américains. En effet, Le Temps rappelle qu'il s'est fait "connaître dès les années 1980 par ses prises de contrôle hostiles de diverses entreprises, comme la compagnie aérienne TWA. Pour rembourser son acquisition financée par l'emprunt, il a alors systématiquement revendu l'entreprise par morceaux afin de garder les plus rentables. Une stratégie qui a donné naissance à l'expression de «corporate raider»." La dérégulation financière devrait ainsi figurer à l'agenda de la Maison Blanche malgré les critiques suscitées après la crise de 2008.