Hamon met Macron et Fillon dans le même panier

Par Mathias Thépot  |   |  1096  mots
Benoît Hamon cherche le bon positionnement politique à l'élection présidentielle
Benoît Hamon a présenté son programme ce jeudi 16 mars à la maison de l'Architecture à Paris. Il compte incarner une idée progressiste contrairement à Macron et Fillon qui, selon Hamon, ne feront qu'entretenir la dynamique du Front National.

Difficile pour le candidat Benoît Hamon de mener sereinement sa campagne à l'élection présidentielle. Distancé dans les sondages par Marine Le Pen, François Fillon et Emmanuel Macron, lâché cette semaine par Manuel Valls, qui avait pourtant promis de rallier le vainqueur de la primaire de la "Belle alliance populaire", il n'arrive pas à sortir du lot. Pour ce faire, il a décidé d'affirmer sa candidature comme une alternative aux candidats du bloc de droite, sans mettre l'accent sur les quelques divergences qu'il entretient avec le candidat de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon, dont il est proche politiquement.

Ce jeudi à la maison de l'Architecture pour la présentation définitive de son programme, Benoît Hamon a ainsi identifié trois voies politiques : celle prise par Marine le Pen qui entérinerait le retour « vers un monde que l'on pensait mort », violent et générateur d'insécurité ; celle empruntée par Emmanuel Macron et François Fillon qui perpétuent « les solutions libérales, la dérégulation, qui ont échoué partout où elles ont été mises en œuvre » ; et la sienne, la plus prospective et génératrice de liens entre les générations. En outre, selon Hamon, les suppressions annoncées de 500.000 et 120.000 postes les fonctionnaires respectivement par Fillon et Macron feront le jeu de l'extrême droite dans les prochaines années. « Qui ne voit pas qu'une réduction des services publics favorise le Front national ? », invective le candidat PS. Car ce sont dans les déserts de services publics que le FN récolte ses nouveaux électeurs, estime-t-il. A l'inverse, Benoît Hamon souhaite que son « quinquennat soit utile pour que le Front National sorte des esprits des Français ».

Transition écologique, nouvelle vision du travail

Ensuite, Benoît Hamon a précisé les grands axes de son programme : une nouvelle vision du travail et de la démocratie, les transitions écologique et numérique et le renforcement des services publics. S'il avait déjà en grande partie présenté ses mesures, Benoît Hamon a apporté quelques précisions. Concernant l'écologie, il portera entre autres, « à 50% la part des énergies renouvelables dans le mix électrique en 2025 en favorisant la production décentralisée et citoyenne d'énergie, avec un objectif de 100% en 2050. »

Pour sortir du nucléaire à l'horizon d'une génération - 25 ans -, il promet aussi de fermer les réacteurs en fin de vie durant le quinquennat et de garantir les emplois du secteur énergétique. L'emploi est d'ailleurs un sujet sur lequel le candidat Hamon a beaucoup d'idées originales : il propose « une contribution sociale sur les robots, pour répondre aux mutations du travail, qui alimentera le fonds de transition travail (FFT) dont la mission sera de créer autant d'emplois nouveaux que ceux qui disparaîtront, et de financer la formation des salariés à ces nouveaux métiers. » En revanche, les entreprises dont la robotisation s'accompagne d'une augmentation des effectifs seront dispensées de cette contribution.

Des précisions sur le revenu universel

Le candidat PS a aussi précisé ce jeudi les contours de son revenu universel d'existence. Il devrait permettre, dans une première étape, « d'augmenter automatiquement le revenu des actifs, ouvriers, employés indépendants et étudiants dont les revenus sont inférieurs à 2.200 euros net, et prioritairement ceux dont les moyens sont les plus faibles ». Dans son programme, Hamon détaille trois exemples : celui d'un étudiant qui travaille un jour par semaine et dont le revenu mensuel passera de 231 euros à 749 euros en 2018 grâce au revenu universel première version ; celui d'une assistante maternelle qui perçoit 50% du Smic et dont le revenu passera de 576 euros à 973 euros et enfin celui un couple d'ouvriers dont les revenus passeront de 2.304 euros à 2.694 euros par mois.

Dans un second temps, Hamon réunira une conférence sociale pour programmer les étapes suivantes qui devraient permettre « la généralisation progressive du revenu universel à l'ensemble des Français et son augmentation à 750 euros ». Bref, il s'érige en candidat du pouvoir d'achat des plus modestes et d'une partie des classes moyennes. « Je suis le candidat de la fiche de paie », a d'ailleurs martelé Benoît Hamon. Et pour financer son revenu universel qui coûterait 35 milliards d'euros dans un premier temps, Hamon mise notamment sur les retombées bénéfiques de la hausse de la consommation.

S'inspirer du programme de Montebourg

D'autres précisions ont été faites sur certaines mesures symboliques annoncées durant la primaire de la gauche. Sur le 49.3 citoyen, Hamon a précisé qu'il permettra à 1% du corps électoral de soumettre une loi votée au référendum sous conditions de représentativité (un nombre minimum de personnes dans chaque département ou région) et de participation au scrutin. Hamon soumettra également le vote blanc au référendum, et autorisera le droit de vote des étrangers pour les élections locales. Et sur le terrain des institutions, le candidat PS créera, s'il est élu, une sixième république avec une dose de proportionnelle, sur le modèle des conseils régionaux.

Par ailleurs, de nouvelles mesures sont apparues dans le programme du candidat. Il a notamment fusionné une partie des propositions d'Arnaud Montebourg durant la primaire avec les siennes sur deux points très symboliques : le made in France et la régulation financière. Sur le premier point, Hamon promet s'il est élu que 50 % des marchés publics seront réservés aux petites et moyennes entreprises, sans différentiation de nationalité. Il introduira aussi des clauses sociale, environnementale, d'emploi et de « produire local ». Par ailleurs les entreprises qui délocalisent devront rembourser les aides publiques perçues.

Revenir sur les renoncements de Hollande

Concernant la Finance, Benoît Hamon a suivi Arnaud Montebourg sur deux mesures phare : reprendre la loi de séparation bancaire en cantonnant effectivement l'ensemble des activités de marché des banques, comme Hollande l'avait promis en 2012, et surtaxer les méga profits des banques françaises à hauteur de 5 milliards d'euros sur un total d'environ 23.5 milliards d'euros de profits.

Enfin, Benoît Hamon reviendra, s'il est élu, sur un autre renoncement du quinquennat Hollande : l'encadrement des loyers dans les métropoles et la garantie universelle des loyers pour sécuriser les locataires, comme les propriétaires de logements, deux mesures initialement prévus dans la loi Alur. De quoi certainement satisfaire l'ancienne ministre du Logement Cécile Duflot, présente dans la salle, aux côtés notamment de Jean-Christophe Cambadélis, Jean-Luc Bennahmias, Aurélie Filippetti et Marie-Noëlle Lienemann.