La soirée pharaonique d'Emmanuel Macron

Par Audrey Fisne  |   |  1265  mots
Environ plusieurs milliers de personnes se sont réunies, dimanche 7 mai pour la victoire d'Emmanuel Macron, devant le Louvre.
Plusieurs milliers de personnes se sont réunies, dimanche 7 mai sur l'esplanade du Louvre, pour fêter la victoire d'Emmanuel Macron à la présidentielle. Sympathisants de la première heure et Franciliens simplement opposés à Marine Le Pen ont participé à la soirée pharaonique donnée en l'honneur du nouveau président français. Reportage.

La journée avait commencé en demi-teinte sur l'esplanade du Louvre, puisque, vers 13h, un colis suspect a forcé une évacuation générale du site. Mais vers 19h, lorsque l'accès est enfin ouvert au public, l'épisode est déjàoublié. C'est en ce lieu symbolique, devant la célèbre pyramide, que le candidat d'En Marche! a imaginé sa victoire. Une place "où tous les regards, français, européens, mondiaux sont rivés", dira-t-il plus tard. Alors que les 1.800 journalistes accrédités pour l'occasion ont déjà installé appareils photo, caméras et autres escabeaux pour profiter d'une meilleure vue, les fidèles d'Emmanuel Macron se ruent vers les devants de la scène.

Avec son drapeau français à la main, Didier Curtot est essoufflé d'avoir couru dès l'ouverture des portes. Il est venu d'Annecy avec trois amis. Ensemble, ils font partie du comité de soutien d'En Marche! en Haute-Savoie. Ils ont tenu à venir à Paris, pour clôturer la campagne. Didier est engagé en politique depuis 35 ans.

"Dont 20 ans au PS. Mais je ne m'y reconnaissais plus. J'ai rendu ma carte il y a 5 ans. Je ne savais plus trop où aller. J'ai suivi Emmanuel Macron lorsqu'il était ministre. C'était naturel de le retrouver dans son parti".

Pour le militant de la première heure, il n'y a aucun doute "Macron va gagner ! Ce qui compte maintenant c'est que le FN fasse moins de 40%! Pour que dans 5 ans, le parti ait disparu".

Pas d'effet de surprise du côté des résultats

Les premiers arrivés sont des Macronistes de la première heure. Ils sont venus avec leurs t-shirts floqués, des drapeaux français ou européens et même quelques banderoles. Systématiquement, ils ont écouté ou regardé les médias belges ou suisses pour connaître les premières estimations des résultats. Il n'y a plus de doute sur l'issue de la soirée. L'équipe de campagne ne fait plus semblant non plus. "C'est quand même plié maintenant", sourit Claire Bertrand, bénévole depuis 6 mois au mouvement En Marche! et adhérente depuis 1 an. Le principal message ce soir, est tourné vers l'avenir:

"Aujourd'hui, marque un début et une fin. C'est la fin d'une campagne, mais aussi la première étape des législatives. Si nous n'obtenons pas la majorité à ces prochaines élections, nous aurons fait tout ça pour rien."

À 20h, après un décompte général, c'est bel et bien l'image d'Emmanuel Macron qui s'affiche sur les écrans géants, disposés de chaque côté de la scène, devant la pyramide du Louvre. La musique vrombit tandis que dans le public, on saute, crie et danse. "Macron, président", s'exclament les militants. Les drapeaux français et européens flottent de toute part et, en groupe, on entonne La Marseillaise. Cette fois, c'est officiel, il faut fêter les 65% de voix du candidat élu.

"Bleu, blanc, rouge", chante une petite fille sur les épaules de son père, dans la foule. "Bye bye, Marine", clame un jeune homme qui défile avec un drapeau français. Sur la scène, on annonce que Barack Obama a "transmis un petit cadeau". Le chanteur Cris Cab ouvre ainsi le bal avec une reprise de la chanson de Sting "Englishman in New York". Le rassemblement prend d'un seul coup des airs de concert géant.

En attendant Emmanuel Macron, les militants sont euphoriques. (Crédits photo:AF)

La bataille des législatives commence

Quelques minutes après, c'est dans un silence religieux que les milliers de personnes présentes écoutent les premiers mots d'Emmanuel Macron, diffusés sur les grands écrans.

Dans la salle réservée à la presse, Laurence Haim, ancienne journaliste du groupe canal, désormais membre de l'équipe En Marche! passe juste après le premier discours du nouveau président :

"Je suis vraiment heureuse et émue d'avoir participé à cette campagne. La bataille continue tout de même. Il y a le troisième tour, les législatives."

Équipe de campagne, proches du candidat et militants, partout, c'est le même message. Si l'heure est à la célébration, la bataille doit se poursuivre. Ijjali et Ismail Kenza sont venus avec leur deux fils âgés de 5 et 11 ans. Ils habitent l'Essonne et se sont déplacés à l'esplanade du Louvre pour faire partie "du soulagement". S'ils ont douté lors de cette présidentielle, ce soir, ils poussent un soupir de voir le Front national éliminé.

"Quand je regarde toutes les couleurs ici, ce soir, je me dis que la France est belle quand même".

Ijjaali se rappelle de 2002 et tient à préciser :

"Cette année, toute la famille s'est mobilisée. Mes frères, binationaux, ont voté à Casablanca. Et si, d'habitude, on a tendance à se relâcher pour les législatives, cette fois, on y sera".

Pour la Francilienne, Emmanuel Macron a une lourde responsabilité désormais. Illyes, le fils aîné de la famille l'a déjà compris. "Même si je suis jeune, j'ai lu tous les programmes des candidats. Ça m'intéresse". Ses parents sourient, "il comprend notre soulagement", explique Ijjaali avant que les sympathisants autour entonnent une énième Marseillaise. "Ce soir, en entendant ce chant, j'en ai des frissons".

Un discours rassembleur

Les tubes s'enchaînent sur scène faisant danser la foule. Mais celle-ci ne le cache pas: c'est l'arrivée d'Emmanuel Macron, point d'orgue de la soirée qui est attendue. Il est plus de 22 heures. Le jour s'est couché et le Louvre, cœur de l'événement, est totalement illuminé. Les familles, militants, jeunes et autres couples de personnes âgées ont les yeux rivés sur la scène lorsque le pupitre présidentiel est installé. Sur les écrans, un slogan s'affiche.

"Liberté, égalité, fraternité. Trois mots qui prennent leur source dans une histoire plus vieille encore que la nation. Nous allons leur redonner leur sens".

Quelques minutes plus tard, sous les notes de l'hymne européen, l'Ode à la joie, Emmanuel Macron apparait devant la célèbre pyramide. "Ce soir, la France l'a emportée", s'exclame-t-il.

Son auditoire écoute, applaudit et commente volontiers le discours.

"Il est le président de tous les Français maintenant", souligne un homme à son voisin, lorsqu'il affiche une mine déconfite pendant les remerciements d'Emmanuel Macron, "même aux électeurs du Front national".

Avant de promettre que, dans 5 ans, l'objectif est que plus personne n'ait besoin de voter pour les extrêmes.

"Nous ne céderons rien à la division. Je veux l'unité de notre peuple. J'ai encore besoin de vous", affirme le candidat élu.

Le discours, qui se veut rassembleur, semble toucher l'auditoire. Les proches d'Emmanuel Macron sont accueillis sur la scène par une salve d'applaudissements et, une nouvelle fois, La Marseillaise est chantée en choeur.

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Et alors que le nouveau président s'éclipse de la scène, la musique reprend sur l'esplanade. La majeure partie du public se dirige cependant vers les sorties. Aux alentours du Louvre, les rues sont bondées. Des klaxons retentissent de toute part, les drapeaux virevoltent encore et quelques cris de joie fusent encore, avant de dissiper peu à peu dans Paris.