Brexit : les banques lancent leurs pronostics sur un "no deal"

Par Sasha Mitchell  |   |  577  mots
Selon les calculs de Rabobank, un "hard Brexit" coûterait quelque 400 milliards de livres (18% de croissance du PIB) au Royaume-Uni d'ici à 2030, soit 11.500 livres (12.900 euros) par habitant.
L'incertitude générée par la lenteur des négociations pousse plusieurs banques implantées à Londres à relocaliser leurs activités sur le continent. Certaines, à l'image de Rabobank et de JP Morgan tentent d'imaginer l'issue des négociations ainsi que le coût du Brexit pour l'économie britannique.

Cinq sessions de discussions plus tard, Britanniques et Européens demeurent dans l'impasse. Vendredi, à l'occasion d'une deuxième partie de sommet européen sans le Royaume-Uni, à Bruxelles, les 27 devraient ajourner leur évaluation des progrès réalisés depuis l'ouverture des négociations, en juin. Et repousser l'ouverture de la deuxième phase des discussions, relative à la future relation entre les deux rives de la Manche, que les plus optimistes n'envisagent désormais pas avant décembre. Dans le même temps, le gouvernement britannique assure que le pays se prépare à quitter, s'il le faut, l'Union européenne sans accord.

Face à cette incertitude, plusieurs banques implantées à Londres ont d'ores et déjà annoncé la relocalisation de leurs services sur le continent. Certaines s'essaient d'ailleurs au "jeu" des pronostics, à l'image de JP Morgan. "La possibilité d'un 'no deal' ayant pris une part active du débat politique britannique ces deux dernières semaines, notre confiance (...) a été un peu ébranlée", explique Malcolm Barr, économiste de la banque américaine, dans une note à ses clients citée par l'agence Reuters. Résultat, alors que les négociations portent toujours sur les termes du divorce entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, l'établissement bancaire estime la probabilité d'une absence d'accord à 25%, contre 15% auparavant.

"Trois mécanismes suggèrent cependant des limites à l'hypothèse que le Royaume-Uni emprunterait le chemin du 'no deal', tempère la note, publiée lundi.Tout d'abord les actions des entreprises, dans la manière dont elles anticipent un 'no deal'. Ensuite, la prise de conscience publique des implications d'un 'no deal', au moment où cette possibilité est de plus en plus discutée. Enfin, l'attitude des députés britanniques, étant donné qu'une majorité tend à adopter une approche pragmatique plutôt qu'idéologique face au Brexit."

Pour Rabobank, un "hard Brexit" coûterait 12.900 euros par habitant

De son côté, Rabobank a tenté, dans un rapport, d'anticiper l'impact des différents scénarios sur l'économie britannique. Selon les calculs de l'établissement néerlandais, un "hard Brexit" coûterait quelque 400 milliards de livres (18% de croissance du PIB) au Royaume-Uni d'ici à 2030, soit 11.500 livres (12.900 euros) par habitant. Un handicap dû en partie à des volumes d'exportations en baisse de 30% et à un capital de recherche et développement en diminution de 12%, affirme la banque. Les autres scénarios déboucheraient sur une perte de croissance de 12,5% du PIB (9.500 livres par habitant) dans le cas d'une signature d'accord de libre-échange d'ici au 29 mars 2019 et de 10% du PIB (7.500 livres) dans l'hypothèse d'un "soft Brexit", où le pays quitterait l'union douanière mais resterait dans le marché unique.

Pour l'heure, le gouvernement britannique a totalement exclu la troisième option, qui l'empêcherait de limiter la libre circulation des personnes et donc de réduire l'immigration.

A noter par ailleurs que les conclusions de Rabobank sont beaucoup plus pessimistes que celles rendues par le think tank du Parlement européen, lundi. Après avoir établi une moyenne des résultats d'études menées par plusieurs organismes et institutions, dont l'OCDE qui appelle ce mardi à l'annulation du processus pour "sauver l'économie", le rapport conclut qu'un "soft Brexit" coûterait 33,8 milliard d'euros (1,3% du PIB) au Royaume-Uni d'ici à 2030 contre 108,6 milliards d'euros (4,21% du PIB) en cas de "hard Brexit". Le Trésor britannique, lui, se situe entre les deux. A en croire les estimations communiquées, une sortie sans accord coûterait 193 milliards d'euros (7,5% du PIB) au pays.