Brexit : l'allemand Eurex se place en "alternative européenne" du LSE

La filiale de Deutsche Börse lance un dispositif de partage de bénéfices dans les dérivés de taux pour attirer les acteurs de ce marché, largement dominé par LCH, contrôlé par le London Stock Exchange. De grandes banques, américaines notamment, seraient intéressées. Bruxelles pourrait imposer une relocalisation de la compensation des dérivés libellés en euro après le Brexit.
Delphine Cuny

Pas de cadeau entre ex-fiancés. Deutsche Börse, l'opérateur de la Bourse de Francfort, qui a dû renoncer en mars à son mariage avec le London Stok Exchange (LSE), celui de la Bourse de Londres, lance une offensive frontale dans la compensation - ce rouage essentiel des marchés financiers, qui assure le bon échange technique des actions, obligations et autres produits dérivés, après avoir été négociés en Bourse. Offensive qui a pour cible le grand leader du marché, LCH, contrôlé par le LSE.

La plateforme Eurex Clearing (détenue à 100% par Deutsche Börse depuis le rachat des parts de l'opérateur suisse Six en 2012) annonce ce lundi un "programme de partenariat" destiné à développer "une alternative liquide, implantée dans l'UE, pour la compensation des swaps de taux d'intérêt".

"Cette initiative de marché profitera aux clients et plus largement au marché dans son ensemble en offrant plus de choix, plus de concurrence et plus de transparence sur les prix ainsi qu'une moindre concentration des risques", fait valoir le directeur général d'Eurex Clearing, Eric Müller, dans un communiqué.

L'objectif d'Eurex est de créer un "écosystème équilibré où les responsabilités et les gains sont entièrement alignés entre les participants" : les dix plus actifs bénéficieront d'une partie des profits réalisés sur la compensation des swaps de taux d'intérêt, en fonction du volume d'affaires apporté.

Relocalisation forcée ?

Or les trois quarts des dérivés libellés en euro sont actuellement traités à Londres, à travers le service SwapClear de LCH.Clearnet : de l'ordre de 475 milliards d'euros par jour, pour l'essentiel des dérivés de taux d'intérêt.

De grandes banques, notamment américaines, parmi les principaux intervenants sur le marché européen des swaps de taux, ont d'ores et déjà exprimé leur intérêt selon Eurex, telles que Bank of America Merrill Lynch, Citi, Commerzbank, Deutsche Bank, JP Morgan et Morgan Stanley. Le responsable des dérivés, de la compensation et des collatéraux chez Citigroup, Jerome Kemp, a salué ce programme :

"Nous accueillons favorablement cette initiative de marché qui encourage la diversité de choix, la flexibilité et la transparence pour notre base de clients mondiale", a-t-il déclaré dans le communiqué.

Même discours du côté de JP Morgan, dont le co-responsable du trading de taux estime que "cette initiative apportera un plus grand choix et plus de transparence au marché tout en offrant une plus grande résilience et diversification du risque. Nous considérons que c'est un important développement qui profitera à tous les participants."

Eurex Clearing souligne que sa plateforme traite 180 millions de transactions par mois et qu'elle a passé la barre des 2.000 milliards de swaps de taux en juillet dernier.

Eurex Clearing schéma compensation

[Comment fonctionne la chambre de compensation d'Eurex Clearing ? Crédit : Eurex Clearing]

Son offensive intervient alors que la Commission européenne a menacé d'imposer la relocalisation en Europe de la compensation des dérivés libellés en euro après le Brexit, officiellement pour des questions de risque systémique mais aussi pour des enjeux de souveraineté.

"L'exposition de l'UE aux chambres de compensation de pays tiers sera exacerbée avec la sortie programmée du Royaume-Uni de l'UE en 2019, cela conduira à un basculement du risque hors de l'UE", s'était alarmée la Commission.

Certains professionnels, à l'image de l'organisation des intervenants sur les dérivés (International Swaps and Derivatives Association), s'étaient inquiétés du risque de renchérissement de la compensation que créeraient ces nouvelles dispositions.

Au mois d'août, l'opérateur des Bourses de Paris, d'Amsterdam, de Bruxelles et de Lisbonne, Euronext, qui n'a pu racheter la branche française de LCH au London Stock Exchange après l'échec de la fusion de ce dernier avec Deutsche Börse, avait finalement annoncé le renouvellement de son accord avec LCH pour la compensation des dérivés pour dix ans.

Delphine Cuny

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2017 à 16:53
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Je trouve que vos intervenants sont très prudents dans leurs propos, autant vous titrez que c'est une conséquence du brexit, autant eux parlent d'une augmentation de choix pour leurs clients mais sans jamais parler de la sortie du RU. Il est évid...

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