Brexit : quelle ville va profiter de l’aubaine ?

Par Hugo Baudino  |   |  948  mots
Francfort paraît être la ville la mieux placée pour profiter du Brexit.
Paris, et La Défense en particulier, espère toujours se mêler à la lutte pour récupérer les banquiers de la City. Mais avec des villes comme Francfort et Dublin, la concurrence est rude.

[Article initialement publié le 20 octobre 2016 et mis à jour le 23 juin 2017]

Le 23 juin 2016, une courte majorité de Britanniques décidait de voter en faveur du Brexit. Un an après, La Tribune dresse le bilan de douze mois mouvementés, ponctués par le début officiel des négociations entre le Royaume-Uni et l'UE.

_____________________________

Depuis un an et l'annonce des résultats du référendum britannique, nombreuses sont les villes européennes souhaitant tirer partie d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union en attirant les banquiers de la City londonienne. L'objectif ultime ? Remplacer Londres et devenir la nouvelle place forte financière d'Europe. Parmi les candidats, trois favoris se détachent : Francfort, Dublin et Paris. Revue de détails des points forts et des points faibles de chaque ville.

Paris (La Défense)

Le département des Hauts-de-Seine, dans lequel se trouve le quartier d'affaires de La Défense, a lancé le 17 octobre 2016 une campagne de promotion afin d'attirer les cadres et entreprises britanniques. Si le choix du nom, "Tired of the Fog ? Try the Frogs" ("Fatigué du brouillard ? Essayez les Français", jeu de mots avec le surnom de "mangeurs de grenouilles" qu'on nous donne outre-Manche) pourra laisser perplexe quelques banquiers de la City dans le contexte actuel, la campagne a le mérite de mettre en avant les atouts de la Défense.

  • Points forts

Et cela passe par une série de chiffres. 500 entreprises dont 40% sont étrangères, 3,5 millions de m2 de bureaux et surtout 275.000 m2 disponibles immédiatement, à une valeur locative trois fois moins élevée que celle de Londres. "Aussi regrettable que puisse être la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, nous devons être pragmatiques et faire valoir les forces de notre territoire" : Patrick Devedjian, président du conseil départemental des Hauts-de-Seine assume pleinement sa volonté de surfer sur le Brexit pour booster son quartier d'affaires. Au delà des infrastructures, l'image de la vie à Paris, sa beauté, son art de vivre, sont forcément susceptible de séduire des éventuels expatriés.

  • Points faibles

Le média économique américain Bloomberg ne va pas avec le dos de la cuillère quand il s'agit de lister les potentiels freins à des investisseurs britanniques en France. Pèle-mêle : les 35 heures qui impactent la productivité, les licenciements trop compliqués à effectuer, les taxes trop élevées... Tout y passe. S'il est difficile de mesurer le réel impact des différentes mesures évoquées, cela traduit en tout cas l'image renvoyée par la France en matière de droit du travail.

Une campagne de communication de grande ampleur ne suffira donc pas à convaincre les banquiers de la City. Peut être que l'élection d'Emmanuel Macron, ancien banquier d'affaires, pourrait être un signe rassurant pour eux, mais la concurrence sera féroce. En effet, les autres villes sur le coup ont de solides arguments à faire valoir. Francfort et Dublin seraient les villes les mieux placées selon le média économique américain Bloomberg.

Francfort

La ville allemande est la quatrième place financière d'Europe de l'Ouest, derrière Londres, Zurich et Luxembourg. Elle fait donc logiquement partie des favoris à la succession. Et ses membres semblent plutôt confiants sur ce point. Hubertus Väth, directeur de Frankfurt Main Finance, a lancé une campagne Twitter et un site destiné à vanter les mérites de la ville seulement deux heures après la proclamation du résultat du référendum. "Nous pensons que nous récupérerons la plus grosse partie des emplois de Londres", confie-t-il à Bloomberg. Il va même jusqu'à avancer une prédiction plutôt ambitieuse : 10.000 emplois pourraient être déplacés de Londres vers Francfort dans les cinq prochaines années.

  • Points forts

La cinquième ville la plus peuplée d'Allemagne pourra compter sur quelques atouts solides dans cette entreprise, outre le fait qu'elle est déjà considérée comme un place financière majeure : elle fait partie de la première puissance européenne au niveau économique, et donc de l'Union européenne. Investir dans un pays de l'UE est une perspective qui séduit de plus en plus les investisseurs américains et asiatiques. Francfort serait donc le choix de la sécurité pour les entreprises et les banquiers de la City.

  • Points faibles

Les seuls points négatifs relevés par Bloomberg sont la taille de la ville, trop petite pour un Londonien, et un côté provincial  "un peu ennuyeux"...

Dublin

  • Points forts

Une ville comme Dublin pourrait donc tirer son épingle du jeu. Classée juste derrière Paris au classement européen, elle a le mérite d'être une capitale, d'avoir l'anglais comme langue officielle et d'être proche de Londres géographiquement parlant. L'agglomération y est plus importante qu'à Francfort, avec 1,8 millions d'habitants, tout en restant plus petite que celle de Londres, pouvant ainsi séduire en se plaçant comme un entre-deux raisonnable. De plus, l'Irlande accueille déjà 500 entreprises financières internationales, employant 35.000 personnes. La fiscalité du pays, qui a séduit des géants de l'internet comme Facebook et Google, est un autre pouvoir d'attraction pour la capitale irlandaise. Enfin, la qualité de vie dublinoise et le montant des loyers pour les logements sont deux autres atouts majeurs.

  • Points faibles

En contrepartie, le centre de Dublin ne propose presque plus de locaux professionnels libres, ce qui fait fatalement monter le niveau des loyers. Autre inconvénient pour une société voulant s'y installer : le manque de main d'œuvre avec les compétences nécessaires pour exercer des postes à haute responsabilité.

| DOSSIER : Brexit, un an après le référendum, où en sommes-nous ?