Ce Français lit l’avenir de l’économie américaine mieux que quiconque

Par Marina Torre  |   |  680  mots
Christophe Barraud, 27 ans, a été désigné comme "le meilleur prévisionniste" pour l'économie américaine par Bloomberg.
Christophe Barraud, jeune économiste âgé de 27 ans qui n'a jamais traversé l'Atlantique, a été élu “meilleur prévisionniste“ de l’année pour les Etats-Unis par le magazine Bloomberg. Il a fait ses armes en étudiant les paris sportifs.

Nul n'est prophète en son pays. Mais il peut arriver de le devenir à l'étranger. Le Français Christophe Barraud a été sacré meilleur prévisionniste pour l'économie américaine par le magazine Bloomberg Markets. Au cours des 15 derniers mois, ses estimations sur les indicateurs conjoncturels sont plus souvent tombées justes que celles d'une centaine d'autres d'économistes.

Ce chef économiste chez Market Securities à Paris devance ainsi sur le podium Joshua Shapiro économiste au sein de la compagnie d'information financière Mario Fionrini Ramirez. Il est aussi mieux noté qu'une équipe d'Allemands, Bernd Weidensteiner et Christoph Balz, tous deux économistes chez Commerzbank. Pour la zone euro, c'est un Britannique prévisionniste de JPMorgan qui obtient les meilleurs résultats.

Les "trucs" de l'oracle qui n'avait jamais mis les pieds aux Etats-Unis

Mais pour la conjoncture américaine, Christophe Barraud serait le meilleur. Et ce depuis novembre 2012. Cette année, il a simplement été mis particulièrement en avant par Bloomberg pour la constance de ses bons résultats. Pourtant il n'a "jamais mis un pied aux Etats-Unis", confie-t-il à la Tribune.

Ce nouvel oracle de l'économie, âgé de seulement 27, a commencé par étudier en 2009 dans le détail les statistiques de l'immobilier américain alors qu'il est simple stagiaire. Il tombe pile au "bon" moment, la crise des subprimes lui servant de cas d'école. "J'ai recensé tous les indicateurs, les plus connus et les moins connus", explique-t-il.

Puis, une fois titularisé comme chef économiste, il a élargi son spectre à d'autres indicateurs. Pour se forger une opinion, il scrute également la presse. "Une tempête météo sur une région des Etats-Unis peut avoir des conséquences sur les mises en chantier", tout comme des mouvements sociaux sur le chiffre de l'emploi, rappelle-t-il. Enfin, il étudie de près les prévisions de ses confrères et consœurs, surtout lorsque leurs anticipations sont éloignées du consensus.

Ses premiers pas dans les paris sportifs

Ce docteur en économie qui a donné des cours à Dauphine a également exercé ses talents dans le domaine des paris sportifs. A vingt ans, il a ainsi lancé un site internet spécialisé dans les pronostics. Le principe : évaluer les chances de telle ou telle équipe de football, de rugby, ou bien de joueur de tennis voire de candidats aux élections en comparant les paris sur chacun d'entre eux. Les liens entre marché des paris sportifs et des marchés boursiers sont d'ailleurs l'objet de sa thèse de doctorat

Ces données sont bien sûr très différentes mais, comme pour les prévisions météo "les modèles économétriques" se ressemblent. Entre pronostics sportifs et prévisions économiques, Christophe Barraud opte tout de même pour les dernières car "les enjeux sont bien plus importants" puisque les prévisions y fondent la politique économique.

3% de croissance l'an prochain?

Après cette distinction, sa parole sera plus que jamais écoutée comme l'évangile. Pour cette année, il prédit une croissance de 1.7% outre-Atlantique contre 2,8% l'an dernier après les coupes budgétaires et les hausses de taxes décidées par Washington."Trop d'austérité trop tôt est un problème", estimait-il dans une interview accordée à Bloomberg.

 Pour l'an prochain, il est beaucoup plus optimiste et juge que le PIB pourrait grimper de 3%. Quant à la politique monétaire de la Fed, elle serait durcie dès "décembre ou janvier" selon lui. La plupart des économistes prévoient que la Réserve fédérale américaine commencera à ralentir son programme de rachats d'actifs (quantitative easing) en mars.

L'économiste français pointe pour la Tribune des améliorations sur marché de l'emploi "qui devrait revenir à son niveau d'avant crise en janvier 2014". En outre, si "l'inflation donne des signes de frétillement", et qu'à Washington Républicains et Démocrates se mettent d'accord sur le budget lors d'une prochaine réunion du 13 décembre, la Fed pourrait frapper rapidement. Sinon, il faudra attendre janvier. Réponse dans quelques semaines donc.