Brexit : Londres pourrait « perdre son titre de capitale mondiale de la Fintech »

Par Delphine Cuny  |   |  420  mots
Estonien d'origine et employé de la première heure de Skype, Taavet Hinrikus a cofondé TransferWise à Londres. Il choisirait une autre ville européenne aujourd'hui.
Le patron de l’emblématique startup de la finance TransferWise ne créerait pas sa startup dans la capitale britannique si c’était à refaire, du fait de la perte attendue du « passeport européen » des services financiers.

C'est la grande réussite britannique dans les startups de la finance (Fintech) : TransferWise, une plateforme de virements internationaux à prix cassés, fondée par deux Estoniens, dont un ancien employé de la première heure de Skype. Une des toutes premières « licornes » made in London, ces entreprises non cotées en Bourse et déjà valorisées plus d'un milliard de dollars.

Invité à la grande conférence International Fintech organisée par le gouvernement britannique ce mercredi, aux côtés du Chancelier de l'Echiquier Philip Hammond et du gouverneur de la Banque d'Angleterre Mark Carney qui se réjouissaient de la place incontournable de la capitale dans ce secteur en plein essor, le cofondateur et directeur général de TransferWise, Taavet Hinrikus, a mis les pieds dans le plat :

« Si je devais créer TransferWise aujourd'hui, je ne choisirais sans doute pas Londres, a-t-il déclaré. Il y a beaucoup d'incertitude et l'incertitude n'est pas bonne pour le business. Donc pour démarrer une société de Fintech, Londres n'est plus le meilleur endroit. »

Alors qu'à l'époque ce choix était « une évidence ». En six ans, son entreprise a grandi d'une poignée d'employés à plus de 650, dont une centaine dans le quartier branché de Shoreditch, dans l'est londonien.

Le "passeport européen" sur la sellette

L'entrepreneur, qui n'envisage pas de délocaliser son siège pour l'instant, est sans illusion :

« Nous savons que le passeport européen des services financiers [le droit de proposer dans toute l'Europe ses produits en étant agréé par le seul régulateur du pays d'origine, ndlr] ne fonctionnera plus, donc la bonne chose à faire est d'envisager de s'implanter à Amsterdam ou Berlin ou toute autre ville européenne ».

Taavet Hinrikus a mis en garde sur le risque plus général pour la place :

« Toutes les villes, de Paris, Berlin, à Madrid, en passant par New York, Singapour, Séoul et Sidney, parlent de la façon dont elles vont rafler à Londres le titre de capitale mondiale de la Fintech. Après le Brexit, peut-être que Londres va céder son titre. »

Crédits : Statista.

Il a enjoint le gouvernement britannique de prendre les mesures nécessaires pour que les jeunes entreprises dynamiques du secteur puissent continuer à recruter les talents, y compris étrangers. Message entendu par le ministre des Finances :

« Nous devons continuer à attirer les plus brillants et les meilleurs du monde entier sur nos rives - et nous le ferons », a assuré Philip Hammond devant un parterre d'entrepreneurs et d'investisseurs.