Crédit Agricole veut relancer sa banque en ligne BforBank

Par Delphine Cuny  |   |  633  mots
Sur un créneau résolument haut de gamme, avec le choix entre carte Visa Premier ou Infinite, BforBank affirme proposer "une expérience innovante pour piloter ses finances et prendre en main la gestion de son patrimoine" pour les clients "autonomes, actifs, mobiles." Mais elle semble avoir du mal à trouver son identité et sa cible.
La Banque verte envisage de recapitaliser à hauteur de 120 millions d'euros sa filiale Internet qui ne compte que 180.000 clients, selon Les Echos. Le projet ne passe pas dans les caisses régionales.

Première banque des particuliers en France avec plus de 21 millions de clients, le Crédit Agricole n'a pas semblé investir massivement dans la banque en ligne jusqu'ici. Huit ans après le lancement de BforBank, présentée à l'époque comme une "banque privée en ligne", le groupe mutualiste s'apprête à donner un coup d'accélérateur. La Banque verte prépare une augmentation de capital de 120 millions d'euros dans sa filiale, qui emploie 250 personnes, dans laquelle elle a déjà injecté près de 170 millions d'euros, selon Les Echos.

Sans résultat époustouflant puisque BforBank, restée sur un créneau résolument haut de gamme (la carte Visa est une Premier ou une Infinite), ne revendique que 180.000 clients, quand le leader, Boursorama, filiale de la Société Générale, en a plus de 1,2 million, ING Direct plus de un million, Fortuneo (du Crédit Mutuel Arkéa) dans les 400.000 (en France), Monabanq (Crédit Mutuel CM-11) dans les 250.000.

"Modèle augmenté"

Le projet de recapitalisation passe mal au sein des caisses régionales, qui rechignent à payer leur part de la facture. Le syndicat national de l'entreprise Crédit Agricole (Sneca), affilié CFE-CGC, y est résolument opposé comme il l'explique sur son site : il demande que BforfBank, "qui reste un concurrent", soit rattachée directement à l'entité cotée en Bourse, Crédit Agricole S.A. Le syndicat (deuxième au sein du groupe, derrière la CFDT, au niveau national) rappelle que le retour sur investissement (100 millions d'euros à la création) était prévu dans le business plan "en huit ans, avec un résultat net positif dès 2013."  Deux rallonges de 30 et 40 millions d'euros ont été nécessaires en 2011 et 2014.

La nouvelle augmentation de capital, à laquelle le syndicat a émis un avis défavorable, doit permettre de soutenir le nouveau positionnement de BforBank comme "un modèle augmenté" en complémentarité avec les caisses du Crédit Agricole sur le terrain, en agence.

"A travers un concept pour le moins fumeux, on veut nous faire croire que des synergies seront établies entre BforBank et les caisses régionales", relève le syndicat.

Fintech et néobanques en concurrence

BforBank affirme proposer "une expérience innovante pour piloter ses finances et prendre en main la gestion de son patrimoine" pour les clients "autonomes, actifs, mobiles." Mais elle semble avoir du mal à trouver son identité et sa cible, entre les vraies banques privées qui se mettent au numérique et les banques en ligne plus agressives sur le plan tarifaire.

Outre les taux bas qui compliquent l'équation de la rentabilité des banques en général et en ligne en particulier, le paysage concurrentiel a beaucoup évolué depuis le lancement de BforBank en 2009, avec l'arrivée de startups de la Fintech sur le créneau de la gestion de patrimoine (Grisbee, Yomoni) et de néobanques (N26, Orange Bank). L'ex-patron de BforBank, André Coisne, qui avait auparavant lancé ING Direct en France, est d'ailleurs parti chez Orange Bank l'an dernier; il a été remplacé par Bruno Carles, qui dirigeait les assurances à la personne du Crédit Agricole (Predica).

Le patron de la Société Générale, Frédéric Oudéa, a prévenu qu'il allait "développer à fond Boursorama" en riposte à l'arrivée d'Orange Bank et défendre le leadership de sa filiale (qui vient d'annoncer ce mercredi la nomination du DGA  Benoît Grisoni comme directeur général après le départ de Marie Cheval chez Carrefour).

Visiblement décidé à ne pas rester inactif dans cet univers en profond bouleversement, le Crédit Agricole va d'ailleurs commercialiser une offre à petit prix (2 euros par mois) pour la banque du quotidien, baptisée Eko. Il lui faut ainsi trouver un positionnement complémentaire à BforBank.