Réforme bancaire : des sénateurs durcissent le ton sur les paradis fiscaux et les bonus

Par Christine Lejoux  |   |  583  mots
Le Sénat examinera le projet de loi bancaire du 20 au 21 mars, et peut-être le 22, également. Copyright Reuters
Le Sénat examine à partir du 20 mars le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, adopté par les députés le 19 février. Un amendement du groupe socialiste impose aux banques une plus grande transparence en matière de paradis fiscaux. De son côté, la Commission des affaires économiques défend un amendement relatif à l'introduction du « say on pay », c'est à dire l'approbation des rémunérations des dirigeants en assemblée des actionnaires, dans le secteur bancaire.

Au menu des sénateurs, ces deux, et peut-être trois prochains jours : le projet de séparation et de régulation des activités bancaires. Présenté en conseil des ministres le 19 décembre par Pierre Moscovici, ce texte - qui vise à séparer les activités des banques utiles à l'économie de leurs activités purement spéculatives, afin de mieux protéger les épargnants et les contribuables en cas de faillite bancaire - sera examiné par le Sénat à partir du mercredi 20 mars. Un mois plus tôt, le 19 février, ce projet de réforme bancaire avait été adopté par l'Assemblée nationale, après avoir été quelque peu durci par les députés, en particulier sur le sujet des paradis fiscaux.

Encore plus de transparence en matière de paradis fiscaux

« Il y a eu des avancées incontestables à l'Assemblée nationale, mais nous voulons aller plus loin », a prévenu Jean-Pierre Caffet, vice-président du Groupe socialiste au Sénat, mardi, lors d'une conférence de presse. Dans le collimateur de la Chambre haute du Parlement figurent en bonne place les paradis fiscaux. Certes, l'Assemblée nationale avait adopté, le 19 février, un amendement imposant aux banques de publier, pays par pays, la nature de leurs activités, leur produit net bancaire (chiffre d'affaires) et leurs effectifs. Mais le groupe socialiste exige encore davantage de transparence, puisque la sénatrice Laurence Rossignol présentera un amendement obligeant les banques à dévoiler, Etat par Etat, leurs bénéfices ou leurs pertes avant impôt, le montant total des impôts dont elles sont redevables, ainsi que les subventions publiques reçues.

Limiter les positions des banques sur les marchés des matières premières

Autre point sur lequel le groupe socialiste des finances durcit le ton : la spéculation sur les matières premières agricoles. « Sur ces marchés, nous observons depuis quelques années une hypertrophie des opérations purement financières, par opposition à celles réalisées par des producteurs agricoles pour se couvrir contre le risque de fluctuation des matières premières », indique Jean-Pierre Caffet. Le groupe socialiste défendra donc un amendement permettant à l'AMF (Autorité des marchés financiers) de limiter les positions des banques sur le marché des matières premières agricoles, en leur fixant des quotas d'activité à ne pas dépasser.

Un encadrement plus sévère des rémunérations des dirigeants

Mais c'est sans doute la Commission des affaires économiques du Sénat qui va le plus loin, en proposant d'introduire le « say on pay » dans le secteur bancaire. Ce principe, qui permet à l'assemblée générale des actionnaires d'une entreprise de donner son avis sur la rémunération des dirigeants, n'existe pas en France. Pour le moment, du moins. « Cet amendement représente une forme de sanction pour les dirigeants de banques qui n'auraient pas bien fait leur travail », explique le sénateur Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques. Et de souligner que cet amendement « reprend une préconisation formulée par la Cour des comptes dans son rapport annuel de 2013, constatant que l'encadrement des rémunérations dans le secteur bancaire est insuffisant. » Dans le même esprit, un autre amendement de la Commission des affaires économiques prévoit qu'en cas de faillite d'une banque, les rémunérations variables - les fameux bonus - de ses hauts dirigeants, mandataires sociaux et traders seront suspendues.