Sylvie Goulard, de la Banque de France à la Commission européenne

Par Delphine Cuny  |   |  827  mots
Sylvie Goulard. (Crédits : Charles Platiau)
La sous-gouverneure de la Banque de France, ex-députée européenne, est le choix d'Emmanuel Macron pour porter "le projet européen de la France" au sein de la Commission que présidera Ursula von der Leyen. Si sa nomination est confirmée, un jeu de chaises musicales pourrait s'ensuivre.

[Article mis à jour à 17h]

Son nom circulait depuis plusieurs jours : c'est désormais confirmé ce mercredi 28 août, Sylvie Goulard est la candidate de la France à la Commission européenne, en remplacement de Pierre Moscovici. Emmanuel Macron a tardé à livrer le nom de sa candidate, la date limite étant fixée au 26 août. La future présidente de la Commission, l'Allemande Ursula von der Leyen, doit désormais accepter ou non les noms soumis par les différents Etats membres et attribuer un portefeuille aux candidats retenus dans l'équipe qui entrera en fonctions le 1er novembre prochain.

Seconde sous-gouverneure de la Banque de France depuis janvier 2018, Sylvie Goulard fut une éphémère ministre des Armées du premier gouvernement d'Edouard Philippe, démissionnaire au bout d'un mois en juin 2017, en même temps que deux autres ministres issus du MoDem, en raison de soupçons d'emplois fictifs pesant sur le parti centriste au Parlement européen.

« Je suis très honorée que le Président de la République ait proposé mon nom pour le poste de commissaire européen, en accord avec la Présidente élue Ursula von der Leyen » a déclaré Sylvie Goulard dans un communiqué de presse publié en fin d'après-midi. « La nomination du collège des commissaires est soumise à une procédure comportant notamment un vote d'approbation du Parlement européen, après l'audition de chaque commissaire proposé devant la commission parlementaire compétente. Aussi ai-je demandé au gouverneur  de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, de m'accorder un congé jusqu'à la fin de cette procédure, ce qu'il a accepté. »

Expérience européenne reconnue

Âgée de 53 ans, Sylvie Goulard est licenciée en droit, diplômée de Sciences Po et ancienne élève de l'ENA (promotion 1989 "Liberté Egalité Fraternité"). Elle a consacré une grande partie de sa carrière à l'Europe : après dix ans au Quai d'Orsay, entrecoupés d'un passage au Conseil d'Etat, elle rejoint Bruxelles en 2001 comme conseillère politique du président la Commission de Romano Prodi, puis a enseigné à Science Po Paris, et au Collège d'Europe à Bruges.

En 2009, elle est élue députée au Parlement européen, sur la liste MoDem, et réélue en 2014. Siégeant au sein du groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe (ADLE), elle a été membre titulaire de la commission parlementaire en charge des affaires économiques et monétaires, où elle a exercé les fonctions de coordinateur et porte-parole de son groupe. Elle a été rapporteure ou co-rapporteure de différents textes législatifs portant notamment sur la supervision financière européenne, la réforme du pacte de stabilité et de croissance/de la gouvernance de la zone euro ("six-pack" et "two-pack"), l'union bancaire et les règles de solvabilité des assurances, ainsi que sur l'assiette commune consolidée de l'impôt sur les sociétés.

L'Elysée a souligné son « expérience européenne reconnue » et sa « capacité de jouer un rôle majeur au sein de la Commission  », à un moment jugé crucial pour l'UE. « Elle peut incarner le projet européen de la France » a fait valoir l'entourage du président.

« Si nul ne conteste la maîtrise des dossiers européens par Sylvie Goulard, correspond-elle aux enjeux quand on se souvient qu'elle fut au Parlement européen la thuriféraire du "six-pack", un ensemble de cinq règlements et d'une directive entrés en vigueur le 13 décembre 2011 ? » s'interroge la délégation écologique et sociale du groupe S&D à l'europarlement. « Ce six-pack - que nous avons combattu - est co-responsable de la situation économique dans laquelle nous nous trouvons, car il impose toujours plus d'austérité » affirme-t-elle.

Qui ensuite à la Banque de France ?

A la Banque de France, elle avait notamment porté les sujets européens et les questions de stabilité financière. Elle s'était également saisie de la thématique de verdissement de la finance. Son départ, s'il était confirmé, laisse un poste de choix à la Banque de France. Il pourrait intéresser Benoît Cœuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE) dont le mandat arrive à échéance fin décembre. A moins que d'autres changements n'interviennent : le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, cité parmi les candidats potentiels au remplacement de Guillaume Pépy à la Sncf. Le poste du secrétaire général de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR, adossée à la banque de France), est également à pourvoir avec le départ d'Edouard Fernandez-Bollo au conseil de surveillance prudentielle de la BCE.

Quant à Pierre Moscovici, il est toujours pressenti à la présidence de la Cour des Comptes, son corps d'origine, qu'il s'apprête à rejoindre. Reste à trouver un point de chute pour Didier Migaud, l'actuel premier président rue Cambon, dont le mandat est irrévocable.

(avec agences)