Lanceurs réutilisables, est-ce la bonne stratégie ?

Par Michel Cabirol  |   |  467  mots
La société américaine SpaceX a pris un temps d’avance sur le plan technologique en matière de lanceurs réutilisables. Mais elle doit encore gagner le pari économique. "Lanceurs réutilisables, est-ce la bonne stratégie?" sera l'un des débats du Paris Air Forum (organisé par La Tribune) qui se tiendra le 21 juin auquel participeront Alain Charmeau, président exécutif d'Airbus Safran Launchers, Stéphane Israël, PDG d'Arianespace, et, enfin, Gaele Winters, directeur des lanceurs de l'Agence spatiale européenne (ESA).

Gagnera-t-il son pari? S'il n'a pas encore réussi son pari de réutiliser un lanceur en ne perdant pas d'argent, le patron de SpaceX, Elon Musk a toutefois semé le trouble au sein de la filière. Il faut dire que le milliardaire d'origine sud-africaine, naturalisé américain, a déjà pas mal bouleversé le marché des lancements de satellite jusqu'ici très conservateur.

"Personne n'attendait son arrivée aussi rapidement et ne croyait à une réussite dès la première mission (décembre 2013, ndlr)", plaide-t-on dans les milieux spatiaux. Et plus personne aujourd'hui ne sourit aux projets plus ou moins fous d'Elon Musk, dont celui complètement incroyable d'envoyer des Hommes sur Mars.

L'Europe reste sur un concept plus classique

Car l'enfant terrible de la filière est aujourd'hui incontournable sur le marché des lancements de satellites. Il en est même un des leaders. Son audace a payé. Elon Musk a officiellement lancé depuis plusieurs mois un projet de lanceurs réutilisables, qui est très séduisant. L'Europe a en revanche de son côté décidé de lancer Ariane 6, un lanceur low-cost classique pour répondre à la menace de SpaceX.

D'ailleurs, Airbus Safran Launchers (ASL) vient de finaliser la première phase de conception d'Ariane 6  qui confirme avec succès la maturité du futur lanceur européen dont le premier vol est prévu en 2020. Cette première revue de conception, intitulée "Maturity Gate 5", permet à ASL de confirmer les performances, les délais et les coûts d'exploitation.

Le pari économique pas encore gagné

Un choix murement réfléchi pour l'Europe. Il est vrai que la société américaine doit encore démontrer au marché commercial que le modèle économique des lanceurs réutilisables est viable avec des prix qui restent attractifs. Le pari d'Elon Musk n'est pas encore tout à fait gagné.

Bien sûr SpaceX a réussi en décembre dernier une prouesse technologique en récupérant pour la première fois de l'histoire spatiale le premier étage de son lanceur Falcon 9, qui a atterri en douceur en position verticale. Pourtant dans un tweet du 15 mai, Elon Musk a reconnu que l'un des premiers étages revenu sur Terre était très endommagé. Ce qui en clair laisse entendre que pour le remettre sur un pas de tir, il y a du "boulot"... Beaucoup trop de travail  pour qu'il soit réutilisable sur le plan économique.

"On verra si SpaceX s'améliore au fur et à mesure des récupérations - ce qui est évidemment possible - mais combien de temps cela prendra-t-il, pour quel coût global et avec quelle fiabilité ?", s'interroge un observateur. Des questions auxquelles Elon Musk devra répondre pour réussir complètement son pari et distancer toute la concurrence...