Sous-marins : les 13 campagnes à l'exportation de Naval Group

Le groupe naval français participe à 13 campagnes actives à l'exportation dans le domaine des sous-marins. Naval Group a déjà été sélectionné par l'Inde, l'Indonésie et les Pays-Bas.
Michel Cabirol
Disposer d'une flotte de sous-marins crée pour l'ennemi potentiel une incertitude sur le positionnement de ce système d'armes invisible et capable de protéger de vastes zones.
Disposer d'une flotte de sous-marins crée pour l'ennemi potentiel une incertitude sur le positionnement de ce système d'armes invisible et capable de protéger de vastes zones. (Crédits : Naval Group)

Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Maroc, Égypte, Inde, Indonésie, Philippines, Brésil, Argentine, Pérou, Colombie, Chili... Ce sont 13 campagnes à l'exportation pour Naval Group dans le domaine des sous-marins. Treize campagnes qui sont bien sûr à des stades de maturité très différents et où la concurrence sera très rude dans certains pays comme la Pologne. Mais ce nombre de prospects sérieux est complètement inédit dans l'histoire du groupe naval français, qui a d'ailleurs décidé d'investir dans de nouvelles capacités industrielles dédiées à ces marchés export. Il va construire à Cherbourg deux nouvelles nefs, qui sont des halls consacrés à l'assemblage final de ces sous-marins à propulsion conventionnelle.

Cette bataille à l'exportation illustre également parfaitement les nouveaux enjeux opérationnels des marines dans un espace de plus en plus contesté et  où transitent plus de 80% du commerce mondial en volume et 99% des échanges internet via les câbles sous-marins. Disposer d'une flotte de sous-marins crée pour l'ennemi potentiel une incertitude sur le positionnement de ce système d'armes invisible et capable de protéger de vastes zones. Un sous-marin, qu'il soit nucléaire ou conventionnel, est par excellence une arme de dissuasion. D'où la volonté des États d'investir dans un outil crucial pour défendre leur souveraineté (plateformes pétrolières, richesse halieutique, câbles sous-marins...) et de constituer des flottes sous-marines comme les Philippines ou de les moderniser comme les Pays-Bas.

Trois campagnes remportées par Naval Group

Sur ces 13 campagnes, Naval Group en a déjà remporté trois ou presque (Inde en juillet 2023, Pays-Bas en mars et Indonésie en avril). Ces trois campagnes peuvent encore basculer du mauvais côté... En Inde, qui a sélectionné le Scorpène (trois exemplaires construits par Mazagon Dock à Bombay), le groupe négocie le contrat dont la signature a été repoussée après les élections indiennes (19 avril-1er juin). Il n'est pas à l'abri d'une bonne surprise en 2024 si l'élection de Narendra Modi se confirme. En Indonésie, le ministère de la Défense a également sélectionné Naval Group pour l'achat de deux Scorpène, qui seront construits dans le chantier du groupe local PT PAL. Mais Jakarta attend encore la signature du prêt auprès d'un pool bancaire pour mettre en vigueur cette acquisition (soit 7,5% du montant du contrat). La signature de ce prêt est potentiellement attendue cet été.

Enfin, les Pays-Bas ont choisi l'offre remise le 28 juillet 2023 par le groupe français pour l'acquisition de quatre sous-marins conventionnels Barracuda (3000 tonnes), dont la fabrication de la coque épaisse et l'intégration des bateaux s'effectueront à Cherbourg. Naval Group a prévu un vaste plan de coopération avec l'industrie néerlandaise, qui était une des conditions sine qua non de sa sélection par les Pays-Bas. Pour autant, son rival de toujours, le groupe allemand TKMS (ThyssenKrupp Marine Systems) a déposé un recours suspensif contre la procédure initiée par le gouvernement néerlandais. Par ailleurs, le chantier néerlandais Damen, autre concurrent malheureux, attaque La Haye sur la question très sensible du retour géographique généré par Naval Group. Enfin, le Parlement néerlandais devrait quant à lui se prononcer le 3 juin prochain sur le choix en faveur de Naval Group du gouvernement sortant.

Pour séduire coup sur coup l'Indonésie et les Pays-Bas, Naval Group avait notamment une arme quasi imparable, des batteries lithium-ion récemment développées et qui sont beaucoup plus performantes que les systèmes actuels (AIP) fournis notamment par TKMS, leader mondial de la fabrication des sous-marins conventionnels. Contrairement aux Japonais, les premiers à les utiliser pour leurs sous-marins conventionnels, les Allemands n'ont pas pour le moment développé ce type de batterie. Des batteries qui permettent des missions et des plongées beaucoup plus longues que les AIP.

Amérique du Sud : Naval Group fait feu de tout bois

En Amérique latine où Naval Group a cinq campagnes actives (Brésil, Argentine, Pérou, Colombie et Chili), marche carrément sur les plates-bandes de TKMS. Le groupe naval allemand y est très implanté, notamment en Argentine, au Pérou et en Colombie dont le besoin de renouvellement des flottes est urgent. Pour autant, les campagnes dans ces trois pays devraient être très longues. Buenos Aires, qui vient d'acheter 24 F-16 d'occasion au Danemark avec la bénédiction des Etats-Unis, n'a plus d'argent pour s'offrir trois Scorpène en discussion avec Naval Group et dont l'acquisition semble désormais reportée aux calendes grecques... Au Pérou, le groupe sud-coréen Hyundai Heavy Industries pourrait avoir asséché pour un bon moment les finances du ministère de la Défense péruvien en étant choisi pour moderniser la flotte de surface de la marine.

Au Chili, qui possède déjà deux Scorpène, Naval Group lorgne le remplacement des deux sous-marins Type 209 (Thomson et Simpson). Enfin, le groupe français, qui est actionnaire du chantier naval d'Itaguai au Brésil (41%) ne désespère pas d'apporter de la charge avec des contrats export gagnés dans la région pour ce site en souffrance avec la fin de la construction des Scorpène. Selon nos informations, le chantier procéderait à 200 licenciements. Naval Group continue de discuter pour finaliser un contrat sur le sous-marin à propulsion nucléaire (hors chaufferie, ligne rouge pour la France), en fournissant notamment aux Brésiliens une architecture d'un bateau intégrant une chaufferie et un système de combat. C'est d'ailleurs pour cela que le groupe considère que le Brésil fait partie des campagnes actives.

Foire d'empoigne en Pologne

Tous les chantiers navals se sont donnés rendez-vous en Pologne pour une compétition qui concerne trois sous-marins côtiers (programme Orka) évoluant principalement dans la mer Baltique, peu profonde. Naval Group va devoir affronter une concurrence féroce emmenée par TKMS, l'espagnol Navantia, le suédois Saab, les sud-coréens Hanwha et Hyundaï, qui développent eux-aussi les batteries lithium-ion... Si Varsovie veut armer ses sous-marins d'un missile de croisière (frappe dans la profondeur), Naval Group, aidé par MBDA, pourrait partir avec un atout non négligeable. En Roumanie, le processus pour l'acquisition de deux Scorpène, est dans les mains du Parlement roumain. Mais il semble que cet achat ne soit plus prioritaire par rapport aux F-35A et aux chars américains Abrams.

En Afrique du nord, Naval Group est en campagne en Égypte et au Maroc, qui veut un premier sous-marin dans sa flotte. Le Caire a exprimé en 2022 un intérêt auprès de Paris et de Naval Group pour acquérir quatre à six sous-marins Barracuda à propulsion conventionnelle. Pour l'heure, l'Égypte n'aurait pas les moyens de s'offrir de tels bateaux. Mais pourquoi pas en 2026, explique-t-on à La Tribune. Par ailleurs, les Philippines, qui ne possèdent pas encore de sous-marins, semblent intéressées par l'achat de deux ou trois exemplaires de type océanique. Mais Manille aurait privilégié l'acquisition d'avions de combat et décalé celle des sous-marins. A surveiller également les signaux faibles venant d'Arabie saoudite, du Canada et de Malaisie, qui a déjà acheté deux Scorpène et un Agosta.

Michel Cabirol

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Commentaires 4
à écrit le 08/05/2024 à 11:18
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Bonjour, pour naval group le challenge est de ce développer dans les segments différents de la concurrence... Sous marin de petit taille... (De poche pour les attaque Commando) Sous marin autonome... (Patrouille et attaque coordonnées) La réductio...

à écrit le 02/05/2024 à 6:49
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Bonjour, la france devrait diversiflié sont offres a l'exportation... Les sous marin d'attaque nucléaires classe Rubis devrait etre moderniser est etre proposé au pays européens... ils etait fiable est de petite dimension.. Un atout pour les mer f...

le 02/05/2024 à 10:27
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Nos mers, bien que fermées, sont encore assez grandes pour des sous-marins....de toute dimension. Peut-être dans le lac Léman?

le 02/05/2024 à 20:31
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Beaucoup d'humour, mais certains pays ne souhaitent pas s'équiper de sous marin océanique... Et elle serai sûrement prêt à envisager la propulsion nucléaire... ( Italie, Espagne, pays bas , Pologne) . Bien sûr, ils faut pouvoir être en capacité de...

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