Les drones français Reaper capables désormais de frapper l'ennemi

Par Michel Cabirol  |   |  853  mots
Chaque drone aura la capacité d'emporter quatre bombes guidées laser de 250 kg (GBU-12). (Crédits : Armée de l'air)
L'armée française a réalisé avec succès des tirs d’expérimentation de drones armés depuis la base aérienne de Niamey au Niger, dans le cadre de l’opération Barkhane.

La France est prête. Grâce à une nouvelle capacité, elle est désormais capable de frapper ses ennemis avec des drones américains MALE (Moyenne altitude, longue endurance) Reaper, armés de bombes guidées laser de 250 kg (GBU-12). L'armée française a réalisé avec succès des tirs d'expérimentation de drones armés depuis la base aérienne de Niamey (Niger) dans le cadre de l'opération Barkhane. "Les drones armés amélioreront considérablement la sécurité de nos militaires sur place et renforceront nos moyens face à un ennemi toujours plus fugace", a estimé le ministère des Armées dans un communiqué publié jeudi. Désormais opérationnels, les drones armés, qui sont déployés dans le Sahel, peuvent tirer. Ces tirs dépendront bien sûr du rythme des opérations et du besoin du commandant de l'opération.

"L'arrivée des drones armés sur le théâtre de Barkhane traduit notre engagement constant à construire des armées modernes et efficaces", a assuré le ministère des Armées. Les drones armés permettront également "de raccourcir le délai entre l'identification de l'ennemi, la prise de décision et son éventuelle destruction. Un avantage décisif dans des zones immenses comme le Sahel".

Aujourd'hui, l'Armée de l'air dispose de deux systèmes de drones Reaper (3 drones chacun). L'un d'eux est déployé en permanence au Sahel depuis 2016. Deux systèmes Reaper supplémentaires seront livrés en deux temps à compter de début 2020. Chaque drone aura la capacité d'emporter quatre bombes guidées laser de 250 kg, des GBU-12 déjà employées par les avions de chasse. Les dernières livraisons de drones Reaper (standard Block 5) disposeront dès la fin 2020 d'une capacité d'armement complète : bombes GBU-12, mais aussi missiles air-sol Hellfire (fin 2020) et bombes GBU-49 (en 2021).

Une décision de Florence Parly

En septembre 2017, la ministre des Armées Florence Parly avait décidé d'armer lors de son discours de clôture de l'université d'été de la défense, les drones de renseignement et de surveillance, les Reaper de l'armée de l'air. "Les drones armés permettront d'allier en permanence la surveillance, l'endurance dans la discrétion et la capacité de frappe, au moment le plus opportun. Ainsi, nous gagnons en efficacité et nous limitons le risque de dégâts collatéraux", avait-elle expliqué. Deux ans après sa décision, les Reaper sont enfin armés dans le cadre des orientations fixées par le Président de la République.

"En plus de la pression permanente exercée sur l'ennemi, les drones armés présentent plusieurs avantages, notamment leur discrétion, leur endurance et la capacité offerte à nos forces de réagir et décider avec plus de rapidité et d'efficacité", a expliqué le ministère des Armées.

Au-delà des missions traditionnelles de surveillance et de renseignement des Reaper, elles pourront être étendues aux frappes "dans le respect des règles d'engagement, si l'opportunité se présente : la pression sur les groupes terroristes armés n'en sera que plus grande". "La réduction de la boucle des missions de frappe permettra d'obtenir une plus grande efficacité dans le cas de cibles susceptibles de se dissimuler rapidement ou de se déplacer vers des zones densément peuplées", avaient estimé en mai 2017 les auteurs du rapport sénatorial Cédric Perrin et Gilbert Roger, "Drones d'observation et drones armées : un enjeu de souveraineté".

Comment ces drones seront-ils utilisés?

En 2017, la ministre des Armées avait souhaité désamorcer les débats éthiques sur l'utilisation des drones armés. "Je veux par avance réfuter de possibles amalgames et dissiper d'éventuelles craintes. Non, un drone armé n'est pas un robot tueur. Ce sont deux systèmes qui n'ont rien de semblable", avait-elle expliqué. Le ministère a donc rappelé que "l'homme est au centre. Il le restera. C'est lui qui décide. Que ce soit lors du travail de surveillance, de caractérisation des cibles et surtout de la prise de décision d'engagement. Le choix de la France est clair : la décision de tir d'un drone armé doit relever d'une décision humaine". La connexion permanente au processus décisionnel (C2 : command and control) de l'opération (qui relève du commandant de l'opération), renforce la perception en vue de la bonne décision, a précisé le ministère.

Par ailleurs, les drones seront pilotés par des personnels déployés sur le théâtre d'opérations extérieures. Au-delà du fait que les opérateurs seront toujours impliqués (choix de la cible, moment et façon de délivrer l'armement, guidage de l'arme), ils sont ainsi imbriqués, dès la préparation de la mission et jusqu'à son débriefing, avec les forces avec lesquelles ils agissent lors de la mission. Les conditions d'emploi des drones armés respecteront évidemment le principe de proportionnalité énoncé dans le droit international humanitaire (principes de distinction, nécessité, proportionnalité, précaution et humanité).