Dongfeng, le nouvel allié de PSA, est un puissant groupe public chinois... très ambitieux

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  664  mots
Un modèle chinois de Dongfeng
Le constructeur public chinois vient à la rescousse d'un groupe occidental en crise. Du jamais vu. Une belle revanche pour l'industrie automobile de l'ex-Empire du milieu. Dongfeng a des ambitions très fortes...

Un étrange partenaire pour PSA. Dongfeng, qui va prendre 14% du constructeur automobile français - une première historique si l'on exclut le rachat de Volvo Cars par Geely! - est un groupe public chinois créé à la fin des années 60 pour fournir les camions de l'armée chinoise... D'ailleurs, c'est pour répondre à la paranoïa de la Chine de Mao que le groupe s'est installé au centre de l'ex-Empire du milieu, à Wuhan, un endroit jugé stratégique et défendable en cas de guerre mondiale! Cela explique que PSA se soit installé si loin de la côte lorsqu'il a établi sa co-entreprise dans le pays avec Dongfeng, au début des années 90. 

Très liée à l'Etat chinois, l'entreprise n'est nullement une société comme les autres. C'est en tous cas le deuxième groupe automobile chinois, derrière SAIC (allié de GM et Volkswagen en Chine) et devant FAW ou Changan, avec 3,5 millions de véhicules vendus en 2013 (+ 14,8 %), dépassant ainsi son objectif de 3,32 millions d'unités. Sur le seul mois de décembre, le constructeur avait écoulé 359.600 véhicules (+ 30%).

3,8 millions de véhicules en 2014?

Mondialement, le groupe s'affiche au  dix-septième rang, hors ses co-entreprises avec des étrangers, selon le CCFA (Comité des constructeurs français d'automobiles). Dongfeng se fixe pour objectif de vendre 3,8 millions de véhicules en 2014, 4,5 millions en 2015, en comptant les véhicules co-produits avec les groupes étrangers. La seule marque Dongfeng Auto espère vendre toutefois 3 millions de véhicules d'ici à 2016. En 2013, cette marque avait contribué aux ventes du groupe chinois à hauteur de 1,27 million d'unités.

Le consortium chinois détient environ 12% de part de marché pour les voitures particulières, 12,5% pour les véhicules commerciaux, selon les chiffres fournis par PSA. C'est le numéro un pour les véhicules utilitaires moyens et lourds. Groupe coté à Hong Kong, avec une capitalisation boursière d'environ 9,5 milliards d'euros, Dongfeng affiche un chiffre d'affaires de 17,3 milliards d'euros et  un résultat opérationnel de 1,9 milliard d'euros (en 2013).  

Très lié à Nissan

Le groupe a surtout des accords de co-entreprise en Chine avec Nissan. Les ventes avec le constructeur japonais sont deux fois plus importantes que celles de DPCA, l'entreprise commune avec PSA. Dongfeng fabrique aussi des véhicules avec Honda, le coréen Kia, le taiwanais Yulon, le suédois Volvo Trucks. Lié à PSA, il vient de parapher la création d'une entreprise commune avec... Renault. C'est donc un groupe multi-cartes. Il est aussi lié à plusieurs équipementiers, comme le mécanicien allemand Getrag.

L'alliance stratégique entre PSA et Dongfeng, officialisée ce mercredi,  prévoit certes un volet financier crucial, qui va permettre à PSA en mal d'argent frais d'avoir les moyens de financer ses projets. mais l'accord se double d'un volet industriel et commercial, avec des synergies industrielles avec le groupe chinois pour environ 400 millions d'euros par an (pour le seul PSA) à l'horizon 2020. Une plate-forme à bas coûts pour des véhicules destinés aux pays émergents est à l'étude.

De grands projets

Sur la seule Chine, PSA prévoir de tripler les ventes de DPCA, sa co-entreprise, à 1,5 million d'unités en 2020. Le lancement de deux à trois modèles par an pour l'ensemble des trois marques (Peugeot, Citroën et la marque propre de DPCA) est prévu. Les accords prévoient aussi la création d'un centre de recherche et développement  commun, dédié au développement des produits et technologies pour les marchés à forte croissance, dont la Chine.

Dongfeng va pouvoir accéder directement à la technologie d'un grand groupe automobile étranger. Ce ne sera plus un partenaire  en Chine permettant juste aux groupes étrangers de s'implanter sur place. Cette fois, c'est un constructeur occidental qui appelle à la rescousse un chinois et l'invite à pendre une participation en son sein. Un renversement de situation et une belle revanche pour l'ex-Empire du milieu, qui a dû faire appel jusqu'ici aux constructeurs européens, américains, japonais, coréens, pour se forger une industrie automobile!