Fiat Chrysler vise une croissance ambitieuse... ou irréaliste ?

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  514  mots
ALfa Romeo veut renouer avec les grands scuccès des années 60, comme la Giulia
Multiplier par six les ventes d'Alfa Romeo en cinq ans, plus que doubler celles de Jeep, accroître de 50% les scores de Fiat... Le grand plan stratégique de Fiat Chrysler est osé. Ou carrément délirant?

Sergio Marchionne n'a pas perdu son enthousiasme et l'habitude de ses grands plans stratégiques, dont les objectifs paraissent parfois fantaisistes aux experts! Le patron de Fiat Chrysler a annoncé mardi un investissement de cinq milliards d'euros d'ici à 2018 pour sa marque emblématique Alfa Romeo en déshérence, censée lui permettre de lancer huit nouveaux modèles.

Selon le dernier plan stratégique présenté - tout un symbole - à Auburn Hills, dans le Michigan, et non à Turin, le label au blason des Visconti doit produire notamment deux nouveaux 4x4 et quatre voitures de haut de gamme et de gamme moyenne supérieure, sur une plate-forme à propulsion, comme les BMW ou Mercedes. Une partie de la production de moteurs sera effectuée en Italie, précise Fiat dans son plan 2013-2018. L'assemblage final devrait avoir lieu dans la péninsule.

Multiplier les scores par six!

La production du premier nouveau modèle doit démarrer au deuxième trimestre 2015 et le reste suivra entre 2016 et 2018, précise le groupe, qui vise maintenant... 400.000 Alfa Romeo par an à partir de 2018... Soit une multiplication par six des scores actuels ! Rude gageure, alors que cette marque a écoulé 74.000 véhicules à peine l'an dernier, redégringolant à ses scores de la fin des années 60! Une descente aux enfers, qui rend très difficile une relance aussi spectaculaire que celle que prévoit le consortium italo-américain. Et ce, alors que la concurrence allemande est solidement installée, sans parler de le progression des labels de luxe japonais! Quand on voit la prudence des prévisions de Volkswagen ou Toyota, pourtant deux poids-lourds de l'automobile à succès, les chiffres mirifiques de Fiat Chrysler laissent pantois...

Ce n'est pas fini. Pas avare en visions "osées", Sergio Marchionne, qui a indiqué mardi qu'il resterait à la tête du groupe au moins jusqu'en 2018,  veut par ailleurs que Jeep, spécialiste des 4x4 du groupe Fiat Chrysler, atteigne1,9 million d'unités en 2018, soit plus qu'un doublement! Cette marque américaine, qui avait été relancée par les ingénieurs de Renault dans les années 80 avant que le label ne soit cédé à Chrysler,  a écoulé l'an passé 731.565 unités (2.317 seulement en France!).

Fiat aussi doit rebondir

Certes, c'était un record, mais de là à friser les 2 millions en à peine cinq ans!... D'autant que Jeep écoule ses véhicules à près de 70% sur son seul marché national.  Puisqu'on est dans les grands plans, Sergio Marchionne, 61 ans, n'oublie pas la marque Fiat elle-même, très mal en point en Europe. Celle-ci devrait carrément passer de 1,3 à 1,9 millions de ventes annuelles en cinq ans...

Ce plan très attendu intervient quelques mois après la fusion entre l'américain Chrysler et l'italien Fiat. La firme piémontaise a racheté progressivement le constructeur d'Auburn Hills en quasi-banqueroute en 2009. Parallèlement à l'annonce du plan, le constructeur italo-américain a publié des comptes en déficit. Il a essuyé une perte nette de 319 millions d'euros au premier trimestre, en raison d'une charge exceptionnelle. Le chiffre d'affaires au premier trimestre 2014 a progressé toutefois de 12,3% à 22,12 milliards d'euros.