Londres veut retrouver son salon automobile, symbole d'une industrie renaissante

Par Nabil Bourassi  |   |  696  mots
Le Jaguar F-Pace sera commercialisé en 2016. C'est le premier crossover de la marque britannique qui espère ainsi étendre son catalogue en plein boom en Europe.
L'industrie automobile britannique ne connait pas la crise, et ambitionne de détrôner la France de la deuxième place européenne. Les investissements sont légions et les marques britanniques retrouvent leurs places après des décennies de déclin.

Des usines flambantes neuves, des investissements massifs, des embauches, des nouveaux modèles... L'industrie automobile britannique a marqué ces dernières années une étonnante renaissance, à contre-courant d'une Europe stagnante ou en partie sinistrée.

Aujourd'hui, signe de son retour sur la scène internationale, le pays veut ouvrir un salon international souvent vu comme une véritable vitrine industrielle. Certes, il existait un salon au pays d'Albion jusqu'en 2008. Ou, du moins, ce qu'il en restait. Pour les constructeurs, le royaume n'offrait plus l'attrait d'antan. Ses marques les plus emblématiques avaient perdu de leur superbe... La production n'était plus ni efficiente ni qualitative... Bref. Il y a peu encore, l'industrie automobile britannique semblait condamnée à une inéluctable paupérisation...

Le diktat du haut-de-gamme allemand

Contre toute attente, c'est la crise des subprimes qui va assurer le salut des dernières marques les plus symboliques de l'automobile britannique. Aux États-Unis, General Motors et Ford, aux abois, sont contraints de fermer des marques et des dizaines d'usines. Le second va décider de se séparer de ses deux marques anglaises Land Rover et Jaguar. Deux marques en panne d'inspiration stylistique, errant sans certitudes entre les codes haut-de-gamme imposés et trustés par le triptyque allemand (BMW, Audi, Mercedes). Mais ces deux marques ont surtout souffert d'un manque d'investissement.

C'est un groupe indien qui redonnera sa chance à ces deux marques. Le groupe Tata va ainsi racheter Land Rover et Jaguar en 2008 pour 2,3 milliards de dollars, accompagné de milliards de dollars d'investissements pour moderniser les usines, et lancer de nouveaux modèles. Entre 2011 et 2016, la seule marque Jaguar a lancé un programme de 5,5 milliards d'euros d'investissement. Et le succès est au rendez-vous. Les deux marques ont complètement renouvelé leurs gammes. Ils ont réussi à retrouver leur place dans le concert des marques haut-de-gamme sans rien céder aux codes stylistiques austères des marques allemandes. Les chiffres de vente se sont envolés... Ce n'est pas terminé. Jaguar vient de présenter son premier SUV, un segment en pleine explosion en Europe. Une usine de moteurs vient d'ouvrir en Angleterre, et un site est en cours de production au Brésil.

Un marché domestique en pleine forme

Cette renaissance a sans nul doute redoré le blason de l'industrie automobile britannique, mais cela ne suffit pas à expliquer les impressionnants volumes de production d'un pays où on continue à rouler à gauche... Il y a d'abord le marché domestique britannique particulièrement en forme. En 2014, les ventes ont bondi de 9,3% dans l'archipel avec 2,4 millions de véhicules, soit 700.000 immatriculations de plus qu'en France. Jamais le marché britannique n'avait fait aussi bien en 10 ans. Les constructeurs profitent également d'une main d'œuvre bon marché et de subventions gouvernementales généreuses.

Les planètes sont alors alignées pour inciter les constructeurs à investir sur place. Mini, filiale de BMW, a annoncé un milliard d'euros pour augmenter ses capacités. Nissan qui possède la plus grande usine du pays près de New Castle n'a cessé d'investir pour porter la production de cette usine qui produit le Qashqaï. Il a encore récemment investi 250 millions d'euros pour accueillir sa filiale de luxe Infiniti. Toyota a repris les embauches après avoir gelé en 2009 la production en pleine crise.

En  2012, General Motors avait surpris tout le monde en annonçant que c'est son usine de Ellesmere Port, près de Liverpool, qui produirait la nouvelle Astra moyennant 155 millions d'euros d'investissement et 700 créations de postes. Le groupe américain l'avait alors préféré à son site allemand. Une nouvelle d'autant plus surprenante que cette usine était condamnée à la fermeture en 2014...

La France bientôt distancée?

L'industrie automobile britannique autrefois moribonde ne cesse donc de reprendre de la force, au point de menacer la place de l'industrie française. La production automobile est passée de 1,1 million d'unités en 2009 à 1,6 en 2013 et devrait atteindre les 2 millions en 2017 d'après les chiffres de l'OICA (Organisation internationale des constructeurs). La production tricolore, elle, devrait se faire distancer, plafonnant à 1,7 millions d'unités. Dernier chiffre qui fait pâlir d'envie le gouvernement français, l'industrie automobile outre Manche a créé 44.000 emplois en 2013.