Automobile : à rebours de Bruxelles, l'Italie compte ouvrir son marché aux constructeurs chinois

Par latribune.fr  |   |  882  mots
L'Italie compte étudier « attentivement » une éventuelle entrée de groupes chinois dans son industrie automobile (photo d'illustration). (Crédits : AdobeStock/PiyawatNandeenoparit)
L'Italie serait en discussion avec des constructeurs chinois, dont BYD, pour leur ouvrir son industrie automobile, tout en posant certaines conditions. Une annonce qui intervient alors que l'Union européenne tente de se protéger face à l'arrivée de la concurrence chinoise.

C'est un scénario pour le moins étonnant. L'Italie compte étudier « attentivement » une éventuelle entrée de groupes chinois dans son industrie automobile alors que l'Union européenne prête une oreille attentive à l'arrivée des constructeurs chinois sur le marché européen.

« Les collaborations doivent être attentivement évaluées, puis nous devons faire attention à la concurrence déloyale », a expliqué jeudi le vice-Premier ministre, Antonio Tajani, en marge d'une conférence à Rome.

« Nous devons faire attention à ce qu'il y ait toujours une réciprocité dans les relations », a-t-il fait valoir, ajoutant que la décision concernant une éventuelle arrivée d'un groupe chinois en Italie reviendrait au Conseil des ministres. Le ministre des Entreprises Adolfo Urso a ainsi annoncé mercredi avoir entamé des pourparlers avec trois groupes automobiles chinois, sans toutefois donner de noms.

Lire aussiAutomobile : l'Italie contacte le chinois BYD pour créer une usine face à Stellantis

Objectif : un million de voitures produites

Le gouvernement de Meloni est surtout à la recherche d'un second constructeur automobile en Italie, pour mettre fin au monopole de Stellantis. « Il n'y a qu'en Italie que l'on trouve cette anomalie d'avoir un seul constructeur automobile », a souligné Adolfo Urso.

En pleine polémique avec Stellantis sur les subventions de l'Etat pour les véhicules électriques, le ministre italien des Entreprises avait déjà lancé l'idée de faire appel à un second constructeur afin d'atteindre son objectif de porter la production italienne à un million d'unités par an. « Pour défendre la filière italienne, nous avons besoin d'une production d'au moins un million de voitures et d'environ 300.000 véhicules utilitaires légers » chaque année, a-t-il cette fois-ci détaillé.

Pourtant, Stellantis a augmenté sa production en Italie l'an dernier de 9,6% à près de 752.000 véhicules et si le groupe arrivait à maintenir ce rythme, l'objectif d'un million de voitures pourrait être atteint « très, très rapidement », a affirmé son directeur général Carlos Tavares. « Si nous invitons davantage de constructeurs automobiles chinois à produire en Europe, pensez-vous que cela va aider ? » a ainsi lancé Carlos Tavares à la mi-février.

La solution ne se trouverait pas que chez les constructeurs chinois puisque « depuis des mois », a poursuivi Adolfo Urso, « l'Italie est aussi en contact avec des constructeurs occidentaux comme Tesla » dont les projets d'extension de son usine allemande implantée à Grünheide près de Berlin se sont heurtés à l'hostilité des habitants.

Lire aussiPourquoi Rome veut garder Sparkle, champion italien des câbles sous-marins, dans son giron

BYD au centre du jeu

En attendant, un nom est revenu ces derniers jours : BYD. Le géant chinois a confirmé lundi avoir été approché par le gouvernement de Giorgia Meloni. D'autant que BYD a dépassé Tesla fin 2023 comme principal producteur de voitures électriques dans le monde et a d'autres projets d'usines en dehors de l'Europe, de l'Asie du Sud-Est au Brésil.

La nécessité d'une autre usine en Europe « dépend de nos ventes », a ainsi expliqué Michael Shu, patron de BYD Europe. Avant d'ajouter : « Pour l'instant, nous progressons très bien ». Le groupe chinois compte déjà ouvrir dans trois ans en Hongrie sa première usine européenne de fabrication de voitures de tourisme, afin de stimuler les ventes dans la région. Selon un porte-parole de BYD en France, le gouvernement français avait aussi approché le groupe pour attirer son usine, tout comme l'Allemagne ou la Pologne. Mais BYD avait déjà une usine de bus et des fournisseurs en Hongrie, ce qui a facilité son choix.

Le constructeur chinois poursuit son offensive pour conquérir le marché européen. En tout début de semaine, le premier cargo automobile de BYD a déchargé lundi quelque 3.000 véhicules électriques dans le port allemand de Bremerhaven (Nord) à destination de plusieurs pays d'Europe.

Lire aussiEn France, les ventes de voitures hybrides s'envolent

Concurrence chinoise qui inquiète

L'Italie envisage donc d'ouvrir son marché alors que l'Union européenne est préoccupée par la concurrence potentiellement déloyale des véhicules électriques chinois, moins chers. Elle a même officiellement lancé une enquête sur les subventions accordées par Pékin aux constructeurs chinois.

En effet, pour développer à grande vitesse le marché de l'électrique, le gouvernement chinois a mis en place des aides à l'achat. Un soutien financier auquel il a toutefois mis fin depuis décembre 2022, mais qui n'a pas manqué d'attirer l'attention de la Commission européenne qui a ouvert, en septembre 2023, une enquête sur ces subventions, présumées illégales, de Pékin à ses constructeurs.

Si, au terme de son enquête, la Commission constate des infractions aux règles commerciales, elle pourrait infliger des droits de douane punitifs aux véhicules chinois, au risque de déclencher une guerre commerciale avec Pékin.

De son côté, la France a, elle, privé les constructeurs chinois de son bonus à l'achat. Pour rappel, le bonus écologique vise à aider les Français à acquérir un véhicule électrique. Mais tous les modèles ne sont pas concernés par cette aide qui se base désormais sur des critères prenant notamment en compte l'empreinte carbone de la fabrication de véhicules. Seuls les modèles produits en France et en Europe sont donc éligibles.

(Avec AFP)