Voiture thermique : la France appelle l'Allemagne à lever son abstention sur l'interdiction dans l'UE

Par latribune.fr  |   |  729  mots
Le texte a pourtant fait l'objet en octobre d'un accord entre États membres et négociateurs du Parlement européen. Il a par la suite été formellement approuvé mi-février par les eurodéputés réunis en plénière. (Crédits : Neil Hall)
Le texte qui l'interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique dans l'Union européenne en 2035 était initialement soutenu par Berlin. Le ministre des Transports français, Clément Beaune, regrette une « forme de fronde » menée par son homologue Volker Wissing. L'Allemagne, elle, se défend. Elle souhaite une législation supplémentaire pour encourager l'utilisation de carburants de synthèse dans les moteurs à combustion après 2035.

Les États membres de l'UE auraient dû voter ce mardi l'interdiction de la vente des voitures à moteur thermique en 2035. Ce devait être la dernière étape avant l'entrée en vigueur de cette mesure cruciale du plan Climat des Vingt-Sept. Il prévoit de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55% d'ici 2030 par rapport à 1990 et atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050.

En raison de l'abstention annoncée de l'Allemagne, ce vote a toutefois été décalé sine die. Et pour cause, sans elle, la majorité qualifiée requise (vote favorable d'au moins 55% des États représentant au moins 65% de la population de l'UE) n'était plus atteinte.

Le texte, qui imposera de fait les motorisations 100% électriques, a fait l'objet en octobre d'un accord entre États membres et négociateurs du Parlement européen. Il a, par la suite, été formellement approuvé mi-février par les eurodéputés réunis en plénière. Il ne peut donc plus être modifié.

« Ce signal était clair, il avait été soutenu, y compris par l'Allemagne. Il avait été acté sous la présidence française de l'Union européenne comme une grande ambition (...) », a rappelé le ministre français chargé des Transports ce mercredi 8 mars sur la chaîne d'informations LCI.

Et d'ajouter : « Il faut, je crois, revenir sur cet objectif qui est très important, y compris pour nos industriels, en France, en Allemagne », a plaidé Clément Beaune.

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Un « positionnement politique »

Clément Beaune a par ailleurs indiqué avoir « eu hier [son] homologue allemand, ministre des Transports (ndlr : Volker Wissing), puisque c'est notamment lui qui a mené cette forme de fronde contre l'objectif 2035 », a-t-il confié Clément Beaune.

Le blocage de l'Allemagne est une initiative des libéraux du parti FDP, dont Volker Wissing est membre. Ce petit parti, crédité d'environ 5% des intentions de vote dans les sondages nationaux, a perdu cinq élections régionales consécutives. Il espère s'affirmer face aux écologistes en se posant en défenseur de l'automobile, pariant sur l'hostilité d'une grande partie de la population à l'interdiction des moteurs thermiques. « Il y a des inquiétudes, je crois qu'il y a des discussions internes à la coalition allemande, pour être très clair aussi un peu de positionnement politique », a commenté Clément Beaune.

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Les carburants de synthèse au cœur de blocage allemand

Volker Wissing a rappelé vendredi, pour expliquer cette abstention, avoir demandé à ce que la Commission européenne présente « une proposition sur la manière dont les carburants synthétiques pourraient être utilisés dans les moteurs à combustion après 2035 ». « Ce qui manque maintenant, c'est la réalisation de cet engagement », a-t-il déclaré.

La technologie des carburants de synthèse, actuellement en cours de développement, consiste à produire du fuel à partir de CO2 issu notamment des activités industrielles en utilisant de l'électricité bas-carbone. Pour la filière automobile, elle permettrait de prolonger l'utilisation des moteurs thermiques menacés par l'irruption des véhicules 100% électriques. L'usage de cette technologie dans l'automobile est contesté, car elle est très énergivore.

L'Allemagne souhaite que la Commission propose une législation supplémentaire pour encourager ces carburants de synthèse dans le transport routier tandis qu'un autre texte sur les « infrastructures pour carburants alternatifs » est en cours de négociation.

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Un texte qui n'a jamais fait consensus

Le ministre français a mis en garde : « Si on ne garde pas cette ambition, nous serons balayés sur le plan industriel et écologique (...). Ce n'est pas en donnant des contre-signaux que l'on va réussir à créer cette voiture électrique accessible à tous ».

Reste que l'Allemagne n'est pas le seul État membre à faire preuve de réticence envers ce texte. L'Italie avait annoncé de longue date son opposition. La Pologne voulait, elle aussi, se prononcer contre et la Bulgarie souhaitait s'abstenir. Mais ces trois pays n'ont pas les moyens de bloquer la procédure, contrairement à Berlin.

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L'automobile, premier mode de déplacement des Européens, représente actuellement un peu moins de 15% des émissions de CO2 du continent.

(Avec AFP)