BTP : « Il faut rouvrir le robinet de la commande publique » (FNTP)

Par Sylvain Rolland  |   |  667  mots
Selon un scénario « réaliste » de la Banque postale, une baisse de 21% des dépenses d'investissement de l'Etat en 2017 par rapport à 2014 entraînerait une chute du chiffre d'affaires des travaux publics de 3,8 milliards d'euros. Et la destruction de pas moins de 37.000 emplois.
Alors que tous les indicateurs économiques sont dans le rouge, Bruno Cavagné, président de la Fédération nationale des Travaux Publics (FNTP), appelle l’État à relancer l’investissement. Et à clarifier ses choix en ce qui concerne l’écotaxe et les grandes infrastructures.

L'embellie aura été de courte durée. Après un léger rebond au quatrième trimestre 2013, l'activité des travaux publics repart à nouveau à la baisse en 2014. Selon la Fédération nationale des Travaux Publics (FNTP), le chiffre d'affaires du secteur, qui pèse 41 milliards d'euros, devrait diminuer de 4% en 2014. Avec pour conséquence la suppression de 12.000 emplois. La baisse du chiffre d'affaires atteint même 21% depuis le pic d'activité enregistré en 2007. « Les travaux publics tournent au ralenti et aucun signe ne laisse entrevoir une amélioration d'ici à la fin de l'année, bien au contraire », se désole Bruno Cavagné, le président de la fédération.

A l'exception des leaders comme Eiffage, les 8.000 chefs d'entreprises du secteur, qui emploient 280.000 personnes dont 90% dans des PME de moins de 50 salariés, broient du noir. En 2014, ils font état d'une dégradation forte de leurs carnets de commande. Effectivement, les marchés conclus sont en diminution de 8,7% en rythme annuel. La valse des maires liée aux élections municipales (51% des communes ont changé de maire le 30 mars dernier) devrait encore amplifier le phénomène dans les prochains mois à cause de l'annulation ou de la modification des projets lancés par les municipalités battues.

Une activité qui dépend à 70% de la commande publique

Biberonnés à l'argent des collectivités, les Travaux publics subissent la crise de plein fouet. Selon la FNTP, son chiffre d'affaires dépend à 70% de la commande publique. Problème : l'heure n'est plus aux grands investissements mais aux économies d'échelle. « Après les annonces du Premier ministre, il est certain que les collectivités locales devront contribuer au redressement des finances publiques, avec une baisse des dotations de 3 milliards d'euros par an entre 2015 et 2017 », poursuit Bruno Cavagné. Une très mauvaise nouvelle pour le secteur. L'investissement des collectivités devrait déjà diminuer de 5,6% cette année. Selon un scénario « réaliste » de la Banque postale, une baisse de 21% des dépenses d'investissement de l'Etat en 2017 par rapport à 2014 entraînerait une chute du chiffre d'affaires des travaux publics de 3,8 milliards d'euros. Et la destruction de pas moins de 37.000 emplois.

Bruno Cavagné n'y va pas par quatre chemins. « Il y a urgence. L'Etat doit rouvrir le robinet de la commande publique ou du moins, ne pas le fermer davantage », préconise-t-il. Selon la FNTP, le pouvoir aurait tout à perdre s'il diminuait encore les investissements. « En plus des conséquences sociales sur l'emploi, reporter ou annuler l'investissement en faveur de notre patrimoine en routes, ponts, réseaux d'eau et d'électricité fera porter un poids encore plus lourd sur la dépense publique… à venir ! ».

 L'écotaxe est censée financer des infrastructures de transport

Ségolène Royal sera-t-elle sensible à cet argument ? La ministre de l'Ecologie est attendue jeudi en clôture du Forum des travaux publics 2014. Elle devra, entre autres, clarifier les positions du gouvernement sur sa politique d'investissements. Et éclaircir les zones d'ombres qui planent sur l'écotaxe. Cette taxe très polémique était censée contribuer au budget de l'AFITF (Agence de financement des infrastructures de transports de France) à hauteur de 800 millions d'euros. Son abandon suite au mouvement des Bonnets rouges créé un trou dans le budget de l'Afitf qui menace, par ricochet, de nombreux projets d'infrastructures, à l'image de la nouvelle ligne de métro de Toulouse.

La Fédération déplore également le retard dans l'exécution de nombreuses infrastructures, dont la ligne Lyon-Turin, le Canal Seine Nord et les métros du Grand Paris. Elle attend aussi de Ségolène Royal une réponse concernant l'imbroglio qui entoure le plan de relance des autoroutes. Il prévoyait 3,6 milliards d'euros de travaux contre l'allongement de la durée des concessions autoroutières. Mais Bruxelles étudie toujours le projet… Bruno Cavagné s'impatiente. « Tous ces projets vitaux pour notre secteur vont-ils se réaliser ? Quand et avec quel financement ? » Dans le domaine des travaux publics comme dans d'autres, les entreprises attendent de l'Etat une politique claire et cohérente.