Maîtriser le foncier ? Les pistes de réflexion explosives du député Lagleize

Par César Armand  |   |  688  mots
Jean-Luc Lagleize est député (MoDem) de la Haute-Garonne et président de la commission de l'aménagement et de la politique foncière de Toulouse Métropole. (Crédits : DR)
Porte-parole Logement du MoDem à l'Assemblée nationale, le député de la Haute-Garonne Jean-Luc Lagleize a été missionné début avril par le Premier ministre pour formuler des propositions en matière de maîtrise du foncier dans les opérations de construction. Il propose d'interdire la vente aux enchères des terrains des collectivités, de numériser les documents administratifs liés à l'aménagement, et de "faire péter" la fiscalité sur les plus-values du foncier.

Avant d'être élu député (MoDem) de Haute-Garonne en 2017, Jean-Luc Lagleize a été conseiller patrimonial, juridique et fiscal à la ville, maire-adjoint de Toulouse chargé des cœurs de quartiers et aux relations avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) à la scène. Désormais porte-parole de son groupe politique sur les sujets de logement à l'Assemblée nationale, il demeure aussi président de la commission de l'aménagement et de la politique foncière de Toulouse Métropole, une fonction non-exécutive.

"Une loi Élan 2 ? Chiche !"

C'est sans doute pourquoi le 4 avril dernier le Premier ministre lui a confié une mission sur la maîtrise du foncier dans les opérations de construction. Édouard Philippe lui a notamment demandé "un examen des prérogatives à disposition des collectivités pour mettre en oeuvre leur stratégie d'intervention foncière" afin de proposer "toute mesure pour maîtriser les prix et lutter contre la spéculation foncière". Le député Lagleize doit également "soutenir et imaginer des dispositifs nouveaux".

"Tout a commencé lorsque j'ai dit au ministre de la Ville et du Logement Julien Denormandie : « C'est très bien de simplifier l'acte de construire dans la loi Élan, mais il faut aussi maîtriser le prix du foncier »", raconte-t-il ce 11 juillet. "En dix ans, ce dernier a cru de 71% et le prix du logement de 41%. Je l'ai alors invité à faire une loi Élan 2, et il m'a répondu « Chiche! »"

Interdire la vente aux enchères des terrains des collectivités

Le parlementaire estime que la spéculation est alimentée par la rareté du foncier dans les métropoles et que les collectivités et l'État, davantage que les promoteurs, participent à cette inflation.

"À Toulouse, un terrain évalué à 2 millions d'euros par les services de la ville s'est vendu 5 millions aux enchères. Il faut interdire ce genre de pratiques en l'inscrivant dans le Code des marchés publics et le Code général des collectivités locales."

Les métropoles pourront toutefois continuer d'organiser des concours d'urbanisme à prix fixe où les promoteurs se battront sur la qualité architecturale.

Une numérisation des documents liés à l'aménagement

Par ailleurs, Jean-Luc Lagleize entend bien laisser le pouvoir du permis de construire aux maires. Dans le même esprit, pour qu'il y ait une cohérence entre le plan local d'urbanisme (PLU), le plan local de l'habitat (PLH), le SCOT (schéma de cohérence territoriale) et les statistiques de l'INSEE, il plaide pour une numérisation des documents pour pouvoir croiser et comparer les données.

De même, il appelle à créer, dans chaque métropole, des observatoires du foncier qui permettraient de mettre en perspective ces informations, les prix du foncier et les prix de vente.

"Par exemple, une métropole accueille chaque année 20.000 nouveaux habitants, mais a revu son PLU à la baisse ! Institutionnalisons un outil de suivi, comme une délibération chaque année en conseil municipal, afin que ce soit discuté en toute transparence, et remontons l'information au niveau intercommunal."

« Faire péter » la fiscalité sur les plus-values du foncier

En matière fiscale, le député n'y va pas par quatre chemins : "Il faut « faire péter » la fiscalité qui incite à garder un terrain 22 ans pour être exonéré de plus-value, et 30 ans pour être dispensé de prélèvement sociaux." Il recommande donc l'instauration d'une flat-tax de 30% sur les plus-values du foncier, avec des exonérations en cas de vente des résidences principales ou de construction d'organismes HLM.

Après la propriété pleine et entière et le démembrement (comme le viager), Jean-Luc Lagleize espère enfin l'instauration d'un troisième droit de propriété : la dissociation entre le foncier et le bâti. "Il faut permettre à des collectivités d'acquérir du foncier qui ne soit plus jamais acquis par d'autres acteurs publics ou privés. Cela leur donnerait des droits à construire", explique-t-il.

Le parlementaire doit remettre son rapport en septembre et il espère déjà que des amendements du gouvernement reprenant ses idées viendront nourrir le projet de loi de finances 2020.