Gaz russe : la Grèce réfléchit à des solutions pour palier une éventuelle pénurie

Par latribune.fr  |   |  898  mots
La Grèce planche sur des « scénarios alternatifs » et vise une période allant jusqu'en mars 2023. (Crédits : Regis Duvignau)
Comment assurer l'approvisionnement énergétique de la Grèce en cas d'interruption des vannes de gaz en provenance de Russie ? Telle est la question à laquelle le gouvernement grec veut prévoir une réponse. Parmi les hypothèses envisagées, davantage de gaz liquéfié voire une reprise de la production de charbon, alors que le pays veut en sortir d'ici 2025. Athènes n'évoque néanmoins pas de réduire sa dépendance à l'énergie russe sur le long terme, contrairement à l'Union européenne qui veut diversifier ses approvisionnements.

Alors qu'elle importe 40% de son gaz de Russie - et 26% de son pétrole - la Grèce réfléchit à des « scénarios alternatifs » face au risque de pénurie de gaz. Et ce afin d'« assurer l'approvisionnement énergétique normal du pays ». Le ministre grec de l'Environnement et de l'énergie a ainsi annoncé mercredi 30 mars dans un communiqué avoir convoqué une réunion « extraordinaire » à ce sujet.

Les scénarios évalués par « le groupe ministériel de gestion de crise » doivent être mis en œuvre « en cas d'interruption de l'approvisionnement en gaz en provenance de Russie » et visent une période allant jusqu'en mars 2023, selon ce communiqué.

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L'opérateur grec du système de gaz naturel (Desfa) doit soumettre d'ici la fin de la semaine une étude concernant « l'ajout d'un réservoir flottant de gaz liquéfié (GNL) à son terminal » situé sur un îlot près d'Athènes, précise le texte. Des négociations sont également en cours entre Desfa et l'entreprise italienne de transport de gaz Snam sur « les possibilités de maintien des réserves stratégiques de gaz naturel dans des dépôts souterrains en Italie ».

La Grèce étudie également la possibilité de reprendre, si besoin, la production de lignite (un type de charbon). Ancienne principale ressource du pays, elle est en perte de vitesse depuis le milieu des années 2000. Les usines ferment petit à petit - la dernière fermeture est prévue d'ici à 2025 - ou sont transformées en unités de production de gaz naturel. Le principal fournisseur d'électricité grec DEI, contrôlée par l'État, « doit soumettre d'ici mardi son plan annuel d'exploitation de la lignite dans ses mines afin d'assurer le bon fonctionnement des usines disponibles de la lignite », souligne le ministère.

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L'Union européenne cherche à réduire sa dépendance au gaz russe

Contrairement à de nombreux autres pays européens, la Grèce ne dit pas qu'elle souhaite, sur le long terme, réduire sa dépendance aux énergies russes. Ce qui est le cas, par exemple de l'Allemagne, qui a présenté la semaine dernière son calendrier selon lequel elle se passera du charbon et du pétrole russe d'ici la fin de cette année et du gaz russe d'ici mi-2024. Idem du côté de la Pologne, qui a déclaré mi-mars vouloir sortir de la dépendance du gaz, du pétrole et du charbon russes, sans néanmoins donner d'échéance.

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Une volonté partagée aussi au niveau de l'Union européenne, qui veut diversifier les approvisionnements en énergie des Européens dans le but de réduire leur dépendance vis-à-vis de la Russie. Vendredi 25 mars, les États membres ont ainsi décidé de donner mandat à la Commission européenne pour effectuer des achats de gaz groupés, sur le modèle des commandes de vaccins anti-Covid. Les Vingt-Sept et la Commission veulent tirer profit du poids économique de l'UE pour bénéficier de prix avantageux.

En regroupant les demandes, Bruxelles entend aussi faciliter les contacts avec les fournisseurs internationaux afin de diversifier les sources d'approvisionnement. La plateforme d'achats en commun de l'UE « sera ouverte aux pays des Balkans occidentaux » ainsi qu'aux trois États liés à l'UE par des accords d'association (Moldavie, Ukraine, Géorgie). La participation au mécanisme sera volontaire, contrairement au dispositif d'achats en commun de vaccins, qui excluaient les commandes en dehors de la Commission.

Soucieux d'isoler Moscou et de priver la Russie de sources de revenus après son invasion de l'Ukraine, Bruxelles veut réduire des deux-tiers dès cette année les achats européens de gaz russe.

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Les États-Unis à la rescousse

La Commission négocie avec les principaux pays producteurs (Norvège, Qatar, Algérie) pour trouver de nouvelles sources d'approvisionnement. Elle a d'ailleurs annoncé vendredi 25 mars un accord avec les États-Unis pour que ceux-ci augmentent leurs livraisons de gaz naturel liquéfié. Après avoir doublé leurs livraisons ces derniers mois, les États-Unis « s'efforceront » avec « des partenaires internationaux » de fournir à l'Europe 15 milliards de mètres cubes supplémentaires de GNL en 2022.

« Les États-Unis vont œuvrer avec leurs partenaires internationaux et faire leur maximum pour pouvoir fournir 15 milliards de mètres cubes supplémentaires de GNL au marché européen en 2022, avec des hausses supplémentaires attendues à l'avenir », indique une note d'information diffusée par la Maison blanche.

Les États-Unis sont déjà le premier fournisseur de GNL de l'UE (22 milliards m3 l'an dernier), même s'ils ne représentent qu'environ 6,3% de ses importations totales de gaz.

Une plateforme centralisera les demandes des Vingt-Sept. Le gaz ne sera pas nécessairement américain, les États-Unis pouvant aussi, comme cet hiver, rediriger vers l'Europe des acheminements venant d'Asie, selon un responsable américain, ce qui nécessitera « un gros travail diplomatique ».

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 (Avec AFP)