En France, quand l'aéronautique rit, le transport aérien pleure ! (Airbus, Air France, Safran, Zodiac..)

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  526  mots
C'est le match des paradoxes. Si la filière aéronautique française affiche une santé éclatante, les compagnies aériennes tricolores, prises dans leur globalité, sont en sérieuse difficulté.

Alors que l'aéronautique française embauche à tour de bras, le transport aérien supprime des postes par milliers : en 2015, plus de 10 000 postes en moins par rapport à 2012, majoritairement chez Air France mais aussi dans d'autres compagnies comme Corsair ou Air Austral. C'est la conséquence de lourdes restructurations pour enrayer des situations financières catastrophiques depuis plusieurs années. Air France a par exemple perdu près de 2 milliards d'euros en six ans ! Corsair, Air Austral, Air Méditerranée, Aigle Azur, XL Airways, et même Air Caraïbes en 2011, ont toutes affiché à un moment ou à un autre des pertes ces dernières années. Seule Europe Airpost s'est retrouvée chaque année profitable.

Maux structurels

En 2012, Air Caraïbes et Europe Airpost ont été les deux seules compagnies bénéficiaires. Un an après, Air Austral les a rejointes, tandis qu'Air France et Corsair espèrent revenir dans le vert cette année. Pour autant, cette amélioration n'enlève en rien les maux structurels qui pèsent sur le transport aérien français. Car, si une partie des difficultés provient de problèmes intrinsèques à chaque compagnie (lire ici : comment Air France en est arrivée là), une autre résulte d'un écosystème peu favorable au transport aérien européen en général, et français en particulier.

Tout d'abord, depuis une dizaine d'années, 19% du produit de la taxe d'aviation civile (TAC) qui finance une partie des coûts du secteur, va directement dans le budget général de la nation. Soit grosso modo 80 millions d'euros l'an dernier.

« C'est une contribution injustifiable alors que le transport aérien est la seule activité qui paye l'ensemble de ses coûts, taxes et autres impôts », explique Guy Tardieu, le délégué général de la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam).

Taxe Chirac

À cette particularité française, explique Guy Tardieu, « s'en ajoutent d'autres comme la taxe Chirac prélevée sur les billets d'avion pour financer les programmes de santé dans les pays en développement [70 millions d'euros chez Air France-KLM], et le financement en totalité des coûts de sûreté, une activité pourtant régalienne, ou encore la hausse de 2,5 points de la TVA sur les billets des vols intérieurs ».

Baisse des prix

Combinée à un coût du travail supérieur en France, cette lourde taxation (avec les redevances aéroportuaires, elle pèse plus de la moitié du prix d'un aller-retour Paris-Marseille à 100 euros), pénalise le pavillon français. Difficile en effet de répercuter ces charges sur le prix du billet. Avec le développement des low-cost étrangères, aux charges moins élevées, ou celui des transporteurs du Golfe soutenus par leurs États, l'environnement concurrentiel ne le permet pas.

Les prix sont en baisse depuis des années. La situation reste donc critique. Des petites compagnies françaises pourraient ne pas passer l'hiver. Quant à Air France, malgré sa restructuration, le ciel n'est pas encore dégagé. En témoigne, la révision à la baisse de la prévision d'Ebidta pour 2014 annoncée ce mardi.