Danger pour Air France : les compagnies chinoises vont mettre les gaz en France

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  820  mots
Si Air France va bénéficier de cet accord pour pousser ses pions en Chine, elle va également voir le niveau de compétition se renforcer sur un axe déjà difficile.
A la demande de Pékin, la France et la Chine ont renégocié l'accord bilatéral sur les services aériens entre les deux pays. Il autorise le passage de 50 vols par semaine par pavillon (par pays) aujourd'hui à 126 d'ici à 2020 - autrement dit, les capacités vont plus que doubler en quatre ans.

Mauvaise nouvelle pour Air France. La concurrence des compagnies aériennes chinoises en France va monter en puissance. Après avoir manifesté l'an dernier à la France sa volonté de voir le nombre de vols entre la Chine et la France augmenter, la Chine a obtenu gain de cause.

126 vols par semaine d'ici à 2020 pour le pavillon chinois

L'accord bilatéral sur les droits de trafic entre les deux pays signé le 1er juin 1966 (et modifié plusieurs fois depuis) a été renégocié le 31 mars dernier. Il va permettre le passage de 50 vols par semaine par pavillon aujourd'hui à 126 d'ici à 2020, selon un communiqué de l'UAF, l'Union des aéroports français. En 2020, l'accord sera renégocié pour prendre en compte la problématique du nouvel aéroport de Pékin qui ouvrira en octobre 2019 pour les vols intérieurs et 2020 pour les vols internationaux.

L'UAF se félicite que cet accord mette un « accent particulier » sur le développement des liaisons entre les grandes villes chinoises et Paris et entre les principales villes chinoises et les régions françaises.

Selon la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), cet accord prévoit par pavillon une hausse de 10 vols hebdomadaires entre la Chine et les régions françaises en 2017, 10 autres en 2018 et 15 autres en 2020. Dans le même temps, les vols entre Paris et les villes chinoises (hors Pékin, Canton et Shanghaï) vont augmenter (toujours par pavillon) de 10 vols et 11 vols par semaine respectivement en 2018 et 2019. La fréquence des vols entre Paris et les trois principales villes chinoises augmentera de 10 vols par semaine à partir de 2020.

Fort développement à l'international des compagnies chinoises

Si Air France va bénéficier de cet accord pour pousser ses pions en Chine, elle va également voir le niveau de compétition se renforcer sur un axe déjà difficile. Car, non seulement Air France ne pourra pas ajouter la même capacité que celles de toutes les compagnies chinoises réunies qui accélèrent toutes à l'international, mais elle pourrait également voir d'autres compagnies françaises tenter leur chance sur ce marché difficile. Le nombre de compagnies françaises autorisées à desservir la Chine va en effet passer de 5 (même si, actuellement, seule Air France dessert la Chine) à 7. XL Airways a reçu le feu vert et une autre possibilité est gardée en réserve. Récemment, Laurent Magnin, le PDG d'XL Airways et de La Compagnie, citait la Chine comme axe de développement à moyen-terme pour XL.

Le nombre de compagnies chinoises désignées pourra quant à lui passer de 6 à 8.

Néanmoins, Air France a obtenu de pouvoir demander de passer à l'aéroport de Pékin du terminal 2 au terminal 3 qui peut accueillir l'A380.

Autre menace, le développement de lignes entre les grandes villes françaises comme Lyon, Nice, Toulouse, Marseille ou Bordeaux et la Chine concurrencera de facto Air France puisque de telles lignes attireront forcément des passagers qui passent aujourd'hui par le hub d'Air France de Roissy-Charles de Gaulle.

« Les pouvoirs publics français ont pleinement reconnu l'importance de la connectivité aérienne dans le développement économique et social de nos territoires. C'est un bond en avant pour la connectivité de la France qui accuse un réel retard face à ses principaux concurrents européens. Il est désormais urgent que la commission européenne conclue au plus tôt les négociations des droits de trafic entre l'Union européenne d'une part, la Turquie, le Qatar, les Emirats arabes unis, et l'Asean d'autre part. Il en va du dynamisme économique de notre pays », a déclaré Jean-Michel Vernhes, le président de l'UAF.

Gel des droits de trafic pour les compagnies du Golfe

Alors que la France gèle les droits de trafic des compagnies du Golfe depuis 5 ans (à l'exception de 5 vols hebdomadaires accordées à Qatar Airways à Nice et Lyon), les aéroports français demandent au contraire plus de vols entre les aéroports régionaux et les pays du Golfe, carrefour vers l'Inde, l'Asie, l'Australie, l'Afrique de l'est...

    >Lire : Les aéroports régionaux français contre le blocage des compagnies du Golfe

Sous le mandat de François Hollande, la France a refusé d'accorder plus de vols à des compagnies soutenues directement ou indirectement par leur Etat-actionnaire qui concurrence de « manière non équitable » Air France. Une position soutenue par le fameux rapport Le Roux remis au gouvernement fin 2015 sur les mesures à prendre pour améliorer la compétitivité du pavillon français. Depuis, Paris et Berlin ont poussé la Commission à entamer des négociations avec ces pays pour ouvrir le marché européen en contrepartie des mesures de concurrence équitable.

Pour l'heure, les compagnies du Golfe contournent ce blocage des droits du trafic en positionnant des avions plus gros. Etihad va ainsi desservir Paris en A380 cet été. Emirates positionnera lui aussi le super jumbo européen à Nice en juillet.