La SNCF, l’autre gros dossier social qui se profile

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  646  mots
Direction et syndicats doivent négocier l'an prochain un nouveau cadre social. Le dossier est très sensible. A cet égard, les prochaines élections professionnelles sont prévues le 19 novembre, risquent d'être déterminantes. Si la CGT et Sud passent sous la barre des 50%, ils ne pourront pas s'opposer à un accord d'entreprise.

Alors qu'Air France est en proie à de fortes tensions sociales, la SNCF s'apprête à entrer à son tour dans une phase délicate sur le plan social.

La société ferroviaire doit en effet renégocier son cadre social avec les syndicats en 2016 pour aboutir d'ici à juillet de l'année prochaine à de nouveaux accords d'entreprise, conformément à la loi sur la réforme ferroviaire votée en août 2014.
Ces accords d'entreprise seront le dernier étage de la fusée après la publication d'un décret socle et l'élaboration d'une convention collective pour l'ensemble des salariés du secteur.

Organisation du temps de travail

La négociation, qui commencera début d'année 2016, est extrêmement sensible dans la mesure où elle abordera, notamment, l'épineuse question de l'organisation du temps de travail à la SNCF.

L'objectif, en tous cas du côté de la direction et du gouvernement, est clair : générer des gains de productivité pour préparer la SNCF à affronter la concurrence, aujourd'hui celle des autres modes de transport (avions, covoiturage, bus), et, à plus long terme, celle d'autres opérateurs ferroviaires qui verra le jour au moment de l'ouverture à la concurrence ferroviaire au cours de la prochaine décennie.

Contrats de performance

L'Etat a bien conscience de l'enjeu. Dans les négociations (tendues) en cours avec la SNCF sur le contenu des contrats de performances pour les 10 prochaines années (dans lesquels figurera le volume des investissements qu'il prévoit au cours de cette période), l'Etat demandera des efforts de productivité à la SNCF.

«La structure de coûts est totalement incompatible avec la concurrence», explique une source ministérielle.

Dans cette perspective, les élections professionnelles prévues le 19 novembre de la SNCF s'annonce décisive.

«Elles montreront une vraie tendance, c'est l'heure de vérité», confie un membre de la direction.

Quel poids pour la CGT et Sud?

Les résultats risquent en effet d'être déterminants pour la suite.

«L'enjeu est de voir quel sera le poids de la CGT et de Sud Rail qui représentent aujourd'hui 52,12% des voix. S'ils passent sous la barre des 50% des voix, ils ne pourront pas s'opposer à un accord d'entreprise signé par des syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 30% des voix», explique une source politique.

C'est le scénario espéré par la direction et le gouvernement. A tel point que ce dernier a tout fait ces derniers mois pour éviter d'avoir à donner du grain à moudre à ces deux syndicats. C'est notamment pour cela que l'expérimentation de l'ouverture à la concurrence pour les trains d'équilibre du territoire (TET) a été in extremis écartée par l'Elysée de la feuille de route du gouvernement pour redresser cette activité présentée en juillet.

La partie s'annonce serrée en raison de la proportion toujours plus grande du nombre de cadres, lesquels représentent quasiment la moitié des effectifs du groupe. En outre, les voix des 1.500 salariés de Réseau Ferré de France (RFF) qui ont rejoint la SNCF peuvent avoir leur importance. La CGT et Sud sont quasiment inexistants parmi eux, et ils représentent environ 1% des voix.

Le gouvernement soutiendra-t-il la direction?

Même si la CGT et Sud devaient passer sous la barre des 50% des voix, cela n'écarterait pas pour autant le risque de tensions qui semblent inévitables. 
L'attitude du gouvernement sera à ce moment-là déterminante.

«Soutiendra-t-il la direction ou la lâchera-t-il en cas de conflit social ? », s'interroge un observateur.

A l'approche de l'élection présidentielle en 2017, pas sûr que le gouvernement veuille prendre le risque d'une grève dure en 2016, notamment pendant l'Euro de football organisé en juin prochain en France, comme certains en émettent l'hypothèse. A ce titre, l'évolution de la situation à Air France et le comportement de l'Etat dans ce dossier seront riches d'enseignements pour la société ferroviaire.