L'économie de matériaux, essentielle à la lutte contre le réchauffement

Par Giulietta Gamberini  |   |  635  mots
Selon le groupe d'experts, tous les pays devraient intégrer l'économie circulaire dans leurs Contributions déterminées au niveau national (CDN). (Crédits : iStock)
Sans une meilleure gestion des ressources, notamment de celles utilisées pour édifier des maisons et fabriquer des voitures, on ne limitera pas le réchauffement à 1,5°C, met en garde un rapport du Groupe international d'experts sur les ressources.

Abandon des énergies fossiles pour plus de renouvelables, efficacité énergétique... si ces efforts sont toujours indispensables afin de contrer la crise climatique, l'objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C ne pourra pas être atteint sans économiser aussi les matériaux utilisés dans la construction et l'industrie manufacturière, notamment pour édifier des maisons et fabriquer des voitures. Telle est la mise en garde lancée à la COP25 par le Groupe international d'experts sur les ressources (Gier).

Dans un "Résumé pour les décideurs" écrit sur demande du G7 et publié mercredi, ce groupe d'experts scientifiques indépendants créé par l'ONU en 2007 appelle donc tous les pays à intégrer la lutte contre le gaspillage des matériaux dans leurs Contributions déterminées au niveau national (CDN).

"Actuellement, seuls le Japon, l'Inde, la Chine et la Turquie mentionnent l'utilisation efficace des ressources, la gestion des ressources, l'efficacité des matériaux, l'économie circulaire ou la consommation comme mesures d'atténuation explicites dans leurs CDN", regrette en effet le rapport.

Jusqu'à 25 gigatonnes de CO2 en moins dans les pays du G7

Entre 1995 et 2015, les émissions de gaz à effet de serre liées à la production de métaux, bois, minéraux et plastiques ont plus que doublé, jusqu'à représenter presqu'un quart du total, relève le Gier. Mais corriger le tir est toujours possible, souligne le groupe d'experts, y compris dans les deux industries où la production de matériaux génère le plus d'émissions. Une meilleure gestion des matériaux de construction d'édifices résidentiels en Chine, en Inde et dans les pays du G7 permettrait en effet de réduire les émissions liées à leur production jusqu'à 80% en 2050. A la même échéance, réduire les matériaux utilisés dans la fabrication des voitures pourrait faire baisser les émissions dues à leur production de 50% en Inde, 60% en Chine et 70% dans les pays du G7.

De telles économies sont loin d'être anodines. Dans les pays du G7, elles impliqueraient une réduction des émissions pouvant atteindre 25 gigatonnes entre 2016 et 2060: plus du double des émissions annuelles de toutes les centrales électriques au charbon du monde.

Des "maisons partagées" et des "unités plus petites"

De surcroît, de telles performances sont possibles en utilisant des technologies et des stratégies déjà existantes, comme la prolongation de la durée de vie des produits et la réutilisation des composants, souligne le Gier.

Dans le secteur de la construction, "les stratégies les plus prometteuses comprennent une utilisation plus intensive de l'espace (par exemple, une réduction des surfaces), le remplacement du béton et de la maçonnerie par du bois produit de manière durable, l'amélioration du recyclage et la construction de maisons plus légères en utilisant de l'acier, du ciment et du verre moins carbonés", écrivent les experts, qui évoquent également le développement de "maisons partagées" d'"unités plus petites".

Quant aux émissions liées à la production de voitures individuelles, le Gier insiste sur la nécessité de recourir au covoiturage, ainsi que d'abandonner les gros SVU.

La nécessité d'"environnements politiques et d'incitations favorables"

Le rôle des Etats est toutefois essentiel:

"Beaucoup de ces réductions d'émissions ne seront possibles que si les pays créent des environnements politiques et des incitations favorables", indique le rapport.

"Les politiques qui s'appliquent à tous les secteurs auront un impact plus important que celles ciblant un seul secteur", met toutefois en garde le Gier, en citant parmi les meilleurs mesures "la certification des bâtiments", "les marchés publics écologiques", "les taxes sur les matériaux vierges", "les règlements exigeant un certain pourcentage de contenu recyclé", ainsi que "la suppression des subventions sur les matériaux vierges".