Le chômage baisse, accélérons les réformes !

Par Philippe Mabille  |   |  748  mots
Si elle poursuit les réformes, la France peut tout à fait espérer retrouver un taux de chômage de 7% voire moins. La preuve, c'était le niveau atteint au premier trimestre 2008, il y a dix ans, juste avant que la crise financière des subprimes ne vienne tout remettre en cause.
[ EDITO ] La chronique de Philippe Mabille, directeur de la rédaction de La Tribune, dans "Entendez-vous l'éco" sur France Culture du jeudi 26 octobre 2017.

On sait depuis François Hollande qu'il est dangereux de se risquer à faire des pronostics en matière de lutte contre le chômage : la fameuse et si longtemps espérée « inversion de la courbe » a fait du mal à l'ancien chef de l'Etat, alors même que ladite courbe s'est en effet inversée, dès 2016, même si personne, notamment les intéressés, ne s'en sont vraiment aperçus...

Et pourtant, Emmanuel Macron a fixé un objectif ambitieux, pendant sa campagne, avec un taux de chômage espéré à 7% en fin de quinquennat. Cet espoir a été réitéré la semaine dernière par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud après l'annonce d'une forte baisse du nombre des demandeurs d'emploi en septembre : « Si toutes les mesures structurelles qu'on est en train de prendre font leur plein effet, ce que nous pensons, il est raisonnable d'envisager un chômage qui baisse à 7% », a-t-elle déclaré sur LCI.

Sortir du chômage de masse qui gangrène la société française

Un objectif de 7% de chômage alors que nous sommes encore à 9,5%, est-ce vraiment possible ? Les signaux sont plutôt encourageants. D'abord, la France qui a longtemps été pénalisée, par rapport à l'Allemagne, par sa démographie plus dynamique, avec plus d'entrants sur le marché du travail, le sera moins dans les prochaines années : selon les dernières projections de l'Insee, cet effet va s'atténuer dans les prochaines années, avec une croissance de seulement 0,2% de la population active.

En septembre, le nombre des chômeurs de la catégorie A a baissé de 1,8%, soit plus de 60.000 personnes. C'est un encouragement pour accélérer les réformes. Emmanuel Macron, qui a fait de la sortie du chômage de masse qui gangrène la société française l'alpha et l'omega de sa politique, va donc accélérer, en profitant de la conjoncture favorable actuelle. Il a commencé à le faire cet été, en changeant complètement le logiciel de la politique économique : un code du travail plus souple pour les entrepreneurs, une politique fiscale libérale avec la suppression de l'ISF et l'instauration de la flat tax. Et cela va continuer avec les réformes à venir de l'assurance chômage, de l'apprentissage et de la formation des chômeurs, qui doivent aboutir d'ici à l'été 2018.

Deux types d'écueils sur le chemin de la réussite

Donc, oui, si elle poursuit les réformes, la France peut tout à fait espérer retrouver un taux de chômage de 7% voire moins. La preuve, c'était le niveau atteint au premier trimestre 2008, il y a dix ans, juste avant que la crise financière des subprimes ne vienne tout remettre en cause. Certes, la croissance était à l'époque plus forte (2,3% contre 1,8% attendu cette année) mais il est probable que les réformes structurelles abaissent le niveau de croissance nécessaire pour créer des emplois. Les bons chiffres de création d'emplois enregistrés depuis début 2016 le laissent en tout cas entendre.

Un objectif de 2,5 points de baisse du chômage est atteignable, mais à certaines conditions. Premier obstacle : la reprise actuelle va-t-elle continuer. La hausse de l'euro, la remontée des taux, un krach boursier, les risques politiques peuvent casser la dynamique en cours et remettre tout en cause. Ce sont des éléments sur lesquels Emmanuel Macron n'a pas de prise. Mais pour l'instant, tout va bien de ce côté.

Deuxième obstacle, mais sur lequel il peut agir : faire baisser le taux de chômage dit « structurel », sur lequel les économistes sont en désaccord ; selon les uns, c'est 8,5%, selon les autres, c'est 5%. La clef, c'est de s'attaquer au chômage de longue durée, aux publics les plus fragiles, ceux qui se sont éloignés du marché du travail et n'ont plus les compétences pour s'y réinsérer.

Pour taper dans le « noyau dur » du chômage, il faut donc agir sur tous les leviers : concentrer l'effort de formation sur les chômeurs (c'est prévu dans le grand plan d'investissement avec 11 milliards d'euros), relancer l'apprentissage en ne le réservant pas qu'aux plus favorisés et en en baissant le coût pour les entreprises, améliorer surtout la qualité des formations afin que celles-ci soient en ligne avec les emplois non pourvus et plus difficiles, les emplois de demain.

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