Pas question de fusion dans les télécoms … «pour l’instant»

Par Delphine Cuny  |   |  564  mots
« Pas question de fusion pour l’instant » dans les télécoms mais « pas question que les prix s’effondrent » non plus, ont déclaré ce jeudi les ministres Fleur Pellerin et Arnaud Montebourg.
Si Fleur Pellerin a indiqué que le rapprochement de deux acteurs risquerait de se traduire en casse sociale, la position du gouvernement reste pragmatique en cas de projet de fusion, la priorité étant donné à l’investissement dans le très haut débit et à l’emploi.

Tout le monde en parle. Deux ans après l'arrivée de Free Mobile, la guerre des prix dans les télécoms mènera-t-elle à plus ou moins brève échéance à une fusion et un retour à trois acteurs ? Expliquant la ligne du gouvernement, la ministre à l'Economie numérique, Fleur Pellerin, a déclaré ce jeudi : « Nous privilégions l'investissement, l'innovation et l'emploi, dans un marché qui est pour l'instant à quatre opérateurs. Nous ne cherchons pas à « micro-manager » le secteur, mais à faire en sorte que les opérateurs soient à la hauteur des investissements nécessaires dans le secteur. » Interrogée plus précisément sur la perspective d'une fusion, la ministre a estimé cependant qu' « une consolidation entre deux acteurs serait nécessairement synonyme d'un certain nombre de doublons. Qui dit doublon dit casse sociale et ce n'est pas une perspective qui enchanterait le gouvernement. Il est beaucoup trop tôt pour dire aujourd'hui que le low-cost a gagné. Nous aviserons. Pour l'instant, il n'en est pas question. »

Ne pas laisser « détruire » le secteur

« Pour l'instant » donc. Car, dans le même temps, « il est hors de question qu'on laisse les prix d'effondrer parce que des millionnaires se querellent sur la place publique » a mis en garde ce jeudi Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, qui ne souhaite « pas une concurrence effrénée par les infrastructures, mais une nécessaire mutualisation pour retrouver de la marge d'investissement. » En clair, si l'alternative à une fusion est une guerre des prix suicidaire, « on ne va pas laisser les acteurs détruire le secteur, au détriment du très haut débit, de l'investissement, de l'emploi », explicite un haut fonctionnaire de Bercy, qui ajoute « si un projet de consolidation est sur la table, vu les enjeux en termes de doublons et d'emplois, il faudra trouver les meilleures conditions. On ne pousse pas à la consolidation, mais il n'y a pas de chiffre magique, trois ou quatre opérateurs », martèle-t-il. La ministre a, semble-t-il, voulu adresser un avertissement aux opérateurs : le gouvernement ne donnera pas sa bénédiction à n'importe quel rapprochement.

Attention au risque de duopole

De son côté, le président de l'Autorité de la concurrence a exprimé sa prudence sur une éventuelle fusion. Interviewé mercredi sur BFM TV, Bruno Lasserre a relevé que « Bouygues et SFR ne nous ont pas du tout parlé de fusion » dans le cadre de leurs négociations sur la mutualisation de réseaux, dans lesquelles Free tente de s'inviter, mutualisation que « nous encourageons car cela donnera une respiration stratégique au secteur et permettra d'accélérer les déploiements. » Si le gendarme se déclare « pragmatique », il s'interroge : « passer de quatre à trois, qu'est-ce que cela veut dire ? Si cela préfigure la marginalisation du troisième acteur et que l'on va vers un duopole, est-ce une solution souhaitable ? » Et une consolidation par rachat « serait-elle la plus favorable à l'investissement, à l'innovation, à l'emploi ? », a-t-il demandé, sans apporter de réponse. Bruno Lasserre, dont le mandat se termine le 2 mars, a indiqué qu'il serait d'ailleurs très attentif à la décision de la Commission européenne sur les projets de fusion en cours en Allemagne et en Irlande, deux pays qui sont en passe de basculer de quatre à trois opérateurs, comme en Autriche. Même si ces décisions ne seraient pas forcément transposables chez nous.