Et si Coriolis devenait le quatrième opérateur télécoms ?

Par Pierre Manière  |   |  610  mots
Sur le segment du B2B, Coriolis lorgnerait 1,1 million abonnés mobiles, et 140.000 abonnés aux lignes fixes.
L’opérateur virtuel est en discussion pour reprendre des activités entreprises et grand public de Bouygues Telecom dans le cadre d’un possible mariage avec Orange. D’après nos informations, il serait aussi intéressé par l’infrastructure du réseau fixe de la filiale télécoms de Martin Bouygues.

Coriolis veut jouer dans la cour des grands. Et pourrait bien, qui sait, se transformer d'ici peu en quatrième opérateur sur le marché français des télécoms. Le MVNO (opérateur virtuel, ne disposant pas d'un réseau propre) veut profiter d'un possible rachat de Bouygues Telecom par Orange. L'opérateur historique discute aujourd'hui avec ses principaux concurrents, Numericable-SFR et Free, pour partager les actifs (fréquences, infrastructures, clients et boutiques) de la filiale télécoms de Martin Bouygues. Il s'agit là d'un impératif : si Orange avalait d'une traite Bouygues Telecom, il serait beaucoup trop fort sur le marché français. Ce que ne permettrait jamais les autorités de la concurrence, qui donneront in fine le feu vert - ou pas - à l'opération.

Mais ce dépeçage de Bouygues Telecom pourrait aussi profiter à Coriolis. L'opérateur virtuel a réalisé un chiffre d'affaires de 300 millions d'euros l'an dernier, et compte plus de 60.000 entreprises clientes, dont beaucoup d'ETI. Depuis plusieurs semaines, celui-ci a entamé des discussions avec Orange pour récupérer les clients professionnels de Bouygues Telecom. Sur ce segment, il lorgnerait 1,1 million abonnés mobiles, et 140.000 abonnés aux lignes fixes, nous confirme l'opérateur.

« Garantir un minimum de concurrence »

Cette cession d'actifs, évalués à un demi-milliard d'euros, a de sérieuses chances d'aboutir. Pourquoi ? Parce que le marché des télécoms d'entreprise est aujourd'hui un quasi-duopole, et l'autorité de la concurrence verrait d'un mauvais œil tout renforcement d'Orange sur ce marché d'environ 10 milliards d'euros. Et ce, alors que mi-décembre, l'opérateur historique a écopé d'une amende record de 350 millions d'euros pour « pratiques anticoncurrentielle » sur ce segment.

Agathe Martin, analyste chez Exane-BNP Paribas, le rappelle : « Orange dispose ici d'une part de marché d'environ 65%, contre 20% pour Numericable-SFR, et 5% pour Bouygues Telecom. » Ainsi, renforcer Coriolis dans les télécoms d'entreprise permettrait « de garantir l'existence d'un troisième acteur crédible, assurant ainsi un niveau de concurrence minimal », juge-t-elle.

En parallèle, Coriolis est aussi intéressé par le marché grand public. D'après Paris Match, il lorgne les 2,7 à 3 millions d'abonnés Internet fixe de Bouygues Telecom, évalués à 1 milliard d'euros. Problème : beaucoup disposent aussi d'un abonnement mobile. Des discussions seraient donc en cours pour possiblement dissocier les clients Internet fixe des clients Internet fixe et mobile.

Se faire un nom auprès du grand public

Mais Coriolis ne souhaite visiblement pas s'arrêter en si bon chemin. D'après nos informations, il serait aussi en discussion concernant l'infrastructure du réseau fixe de Bouygues Telecom. Il s'agit d'un point fondamental. Ou plutôt d'« une question essentielle », souligne Agathe Martin :

« Si Coriolis obtenait des actifs réseaux (mobile et/ou fixe), il serait alors fortement motivé à gagner des parts de marché pour rentabiliser cet investissement. Ce cas de figure pourrait donc l'amener à conduire une politique de prix agressive. En revanche, s'il continuait à utiliser le réseau des opérateurs existants, sa stratégie commerciale dépendrait alors des termes que ceux-ci seraient prêts à lui offrir pour y accéder. Ces termes feraient par ailleurs certainement l'objet d'une revue par les autorités de concurrence et de régulation. »

Reste qu'ici, Coriolis aurait alors un gros challenge devant lui : se faire un nom dans le cercle fermé des télécoms grand public à côté de marques fortes comme Orange, Free et SFR. Il devrait ainsi développer des plateformes de distribution, proposer des produits innovants et des contenus variés (en partenariat avec des acteurs comme Canal+ ou Netflix par exemple) pour se différencier. Un sacré pari... Chiche ?