Fin de la neutralité du Net : le régulateur américain droit dans ses bottes

Par Pierre Manière  |   |  485  mots
Nommé par Donald Trump dans la foulée de son arrivée à la Maison Blanche, Ajit Pai est le chef de file de la Commission fédérale des communications (FCC). (Crédits : Reuters/Yuri Gripas)
Lors du Mobile World Congress de Barcelone, le président de la Commission fédérale des communications (FCC), Ajit Pai, a jugé que sa décision d'en finir avec le principe de neutralité du Net allait permettre de doper les investissements dans les télécoms.

C'est peu dire qu'il était attendu. Après avoir annulé sa venue au Consumer Electronics Show de Las Vegas début janvier, Ajit Pai, le président de la Commission fédérale des communications (FCC) était un des invités de marque du Mobile World Congress de Barcelone, qui a débuté lundi. Au pays de l'Oncle Sam, c'est lui, le chef de file du régulateur américain des télécoms, qui a décidé sous l'impulsion de Donald Trump, d'abroger récemment la neutralité du Net. Ainsi le 23 avril prochain, ce principe mis en place sous l'ère Obama pour sacraliser la non-discrimination des contenus sur la Toile, doit disparaître aux Etats-Unis. Au grand dam de ses défenseurs, nombreux, qui craignent que les opérateurs télécoms n'en profitent pour mettre en place un "Internet à plusieurs vitesses" à leur profit. Comment? En discriminant, par exemple, certains services et contenus gourmands en bande passante pour les offres les moins chères.

Dans une interview à CNBC, ce mardi à Barcelone, Ajit Pai est resté droit dans ses bottes. Il a estimé, en somme, que le choix de mettre fin à la neutralité du Net ne constituait tout au plus qu'un allégement de la régulation. "Certains nous ont dit que nous devions garder la régulation actuelle et sévère mise en place dans les années 1930, a-t-il indiqué. D'autres voulaient effacer l'ardoise et n'être contraint par aucune règle." Ainsi, estime-t-il, "nous avons choisi une voie médiane".

Pai juge sa régulation pro-investissement

Pourquoi? Parce qu'à ses yeux, la fin de la neutralité du Net est essentielle pour favoriser l'investissement dans les réseaux. Et en particulier dans la 5G, la prochaine génération de communication mobile - dont il espère que les Etats-Unis en seront les leaders mondiaux.

Aux Etats-Unis, ses mots vont à n'en point douter susciter à nouveau l'ire des défenseurs de la neutralité du Net. A contrario, ils ont déjà été salués par un grand nombre d'industriels des télécoms rassemblés au Mobile World Congress. Depuis longtemps, les grands opérateurs européens tirent à boulets rouges sur ce principe de neutralité du Net, adopté par l'UE en août 2016, et qui, selon eux, constitue un frein à leur développement.

Lobbying d'Orange contre la neutralité du Net

C'est par exemple la posture de Stéphane Richard, le PDG d'Orange. "Certains usages futurs de l'Internet - je pense notamment à l'Internet des objets ou à la voiture autonome - vont nécessiter des Internets particuliers en termes de latence et de vitesse, a affirmé le patron sur BFM-TV mi-dévembre. Il faudra alors qu'on soit capable de proposer des Internets avec des fonctionnalités et des puissances différentes. Ou en clair, des Internets avec des qualités de service différentes."