Google se paye un second câble sous-marin privé

Par Pierre Manière  |   |  654  mots
Google mise sur 13 câbles sous-marins pour écouler son trafic de données - dont 7 seront opérationnels à partir de 2019. (Crédits : DR)
Le géant américain du Net a annoncé qu’il allait déployer un câble privé, qui passera sous l’Atlantique, pour relier la côte Est des États-Unis à la France. Celui-ci sera utilisé pour son activité de « cloud » (informatique dématérialisée). Il s’agit du second câble privé de Google, après Curie, un câble qu’il déploie aujourd’hui entre la côte Ouest du pays de l’Oncle Sam et le Chili.

Et de deux ! Google n'hésite pas à casser la tirelire pour sécuriser son gros trafic Internet à travers le monde. Après avoir annoncé, au mois de janvier, le déploiement d'un câble sous-marin privé, baptisé Curie, entre la côte Ouest des États-Unis et le Chili (lequel sera opérationnel l'an prochain), le géant américain a indiqué ce mardi qu'il allait tirer un nouveau câble en propre du pays de l'Oncle Sam au Vieux Continent. Cette artère-ci, qui reposera sous l'Atlantique, partira de Virginia Beach, sur la côte Est des États-Unis, pour rejoindre « la côte Atlantique française », précise le groupe de Mountain View dans un communiqué. Son nom ? Dunant, « en hommage à Henri Dunant, le fondateur de la Croix-Rouge », lit-on.

Ce câble transatlantique servira notamment aux activités de « cloud » (informatique dématérialisée) de Google. Il sera construit et installé par le groupe américain TE Subcom (un des concurrents d'Alcatel Submarine Networks, dont l'Etat français fait son possible pour conserver cette activité en France depuis la vente d'Alcatel au finlandais Nokia il y a deux ans). Selon Google, cette nouvelle ligne transatlantique sera opérationnelle courant 2020. Elle complétera l'important réseau de câbles sous-marins du géant du Net, qui a investi, au total, dans pas moins de 13 câbles sous-marins ces dernières années. Sachant qu'un peu plus de la moitié rentreront en service à partir de l'année prochaine:

Google ne veut pas lever le voile sur le prix de cette entreprise. En général, ce type d'actif est extrêmement coûteux, de l'ordre de plusieurs centaines de millions d'euros. Voilà pourquoi les câbles sont le plus souvent financés par des consortiums formés par plusieurs acteurs - dont les grands opérateurs télécoms comme Orange-, lesquels partagent la note et son utilisation. D'autres acteurs, aux poches moins profondes, et qui ne veulent ou ne peuvent investir directement dans ces infrastructures, louent de leur côté à ces consortiums la connectivité dont ils ont besoin.

Là où les câbles Dunant et Curie de Google se distinguent, c'est qu'ils sont totalement privés. Pourquoi ? Dans son communiqué, le groupe de Mountain View argue que cette solution, forcément très chère, lui permet de faire « atterrir » un câble là où il le souhaite, sans avoir à négocier avec d'autres cofinanceurs. Cela lui permettrait aussi de gagner en efficacité (en connectant plus directement ses « data centers » des deux côtés de l'Atlantique par exemple), ou d'atteindre certaines zones jusqu'alors mal desservies, mais où il dispose de beaucoup de clients. Dans un schéma présenté par Google, on voit que le groupe cible clairement, sur le Vieux Continent, la Belgique.

Or en parallèle, Google a annoncé début février la construction d'un nouveau data center dans le plat pays. Celui-ci sera opérationnel mi-2019. En outre, la Belgique a été le premier pays européen à accueillir un data center de Google, en 2009. Sous ce prisme, on comprend mieux l'intérêt de Google de disposer d'une liaison aussi directe que possible avec ces infrastructures.

Il n'est pas non plus surprenant que Google privatise une liaison entre les États-Unis et l'Europe. Car il s'agit là d'un axe majeur des communications mondiales, dont le trafic ne cesse de croître. Et ce, entre autres parce que les Européens utilisent massivement les applications des géants américains du Net, dont Google est un des fers de lance. Cet investissement confirme quoi qu'il en soit l'appétit croissant des acteurs du monde de l'Internet pour les câbles sous-marins. Alors que jusqu'à il y a peu, les opérateurs télécoms étaient de loin les premiers investisseurs dans ces infrastructures essentielles, qui assurent environ 99% des communications intercontinentales.