Renseignement : "pas de surveillance de masse" martèle Bernard Cazeneuve

Par Delphine Cuny  |   |  451  mots
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.
Le ministre de l'Intérieur essaie de désamorcer les critiques sur le projet de loi sur le renseignement qui sera examiné en séance à l'Assemblée lundi. De la CNIL aux avocats et magistrats en passant par les hébergeurs de données, l'opposition est forte dans la société civile.

Bernard Cazeneuve monte au créneau pour tenter de désamorcer les critiques tous azimuts contre le projet de loi sur le renseignement qui sera examiné en séance à l'Assemblée nationale à partir de lundi, dans le cadre d'une procédure accélérée. Le ministre de l'Intérieur essaie d'expliquer la nécessité de la modernisation des outils à la disposition des agents du renseignement et de minimiser les risques de dérive, dans un entretien au journal Libération paru ce samedi.

"Les mesures proposées ne visent nullement à instaurer une surveillance de masse ; elles cherchent au contraire à cibler les personnes qu'il faut suivre pour mieux protéger les Français" affirme Bernard Cazeneuve. "Parler de surveillance généralisée est un mensonge."

Menace de délocalisation des hébergeurs de données

La Commission nationale informatique et libertés publiques (Cnil) a émis des réserves sur ce texte, de même que des syndicats de magistrats, d'avocats et le président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), qui sera remplacée par une nouvelle commission (CNCTR). Les acteurs du secteur ont aussi exprimé leurs inquiétudes d'une mise à mal de la confiance dans l'économie numérique. Les plus grands hébergeurs de données français menacent même de délocaliser leurs "data centers" : ainsi Octave Kabla d'OVH a indiqué revoir son plan d'investissement de 400 millions d'euros afin d'implanter ses centres de données ailleurs en Europe, hors de France.

"Aujourd'hui, les algorithmes sont massivement utilisés par les géants de l'internet pour des activités à caractère commercial sans susciter la moindre indignation" avance Bernard Cazeneuve.

Sur ce point, les membres de l'ASIC (Association des services Internet communautaires), qui comptent Google, Facebook, Dailmotion etc, ont rappelé récemment qu'il existe "de nombreux garde-fous" sur ces pratiques commerciales, notamment "un contrôle, voire des sanctions, de la part des diverses autorités de protection des données en Europe", comme la CNIL, "une information préalable et un recueil du consentement de la part des internautes" et "la possibilité offerte aux internautes de pouvoir contrôler leurs données - à savoir en supprimer, en modifier le contenu voire les exporter pour les porter vers d'autres services."

Le ministre de l'Intérieur assure que "l'Etat, pour sa part, se fixe à lui-même des règles draconiennes" et que l'utilisation de ces dispositifs "débouchera sur des données ciblées relatives aux seuls individus qui représentent une menace et dont la surveillance est nécessaire à la protection des citoyens". Bernard Cazeneuve affirme que "les données de tiers qui seraient fortuitement captées seront écrasées."