La fièvre acheteuse de Drahi ne va pas retomber

Par Pierre Manière  |   |  567  mots
Patrick Drahi, le patron d'Altice, maison-mère de Numericable-SFR.
Auditionné par la commission des affaires économiques du Sénat, le patron d’Altice (maison-mère de SFR en France) a déclaré vouloir se développer davantage aux Etats-Unis.

Si le marché français demeure sa priorité, il s'y trouve un chouïa à l'étroit. Auditionné mercredi par la commission des affaires économiques du Sénat, Patrick Drahi a affiché sa volonté de se développer davantage aux Etats-Unis. Après avoir racheté les opérateurs américains Suddenlink et Cablevision (dont le closing est attendu d'ici peu), le magnat des télécoms et des médias ouvre ainsi clairement la porte à de nouvelles acquisitions au pays de l'Oncle Sam.

Après s'être offert moult opérateurs et groupes de médias ces derniers temps (dont SFR et Portugal Telecom en 2014), Patrick Drahi n'a donc pas dit son dernier mot sur le front des acquisitions. Finalement, n'ayant que faire des critiques, il reste fidèle à sa philosophie : pour lui l'objectif premier d'une entreprise est de grandir. Continuellement. Au point qu'une pause, même brève, semble presque relever du camouflet. « La seule façon de créer une entreprise pérenne, c'est de la développer », dit-il souvent. Et tant pis si cela doit encore alourdir sa dette colossale, qui s'élève désormais à plus de 50 milliards d'euros.

Une marge de manœuvre aux Etats-Unis

Pourquoi se focalise-t-il sur les Etats-Unis ? Parce qu'il y dispose, selon lui, d'une marge de manœuvre qu'il n'a pas ailleurs. Devant les sénateurs, il s'est fendu d'une petite démonstration :

« Pour vous donner des ordres de grandeurs, en France, on a en valeur à peu près 30% du marché des télécoms. Car c'est un marché de l'ordre de 40 milliards [d'euros, Ndlr], et on en fait 11 milliards. Et aux Etats-Unis, nous allons faire un peu plus de 9 milliards [de dollars], mais nous n'aurons que 2% du marché. »

Sous ce prisme, le marché américain apparaît, à ses yeux, comme une terre de conquête privilégiée :

« Bien évidemment, la France, c'est ma priorité puisque c'est de là que je suis parti. Mais en termes d'expansion de mon groupe, il va être difficile pour moi de passer de 30% à 50% [de part de marché]. Même si je travaille très, très, très bien, je vais passer de 30 à 32%. Je vais gagner 2% de part de marché, sur un marché de 40 milliards, ça fait 800 millions... Alors qu'aux Etats-Unis, il me paraît plus facile de passer de 2% à 10% [de part de marché]. Et les 8% [gagnés] en question? Eh bien c'est 40 milliards, c'est-à-dire tout le marché français des télécoms. »

Continuer à se développer

Mais alors, quand Patrick Drahi compte-t-il repartir à l'offensive outre-Atlantique ? A l'en croire, d'ici peu :

« Je pense que quand on aura montré ce que nous savons faire aux Etats-Unis, c'est-à-dire dans un an ou deux maximum, on [aura davantage la stature] internationale pour nous permettre de continuer à nous développer bien sûr en France, mais aussi dans le reste du monde. »

Sachant que, pour mémoire, Patrick Drahi a été contraint de lever le pied sur ses emplettes dans les télécoms juste après l'annonce de son rachat de Cablevision en septembre dernier. Après avoir souffert de conditions plus difficiles sur le marché du crédit pour financer cette acquisition, le titre d'Altice a dégringolé en Bourse. Ce qui a poussé Dexter Goei, le DG d'Altice, à déclarer à la presse que groupe ferait une « pause » dans ses achats.