Pourquoi IBM lâche 34 milliards de dollars dans Red Hat, géant de l'open source

Par latribune.fr  |   |  756  mots
Le groupe informatique IBM signe l'acquisition la plus chère de son histoire, en achetant Red Hat, éditeur de logiciels libres (dont Linux), pour 34 milliards de dollars. (Crédits : © 2009 Thomson Reuters)
En mettant la main sur Red Hat, premier fournisseur mondial de logiciels libres à qui l'on doit Linux, IBM signe l'acquisition la plus chère de son histoire. Alors que les deux groupes menaient des projets communs depuis près de 20 ans, IBM y voit l'opportunité d'accélérer sa présence sur le marché très porteur du cloud.

IBM sort le chéquier. Le groupe informatique américain a annoncé dimanche soir investir 34 milliards de dollars pour l'acquisition de Red Hat, premier fournisseur mondial de logiciels libres, notamment à l'origine du système d'exploitation libre Linux. IBM signe ainsi l'acquisition la plus chère de son histoire, preuve de l'intérêt stratégique de Red Hat pour le développement des activités du groupe informatique. Les deux groupes menaient des projets communs depuis près de 20 ans. Grâce à l'éditeur de logiciels open source, créé en 1993, IBM souhaite ainsi accélérer sa présence sur le marché très porteur du cloud (informatique dématérialisée), actuellement dominé par Amazon.

Dans un communiqué conjoint, IBM assure que 80% de la charge de travail des entreprises n'est toujours pas transposable dans le cloud en raison de la nature fermée du marché de l'informatique dématérialisée à l'heure actuelle. Or, les services en open source proposés par Red Hat devraient permettre d'aider les entreprises à faire le pont entre les différentes plateformes de stockage des données, selon Ginni Rometty, Pdg d'IBM.

"L'acquisition de Red Hat va changer la donne. Cela change tout sur le marché du cloud", assure Ginny Rometty. "IBM va devenir le premier fournisseur mondial de cloud hybride", a-t-elle poursuivi, estimant qu'il s'agissait là de la prochaine énorme poche de croissance pour l'informatique dématérialisée permettant, par exemple, de connecter différents types de "nuages" privés ou publics.

Capitalisation de 20,5 milliards de dollars pour Red Hat

Toujours selon le groupe informatique, cette acquisition devrait accélérer la croissance de son chiffre d'affaires, de sa marge brute et de sa profitabilité dans les 12 mois qui suivront la conclusion du rachat. L'entreprise précise également que cela aura un effet bénéfique sur le dividende. En effet, Red Hat, qui fonctionne par abonnements, va permettre à IBM de récupérer une source lucrative de revenus réguliers. L'éditeur a dégagé un bénéfice net de 259 millions de dollars pour un chiffre d'affaires de 2,9 milliards de dollars (+21% sur un an) lors de l'exercice 2018 clos fin mars.

C'est pourquoi IBM n'a pas hésité à proposer 190 dollars par action Red Hat pour acquérir l'ensemble de l'éditeur, alors qu'elle se négociait à un peu moins de 116,7 dollars vendredi à la clôture de la bourse de New York. La capitalisation boursière de Red Hat est de 20,5 milliards de dollars, celle d'IBM atteint 114 milliards. Pour aider à faire face au montant très important à débourser - en partie en cash et en partie par endettement mais sans préciser les proportions - IBM renonce à son plan de rachat d'actions en 2020 et 2021. L'entreprise tient aussi à préciser qu'elle "s'engage à maintenir une notation de son crédit correspondant à un investissement de grande qualité". IBM affirme avoir les moyens financiers d'assurer la transaction à sa signature. Approuvée par les conseils d'administration des deux entreprises, l'acquisition devrait être bouclée durant le deuxième semestre de 2019.

Intégration autonome au sein d'IBM

Red Hat sera intégré au sein d'IBM sous la forme d'une unité distincte, qui pourra continuer à utiliser ses propres méthodes de travail.

"IBM a l'intention de garder le siège de Red Hat, ses installations, sa marque et sa façon de faire", résume le communiqué.

Jim Whitehurst, Pdg de Red Hat, devrait garder la main sur son équipe et devenir membre de la direction d'IBM où il rendra compte directement à Ginni Rometty. Les 12.600 emplois générés par Red Hat sont préservés et vont venir gonfler les effectifs actuels d'IBM, s'élevant à 370.000 salariés. IBM tente de sortir la tête de l'eau, après six années de baisse de chiffre d'affaires entre 2012 et 2017, dû à la faiblesse de ses divisions de PC et de logiciels.

Le groupe informatique s'est depuis recentré sur sa division "initiatives stratégiques", regroupant entre autres le cloud, marché en pleine expansion et aux marges juteuses, la sécurité et l'analytics (analyse et gestion de données). De quoi retrouver des couleurs depuis le début de l'année, où IBM a enregistré un chiffre d'affaires à la hausse sur les trois derniers trimestres. Le groupe informatique n'est pas le seul géant à parier sur le logiciel libre. En juin, Microsoft avait annoncé le rachat de GitHub, plateforme de partage de codes open source, pour 7,5 milliards de dollars.

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(Avec agences)